Au début des travaux du Conseil des droits de l’homme (CDH) à Genève, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU par intérim, Nada Al-Nashif, a fustigé l’augmentation des violations des droits humains au cours des opérations de sécurité au Burkina Faso, qui touchent de nombreux civils.
« Nous sommes inquiets de l’augmentation des discours de haine et d’incitation à la violence contre les minorités ethniques », a déclaré Mme Al-Nashif à l’ouverture de la 51e session du CDH.
En cause notamment, les appels haineux lancés contre la communauté peule. Des enregistrements audios ont circulé depuis début août sur les réseaux sociaux, invitant les populations « autochtones » s’en prendre massivement aux Peuls.
La Jordanienne, qui dirige le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH) après le départ de la Chilienne Michelle Bachelet et avant l’arrivée de l’Autrichien Volker Türk, demande instamment aux autorités de veiller à ce que les forces de sécurité et de défense opèrent dans le respect des normes relatives aux droits humains. Elle appelle Ouagadougou à « enquêter sur les allégations de violations des droits humains ».
Inquiétudes concernant le Mali et la RCA
Au Mali, le HCDH s’est également préoccupé par les violations présumées commises lors d’opérations militaires menées par les forces de défense et de sécurité maliennes qui, dans certains cas (apparemment à Ménaka, Gao et Mopti), bénéficient « du soutien opérationnel d’entreprises militaires privées étrangères ».
En République centrafricaine, la Haute-Commissaire par intérim a exhorté le gouvernement à veiller à ce que « les forces de défense et de sécurité et les entrepreneurs militaires privés étrangers cessent immédiatement les violations des droits de l’homme et du droit humanitaire international, y compris les attaques ciblées contre les musulmans et toute autre minorité ».
La Guinée promet une enquête sur les morts des récentes manifs de l’opposition
Dans le contexte des transitions en cours dans plusieurs pays tels que le Tchad, la Guinée et le Soudan, toutes les violations présumées commises lors d’opérations militaires ou dans le cadre de manifestations doivent faire l’objet d’une enquête rapide, impartiale et approfondie.
« Nous rappelons l’importance de favoriser un espace civique dynamique et la tenue de dialogues nationaux inclusifs », a affirmé Mme Al-Nashif.
Face à ces interpellations, la délégation ministérielle guinéenne, présente à Genève, a tenu à réaffirmer ses engagements en matière de droits de l’homme. Le ministre guinéen de la Justice, Alphonse Charles Wright, a ainsi rappelé la libération des opposants politiques détenus.
Pour Conakry, il incombe au gouvernement de rendre justice aux victimes des événements de septembre 2009. Des poursuites seront engagées pour mettre fin à l’impunité et rendre justice aux familles des victimes. Un projet de loi sur la protection des victimes a été élaboré.
« Un cours de formation a été dispensé aux juges appelés à entendre des procès », a dit M. Wright, relevant qu’une enquête sur les décès survenus lors des récentes manifestations du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) serait également menée.
« Le fonds d’indemnisation doit être renforcé grâce à un partenariat avec des organisations internationales », a conclu le ministre guinéen.
Au Burundi, rétrécissement de l’espace civique
S’agissant de la situation en Sierra Leone, le HCDH a réitéré son appel au gouvernement pour qu’il mène « des enquêtes rapides, impartiales et approfondies sur les violences et les décès survenus lors des manifestations publiques du 10 août » et qu’il demande des comptes aux responsables, quels que soient leur statut et leur affiliation politique.
« Je demande instamment à toutes les parties de privilégier le dialogue », a dit la Haute-Commissaire par intérim.
L’agence onusienne s’est également inquiétée du rétrécissement de l’espace civique en Eswatini. Plus d’un an après, l’instabilité politique et les troubles civils, qui ont commencé par des manifestations en faveur de la démocratie à Eswatini, se heurteraient à « un usage excessif de la force par les agents de sécurité ».
Mme Al-Nashif invite Mbabane à s’attaquer à l’impunité pour les violations des droits de l’homme, élément essentiel d’un dialogue national significatif et inclusif.
Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme est préoccupé par la détérioration de la situation et le rétrécissement de l’espace civique au Burundi. Il a notamment fustigé la déclaration du secrétaire général du parti au pouvoir en août 2022 appelant les Imbonerakure à poursuivre les patrouilles de nuit et à tuer tout « fauteur de troubles ».
La Haute-Commissaire par intérim a ainsi appelé Bujumbura à coopérer avec le nouveau Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Burundi, qui peut aider et conseiller le gouvernement à remplir ses obligations en matière de droits humains.
L’ONU salue l’engagement des rebelles du Tigré à des pourparlers
L’ONU a salué lundi les déclarations des rebelles du Tigré qui se sont dits prêts dimanche à participer à des pourparlers sous l’égide de l’Union africaine (UA).
« Je suis encouragée par l’annonce faite hier par les autorités du Tigré de leur volonté de respecter une cessation immédiate des hostilités et de participer à un processus de paix solide sous les auspices de l’Union africaine », a fait valoir Mme Al-Nashif.
Les rebelles éthiopiens du Front populaire de libération du Tigré (TPLF) ont annoncé dimanche qu’ils étaient prêts à «une cessation des hostilités immédiate et mutuellement acceptée ». La reprise des combats il y a un mois avait mis un terme à une trêve lancée il y a six mois.
Le gouvernement éthiopien insistait depuis longtemps sur le fait que tout processus de paix devait être négocié sous l’égide de l’Union africaine (UA). « J’exhorte les parties à prendre des mesures immédiates pour mettre fin à la violence une fois pour toutes et à opter pour un dialogue constructif et authentique », a déclaré la Haute-Commissaire par intérim.
L’ONU salue les élections pacifiques en Angola et au Kenya
Mme Al-Nashif s’est également dite «très inquiète» des exécutions par les forces de sécurité et des violences intercommunautaires dans plusieurs régions éthiopiennes.
« Les meurtres perpétrés dans le cadre de prétendues [opérations de maintien de l’ordre], ainsi que les violences intercommunautaires à caractère ethnique à Benishangul-Gumuz, Gambella, Oromia et à la frontière entre les régions Afar et Somali sont très préoccupants », a dénoncé la Cheffe des droits de l’homme par intérim.
Elle demande aux autorités de protéger les citoyens et de mener des investigations rapides sur toutes ces victimes.
Par ailleurs, elle a salué les élections pacifiques et inclusives qui se sont récemment tenues en Angola et au Kenya.
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