Depuis les années 2008, l’état a décidé d’appuyer les producteurs en subventionnant l’acquisition des engrais minéraux et organiques. Ainsi, le gouvernement intervenait à travers une allocation budgétaire qui permettait aux producteurs d’acquérir à un prix subventionné fixe soit 12.500 Fcfa le sac de 50 kg d’engrais au début et depuis 2014, ce montant est passé à 11.000 Fcfa.
Depuis le début de l’opération lors de la campagne agricole 2008-2009, le montant alloué à la subvention a considérablement augmenté d’année en année. Cette année, l’État n’a pu débourser que 15 milliards de Fcfa pour la subvention. Malheureusement, cette situation a créé une certaine incompréhension chez les producteurs de la Région de Sikasso. Cette région est réputée pour ses importantes productions agricoles à cause de la situation climatique favorable. Notre équipe de reportage a approché les responsables régionaux du secteur agricole.
20.000 FCFA LE SAC-Chiaka Diamouténé est producteur à Sikasso, il possède un champ de 15 hectares dans le village de Diomatènè. Lui, tout comme d’autres producteurs se plaignent de l’insuffisance de la quantité d’engrais subventionné cette année. «L’engrais coûte très cher au marché. Il coûte 20.000 Fcfa le sac et il est même introuvable», déplore-t-il.
De son côté, le paysan Oumar Ouattara de Bougoula Hameau (l’un des quartiers de la Cité du Kénédougou) était venu s’approvisionner en engrais subventionné, mais malheureusement il s’est entendu dire qu’il est venu en retard. «Je possède un champ de maïs de 4 hectares. J’avais besoin de 15 sacs d’engrais, mais malheureusement on vient de m’informer que c’est fini», explique-t-il désespérément. Il ajoutera que si l’engrais subventionné était disponible, il allait prendre 50 sacs. Il souhaite que l’État augmente la quantité d’engrais subventionnés afin de permettre aux producteurs de s’approvisionner à souhait.
Tout comme les deux précédents interlocuteurs, l’enseignant Siaka Traoré est aussi producteur. Avec son champ de maïs de 6 hectares, il voulait acheter une dizaine de sacs d’engrais, mais malheureusement pour lui également, l’engrais est fini. Par ailleurs, M. Traoré invite le gouvernement à informer les producteurs du démarrage du recensement afin que tous ceux qui désirent avoir l’engrais subventionné se fassent recenser. «La plupart des producteurs ne sont pas informés du démarrage de ces opérations de recensement», souligne-t-il.
SEULS LES PAYSANS RECENSÉS SONT SERVIS-Le chef de la division enseignement agricole et animation rurale de la direction régionale de l’Agriculture, Moumini Dembélé soutient que cela fait des années que le prix de l’engrais subventionné n’a pas changé. «Le montant convenu reste toujours 11.000 Fcfa», précise-t-il. Il soulignera que la quantité subventionnée est épuisée, car le budget de cette année est inférieur à celle de l’année passée.
«Nous expliquons aux producteurs que la quantité subventionnée est terminée. Mais tant qu’ils voient de l’engrais chez les fournisseurs, ils ne nous croient pas. Ce qui contribue à alimenter les frustrations», indique-t-il. Il a ajouté que les producteurs doivent comprendre que l’État ne peut pas subventionner tout l’engrais qui se trouve sur le marché. Moumini Dembélé a soutenu que la subvention de l’engrais est moins chère au Mali que dans de nombreux pays voisins.
«Cette année, la quantité d’engrais subventionnés reçue par la Région de Sikasso (Cercles de Sikasso et de Kadiolo) est de 9.150 tonnes pour 326.039 producteurs recensés (demandeurs). à ce jour, 9.130 tonnes d’engrais ont été livrées aux producteurs. Il ne reste plus que 20 tonnes et ce stock se trouve au niveau de Kadiolo», explique-t-il. Avant de préciser que les besoins de la région en engrais pour la campagne 2021-2022 sont estimés à 68.049 tonnes et la quantité subventionnée est de 9.150 tonnes, soit 13,45%.
Expliquant la procédure d’acquisition de l’engrais, M. Dembélé précisera que le riz, le maïs et le coton constituent les trois cultures qui sont subventionnés par l’état dans la région. Il avancera qu’une fois que les agents recenseurs terminent avec le recensement des producteurs intéressés, ils vérifient si tous ceux-ci possèdent des cartes d’identité nationales avant de leur délivrer l’autorisation d’achat ou encore la caution. Les producteurs apportent cette autorisation/caution chez les fournisseurs d’engrais pour se faire livrer la marchandise.
IMMATRICULATION DEMANDÉE-Par ailleurs, Moumini Dembélé explique que l’engrais subventionné est accessible à tous les producteurs inscrits au sein des organisations professionnelles, des associations, des coopératives, des interprofessions. La direction régionale de l’Agriculture reconnaît volontiers qu’elle fait face très souvent à la tricherie. «On ne sait pas qui est vraiment producteur et qui ne l’est pas. Souvent, tous les membres d’une même organisation viennent s’approvisionner… Tout le monde peut s’approvisionner à condition qu’il aie la carte d’identité nationale», explique Moumini Dembélé. Pour sortir de ce cafouillage, le technicien suggère d’achever l’opération d’immatriculation des champs des producteurs. Par ailleurs, il saisira l’opportunité pour exhorter l’État à bien encadrer la procédure d’acquisition de la subvention.
De son côté, le président de la Chambre régionale d’agriculture, Abdoulaye Bamba assure que c’est le quota des engrais subventionnés qui revient à la Région de Sikasso qui est jugé insuffisant. Soulignant les avantages «significatifs» de la subvention de l’engrais sur les producteurs, M. Bambaa relevé notamment l’augmentation de la superficie cultivable, l’approvisionnement des producteurs en engrais à temps ainsi que la garantie d’une bonne production.
Faisant chorus avec le technicien, le président de la Chambre régionale d’agriculture invite le gouvernement à octroyer les moyens techniques et financiers pour immatriculer les champs des producteurs. Cette initiative de son point de vue apportera un éclairage dans le processus de distribution de l’engrais subventionné. Aussi, il prône une augmentation de la quantité de l’engrais subventionné pour la région.
Mariam F. DIABATÉ
Amap-Sikasso
Source : L’ESSOR