Entre dictatures militaires on se serre les coudes. Craignant une intervention armée de la communauté internationale afin de restaurer l’ordre démocratique et institutionnel au Niger les juntes militaires burkinabées et maliennes ont choisi ce vendredi 18 août 2023 d’y envoyer des avions d’appui tactique et d’attaque légère. Les Embraer A-29B Super Tucano des deux pays pourraient ainsi tenter de s’opposer aux forces de la CÉDÉAO, la Communauté Économique des États d’Afrique de l’Ouest. Dire que la situation est bouillante dans cette partie du Sahel est encore très en dessous de la réalité.
Selon la plus part des sources présentes dans la région les avions burkinabés et maliens sont arrivés au Niger ce dimanche 20 août 2023. Pour autant il faut signaler que les aéronefs en question ne sont présents ni sur la Base Aérienne 101 de Niamey ni sur la Base Aérienne 201 d’Agadez. La première reste sous le contrôle partiel de l’Armée de l’Air et de l’Espace et la seconde de l’US Air Force. Américains et Français entretiennent encore des contingents antiterroristes dans le pays. Les autorités «de transition» nigérienne, entendez par là la dictature militaire ayant renversée le président Mohamed Bazoum, reconnaissent de leur côté que les avions en question se trouvent à l’intérieur du territoire nigérien. Avec sa superficie d’1 267 000 km² le moins qu’on puisse dire c’est que le Niger c’est grand !
Les sources officielles nigériennes parlent de six avions «alliés» pour décrire les A-29B Super Tucano burkinabés et maliens déployés sur leur territoire. Ce qui impliquerait que le Burkina Faso a envoyé l’intégralité de son «Escadrille de Chasse» et le Mali l’ensemble de ses avions d’origine brésilienne. Rappelons que ces deux pays avaient reçu ces avions du temps de la coopération avec la France dans la guerre contre le terrorisme djihadiste et qu’ils avaient été en très grande partie financés par les États-Unis. Depuis plusieurs mois maintenant Washington DC a fermé le robinet des aides militaires aux forces burkinabées et maliennes. De leur côté les juntes militaires de ces deux pays rappellent qu’elles disposent d’hélicoptères de combat Mil Mi-24 / Mi-35 Hind capable de rallier rapidement le territoire nigérien en cas d’intervention ouest-africaine.
Outre le fait de montrer qu’Ibrahim Traoré et Assimi Goïta, chef des juntes militaires respectivement du Burkina Faso et du Mali, soutiennent leurs collègues nigériens dans leur action antidémocratique le déploiement de ces Embraer A-29B Super Tucano n’a pas réellement d’intérêt stratégique. D’abord s’ils veulent s’opposer à la Communauté Économique des États d’Afrique de l’Ouest leurs monomoteurs turbopropulsés risquent bien de ne pas faire long feu face à la chasse nigériane. Ensuite une telle action, un coup de force en fait, pourrait bien jouer en la défaveur de la jeune junte militaire nigérienne auprès de l’Union Africaine jusque là assez réservée sur une éventuelle intervention armée de la CÉDÉAO. Ses membres pourraient basculer du côté de l’interventionnisme ouest-africain. Enfin il y a le scénario du pire, celui que personne n’ose envisager : que le Burkina Faso et le Mali veuille mener un raid aérien contre les positions américaines et/ou françaises dans le pays. La réponse de Paris et de Washington DC serait alors dramatique pour le Burkina Faso et le Mali.
En fait plus on y réfléchit et plus le prépositionnement de ces six Embraer A-29B Super Tucano burkinabés et maliens ressemble à une mauvaise idée. C’est bien la preuve que s’ils sont effectivement des militaires les chefs des juntes de ces deux pays ont juste oublié d’être des diplomates. Ou alors ils usent de vieilles ficelles du siècle dernier mais avec des moyens dérisoires. Car après tout les monomoteurs turbopropulsés brésiliens ne sont jamais que des appareils d’appui tactique, pas des avions d’attaque et encore moins des avions de combat.
Affaire à suivre.
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