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Cérémonies sociales à Diéma : LA FIEVRE DE L’UNIFORME

A tout prix, les femmes veulent donner plus de visibilité et plus d’harmonie à leur présence aux cérémonies de baptême et de mariage

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A Diéma aujourd’hui, « l’uniforme » est en vogue chez les femmes et les jeunes filles. A l’annonce d’un mariage, d’un baptême ou de toutes autres cérémonies sociales, excepté le décès, elles ne songent qu’à confectionner une nouvelle tenue. A tout prix les élégantes veulent donner plus de visibilité, plus d’harmonie à leur présence à la fête.
Pourtant l’uniforme coupe le sommeil aux hommes. Beaucoup de maris estiment que ces dépenses sont futiles. Si la femme n’a pas les moyens, le mari endosse généralement les frais d’achat et de couture des pagnes. Comble de malchanche plusieurs évènements peuvent survenir à la fois et exigent autant d’uniformes.
Le poids pèse lourdement sur Malick. Il se lamente : «Je ne sais pas si tous les hommes sont comme moi. Les uniformes de mes filles me coûtent chers. A l’occasion de chaque mariage ou baptême quelque part, leur maman les dirige sur moi sous prétexte qu’elle ne travaille pas, et qu’elle n’a pas d’argent. Pour une tenue je débourse souvent trois mille cinq cents à six mille Fcfa, sans compter les frais de couture. Vraiment si les femmes pouvaient abandonner la folie de s’offrir l’uniforme à chaque cérémonie sociale».
Seydou Koné, vendeur d’essence flaire une odeur d’arnaque. Il explique que dès que la date du mariage est connue, « la sœur, la cousine ou l’amie de la future mariée en profite pour se faire de l’argent. La femme d’affaires court acheter des pagnes jusqu’ à Bamako, à bas prix pour revenir les placer avec un bon bénéfice. Les femmes se ruent sur les coupons. Plusieurs s’endettent, si elles n’ont pas d’argent. Personne ne veut salir son honneur en s’avouant pauvre». Ces propos sont confirmés par Aissata, une élève. « Un jour, une camarade de classe a pris à crédit 3 pagnes WAX Iterguet, à 7 500 Fcfa remboursables dans un mois. Le délai arriva. La vendeuse vint réclamer son dû, jusqu’ à l’école. C’était la récréation, elle se posta hors de la cour et fit appel à sa créancière. Elles étaient en pourparlers lorsqu’ un jeune homme passait, celui-là même qui cherchait depuis belle lurette à nouer des relations intimes avec la fille en question. L’occasion était favorable pour notre homme de gagner des points. Sans tergiverser, il sortit l’argent pour régler », témoigne t-elle.
Souleymane Kamissoko, mécanicien estime qu’il n’a pas le choix. «Je suis obligé de le faire, même s’il faut s’endetter. Il faut faire plaisir aux femmes. Si on n’achète pas l’uniforme pour sa femme, elle se fâchera. Or si la femme est frustrée, elle ne fait rien de bon, elle bouleverse tout à la maison », explique-t-il.
Certaines femmes sont tellement passionnées par le phénomène qu’elles n’arrivent pas à se retenir. C’est le cas de Assanatou. « Le tailleur n’a pas confectionné à temps mon uniforme pour le baptême de nos voisins. Je n’ai pas pu me retenir de traiter le tailleur de tous les noms d’oiseau. Je me gênais au milieu des autres, toutes belles dans leurs nouvelles tenues», raconte-t-elle.

Cohésion et solidarité. Aux yeux de certains, l’uniforme a un autre sens. Par exemple, quand les femmes portent un même type de vêtements lors d’un évènement elles se sentent comme des amies unies comme les doigts d’une main. La cohésion et la solidarité au sein du groupe de femmes se renforcent.
L’avis du vieux Bourama Sidibé, n’est pas à exclure. Il soutient que « l’uniforme n’est pas mal en soi. Mais certains hommes ne voient que le côté des dépenses. Quand les femmes s’habillent en uniforme au cours des mariages, baptêmes, de la fête du 08 mars, etc, elles montrent qu’elles sont liées par des relations de parenté, d’amitié et de voisinage. Cet aspect est très important dans notre société. Il doit être cultivé, entretenu. Prenons l’exemple sur une équipe de football. Vous ne verrez jamais les joueurs d’une même équipe sur le terrain avec des habits différents. Les onze joueurs de l’équipe visent les mêmes objectifs, les mêmes intérêts. Ils sont motivés pour remporter la victoire sur
l’adversaire ».
Ramata Konaté, représentante de l’ANPE à Dièma reconnaît que certaines exagèrent souvent. « Les épouses demandent parfois deux à trois uniformes à acheter obligatoirement. Les portefeuilles des époux se vident rapidement. Quand on n’a pas les moyens, la sagesse conseille de s’en passer. Mais si vous refusez de payer l’uniforme de mariage des autres, si votre tour arrive, elles se désolidariseront. Cette tenue est devenue une sorte de dette sociale à rembourser sans faillir.»
Si les maris se plaignent des dépenses occasionnées par l’achat de l’uniforme, la commerçante Salé, elle se frotte les mains. Plusieurs commandes de pagnes passent par ses mains. Mais elle déplore le fait que les femmes sont exigeantes. Elles ont le choix difficile. «Si les tissus arrivent, beaucoup refusent souvent de prendre prétextant que les pagnes ne sont pas de leur goût. J’achète en gros mes marchandises», indique-t-elle. La vendeuse joue franc jeu en nous avouant que son commerçant lui fait des rabais. «Je ne suis pas gourmande, sur chaque lot de trois pagnes, je réalise un bénéfice de 500 Fcfa seulement. C’est le ‘’Fansi’’ fabriqué dans notre pays qui marche ces derniers temps. Les femmes l’apprécient à cause de sa qualité. Il dure sans se déteindre. Le mois passé, avec le mariage de deux jumelles dans notre quartier, j’ai réalisé 45.000 F cfa, de bénéfice. J’ai pu augmenter mon fonds de roulement»
La célibataire Djorobo tient à sauvegarder son indépendance et sa dignité. Elle se débrouille dans le créneau du petit commerce. Dame Djorobo assure que ce qu’elle gagne lui suffit largement. Elle n’aime pas faire appel aux hommes qui lui font les yeux doux. Et elle assène : « J’achète les uniformes qu’on me présente en dépensant l’argent que je gagne. Je rends grâce à Dieu».

O. BA
AMAP-Dièma

source : L Essor

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