Des appels à l’ “épuration ethnique” ont visé récemment la minorité peule du pays.
Quelque 700 guides religieux musulmans burkinabé, réunis fin août pour un séminaire de formation à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, ont dénoncé “l’intolérance religieuse et ethnique” qui se propage dans le pays confronté à la violence jihadiste.
Une inquiétude généralisée
Après les appels au calme du gouvernement militaire et ceux de plusieurs responsables politiques, la Fédération des associations islamiques du Burkina Faso (FAIB) intervient à son tour pour éviter une flambée de violences. En cause notamment, les appels haineux lancés contre la communauté peule. Des enregistrements audios ont circulé depuis début août sur les réseaux sociaux, invitant les populations “autochtones” à tuer massivement les Peuls. Il y est même question d’ “épuration ethnique”.
“Ce sont des propos d’une extrême gravité qui n’ont d’équivalence que les dérives de la radio Mille collines qui ont conduit au génocide rwandais (en 1994), une des pires tragédies de l’humanité et de laquelle nous devons savoir tirer des leçons”
Déclaration du Conseil des ministres, le 17 août 2022
Un “risque de guerre civile”
Les Peuls, minoritaires au Burkina Faso (1,5 million sur 20,5 millions d’habitants), sont assimilés aux groupes armés jihadistes car certains de leurs membres sont issus de cette communauté, comme le précise à l’AFP, Drissa Traoré, enseignant et analyste politique burkinabè qui regrette cet amalgame pouvant avoir de graves conséquences.
Ce n’est pas la première fois que la communauté peule est stigmatisée. En 2019, des massacres ont été commis dans le nord du Burkina contre des Peuls en représailles à des attaques commises par des jihadistes. Dans un contexte particulièrement tendu, le risque d’un nouveau dérapage n’est jamais trop loin. Alpha Barry, l’ancien ministre des Affaires étrangères du président Roch Marc Christian Kaboré renversé par le putsch militaire de janvier 2022, a alerté dans une récente tribune sur “le risque d’une vraie guerre civile“, après la diffusion des enregistrements anti-Peuls.
Une insécurité permanente
Le Burkina Faso fait face depuis 2015 à des mouvements armés jihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique. La violence a fait des milliers de morts et quelque deux millions de déplacés. Plus de 40% du territoire du Burkina échappe au contrôle de l’Etat.
Le pays est dirigé depuis fin janvier par des militaires qui ont pris le pouvoir par la force en promettant de ramener la sécurité. Une tâche pour le moins ardue car les attaques contre les civils et les militaires se multiplient depuis le coup d’Etat.