Recycler du plastique pour en faire des pavés écolos, tel est le défi que s’est lancé la légende du football africain Roger Milla. Après une brillante carrière de footballeur, celui qui fut à 42 ans le plus vieux buteur en Coupe du monde, en 1994, se bat désormais contre le fléau des déchets plastiques au Cameroun.
Son palmarès sur les terrains de football affole les compteurs et sert encore de repère à la nouvelle génération de joueurs: Deux fois vainqueur de la Coupe d’Afrique des nations, en 1984 et 1988, finaliste en 1986, Roger Milla a également été deux fois vainqueur de la Coupe de France, en 1980 (Monaco) et 1981 (Bastia) et finaliste du Championnat de France de D2 en 1986 avec Saint-Étienne.
«Ma plus grande fierté en tant que joueur demeure d’avoir foulé de nombreuses pelouses de par le monde entier et d’avoir fait le travail qu’il y avait à faire, c’est-à-dire de jouer au ballon et de marquer des buts»,confie à Sputnik Roger Milla, qui nous a reçus dans sa résidence de Yaoundé.
Après les terrains, la légende du foot camerounais et africain se consacre notamment à sa fondation Cœur d’Afrique, créée en 2005, au moment où beaucoup se seraient attendus à un projet dans le domaine du football.
«Ce n’était pas mon objectif. Vous savez qu’à ce jour, au Cameroun, tout le monde se lance dans le domaine du football, même ceux qui ne savent pas ce que c’est. Il y a des compatriotes qui ont leur centre de formation dans leurs sacoches et je ne voudrais pas rentrer dans ce méli-mélo pour ternir mon image; c’est pour cette raison que je ne me suis pas attaqué au Football.
Je me suis investi dans l’humanitaire, ceci parce que mon épouse est décédée des suites d’un accident de la route. Au départ, je caressais le rêve de prendre en charge tous les blessés de la route. Mes amis m’ont dit que les chances de réussir dans cette initiative étaient hypothétiques. C’est ainsi que l’on est descendu plus bas, pour s’occuper des enfants de la rue, des handicapés et autres nécessiteux», relate Roger Milla au micro de Sputnik.
C’est à travers sa fondation qu’il s’est lancé, en compagnie d’experts, dans le recyclage des déchets plastiques qui pullulent dans la ville de Yaoundé, la capitale du pays, et dans bien d’autres métropoles au Cameroun.
«J’ai des amis qui ont une riche expérience dans le domaine de l’écologie. Ils ont consenti à mettre leur expertise au service de la fondation. C’est pour cette raison que l’on a introduit l’écologie dans la veine de notre programme avec les différentes projections. Nous nous attelons, au quotidien, à la fabrique de pavés à base de sable et de déchets plastiques.»
«Notre ambition, c’était de donner du travail à beaucoup de jeunes nécessiteux qui n’en ont pas. Des cadres de la République ont grandement apprécié l’initiative. La plupart ne se sont arrêtés qu’à l’appréciation, malheureusement, car l’accompagnement nécessaire n’a pas suivi. Néanmoins, nous continuons de nous battre pour mettre sur pied une société qui va employer un grand nombre de jeunes Camerounais», lance-t-il, plein d’optimisme.
Depuis janvier 2018, la fondation Cœur d’Afrique a également entrepris d’associer des établissements scolaires à la collecte des déchets plastiques.
«Nous avons remarqué que dans beaucoup d’établissements scolaires, il y a d’importants dépôts de déchets plastiques. Nous nous sommes entendus avec les responsables de tous ces collèges et lycées pour permettre à leurs élèves de faire le ramassage, ce qui a été bien fait. Personnellement, je tiens à remercier tous ces proviseurs.
Nous continuons toujours à travailler avec ces lycées, mais également avec d’autres personnes de domaines divers. Le projet évolue bien et d’importantes quantités de déchets ramassés continuent de nous parvenir. Nous en avons reçu récemment du gouverneur de la région du nord; d’autres viendront bientôt de l’Extrême-Nord et de l’Adamaoua. Nous avons fabriqué des pavés pour revêtir la cour du lycée Général Leclerc, du lycée français, à la Fédération camerounaise de hand-ball et ailleurs», détaille l’ancienne gloire du foot.
«Nous avons installé la fabrique à Olembé. Mais nous butons actuellement sur un problème lié à la machine de travail acquise au Burkina Faso. Elle produit en moyenne 50 pavés par jour, alors qu’elle devrait en faire normalement 1.500 à 2.000 par jour. Elle s’est enrayée et des techniciens travaillent actuellement à la remettre en marche. Dès qu’elle sera fonctionnelle, je crois que nous allons avancer dans ce projet. Mais quelques pavés sont déjà faits et la fabrication est en cours; nous continuons par ailleurs à nous battre afin que la machine soit de plus en plus performante», renchérit M. Milla.
Nonobstant les difficultés, l’usine, qui emploie environ 20 personnes et génère plus de 300 emplois indirects dans la chaîne de récupération des déchets, a déjà traité des tonnes de détritus en plastique, ce qui a permis de produire des pavés écologiques, jugés plus résistants que les pavés fabriqués à base de ciment. À terme, Cœur d’Afrique compte former 2.500 jeunes à la collecte, au tri et à la transformation de déchets plastiques.
Roger Milla, qui se montre très fier de sa nouvelle activité, espère pouvoir acquérir de nouvelles machines afin de la développer et d’offrir des emplois à encore plus de jeunes.