Il y a de cela quelques jours, le ministre de l’énergie et de l’eau, Makan Aliou Tounkara avait promis la fin des délestages intempestifs dans la ville de Bamako dans les meilleurs délais. Pari tenu. Car, aujourd’hui les habitants de la capitale respirent. Le courant est permanent dans certains quartiers, il revient à grands galops dans d’autres, au grand bonheur des ménages, des malades de tension artérielle, des petits commerces, des opérateurs économiques et des industriels. La touche Makan Tounkara redonne espoir aux Maliens, dont une majeure partie des activités reste liée à l’électricité.
Les jours passés ont été sombres pour beaucoup de Maliens, fondamentalement les habitants de Bamako, privés d’électricité et dont les activités ont été, sinon arrêtées, au moins sérieusement ralenties par ces délestages. Depuis la crise énergétique de 1998, les Bamakois n’avaient vécu un tel cauchemar. Les raisons de ces coupures sauvages sont multiples et les causes indépendantes de la volonté des autorités et structures en charge de la gestion de l’énergie. Malgré tout, le ministre de tutelle, Makan Aliou Tounkara s’est (énergiquement) impliqué pour écourter la souffrance des populations et remettre les services et entreprises au travail. Arrivé à la tête du département le 15 décembre à la faveur du gouvernement Diango, il en a fait une action forte de sa mission. Et aujourd’hui, le phénomène de délestage n’est certes pas endigué à 100%, mais Makan Tounkara l’a ramené aux proportions de coupures ordinaires.Pourquoi ces délestages ?
Les délestages qui avaient fortement secoué Bamako et les coupures constatées ça et là actuellement sont dus au fait que Energie du Mali est quasiment en cessation de paiement, la société étant endettée jusqu’à la lie. Or, pour une demande de consommation de 200 mégawatts, le Mali dispose seulement d’une puissance de 125 mégawatts, soit un gap de 75 mégawatts qui représentent à peu près 13 lignes aériennes et souterraines qui alimentent les quartiers de Bamako dont environ 40% des abonnés ne sont plus couverts dans cette situation.
Au plan financier, EDM SA devait, il y a un mois, 22 milliards aux pétroliers dont 13 milliards à Ben and Co, 5 milliards à Somapp, 4 milliards à Total et le reste aux autres petits fournisseurs de la place. Energie du Mali doit aussi 20 milliards aux fournisseurs non pétroliers. Et elle devait 28 milliards aux banques. Ce qui fait 70 milliards, pour un chiffre d’affaires d’environ 120 milliards de FCFA. La conséquence de cette crise de trésorerie, c’est que toute la maintenance qui devait être faite sur les groupes ne l’a pas été.
La révision décennale de Sélingué qui devait avoir lieu il y a près de cinq ans n’a pas été faite. Le résultat, c’est qu’il y a un groupe de Sélingué qui a cramé, donc indisponible. Ce qui fait 11 mégawatts de moins du potentiel de production.
La centrale de Sopam qui a été initiée par un Burkinabé et située vers Sirakoro fait 55 mégawatts. Mais, sur les 5 groupes, c’est un seul qui fonctionne. Les 4 autres sont arrêtés parce que tout simplement il n’y avait plus de compresseurs pour les lancer. Et cette centrale à laquelle Energie du Mali doit près de 6 milliards n’arrive plus à faire, depuis trois ans, la maintenance de ce groupe.
A Darsalam, à Bamako, il y a une turbine à combustion qui a une puissance iso de 26.7 mégawatts, mais on ne peut en tirer que 18 mégawatts à cause des conditions environnementales. Cette turbine n’a pas eu son inspection-combustion depuis trois ans. La faire fonctionner comporte des risques. En plus, en la mettant en service, elle consomme 120 000 litres de DDO par jour.
Toujours à Darsalam, il y a 6 petits groupes MTU qui sont à l’arrêt depuis un an, tous en panne et non réparés.
Pire, à cause des problèmes de trésorerie et des dettes, les pétroliers n’arrivent plus à approvisionner Energie du Mali en combustibles parce qu’ils ne peuvent plus faire des opérations avec les banques à cause du montant de ce passif.
La situation oblige EDM à prendre le recouvrement du jour pour aller chercher chaque matin et chaque soir une citerne par-ci, une autre par-là. Avec ces achats spots, on alimente les gens le temps que le carburant s’épuise dans les groupes. Et ce mode d’approvisionnement renchérit le coût des combustibles de près de 3 milliards de FCFA. Voilà quelques raisons qui expliquent le délestage à
Tout d’abord, .il avait été programmé depuis un an, dans le cadre des concertations entre les pays de l’Omvs, les techniciens, la maintenance des groupes de Manantali. La révision d’un des groupes tombe sur le mois de mars, et il a été naturellement mis hors service. Ce service va bientôt reprendre. Néanmoins, c’est une perte de 20 mégawatts, en attendant.
Ensuite, dans le cadre de l’interconnexion, la Côte d’Ivoire donnait au Mali 30 mégawatts. Mais, un groupe de 110 mégawatts est tombé en panne là-bas. Depuis, le Mali ne reçoit plus que 10 mégawatts au lieu de 30.
Donc, de bout en bout, le Mali a perdu tout son potentiel pour couvrir la demande. Alors, il ne restait plus aux autorités énergétiques qu’à faire une opération d’adaptation de la demande à l’offre : le délestage ou coupures par rotation.
Les solutions du ministre Makan Tounkara
Face à cette situation, qu’est-ce que le ministère de l’énergie et de l’eau a fait ? Il a acheté un compresseur pour la centrale Sopam.
En plus, le réseau est saturé par endroit, c’est-à-dire que même en cas de disponibilité d’énergie, les lignes sont saturées. Celles-ci sont entrain d’être renforcées. Par exemple, un câble est entrain d’être posé pour relier le poste de Lafiabougou (relié à Manantali) jusqu’à Badalabougou.
Ensuite, des experts ont été sollicités pour la réparation des 6 groupes MTU de Darsalam.
Le groupe de Manantali sera bientôt remis en fonction. Par contre, le groupe de Sélingué ne pourra pas être disponible avant plusieurs mois.
Aussi, le ministre Tounkara est intervenu auprès de son collègue en charge des finances qui a débloqué 4 0 milliards de subvention sous forme de décision de mandatement pour éponger les dettes des pétroliers et pour qu’ils reprennent la fourniture du carburant.
Autre effort, les autorités ont dépêché à Abidjan le directeur général adjoint d’EDM sa pour aller plaider la cause malienne pour le retour rapide des 30 mégawatts.
En plus, la Côte d’Ivoire s’apprête à mettre sur son réseau 120 mégawatts supplémentaires. Elle pourrait donc redonner au Mali non seulement ses 30 mégawatts mais aussi 20 autres de plus que le ministre Makan Tounkara a négociés.
Pour faire toutes ces opérations, il faut saluer l’apport de l’Etat qui va débloquer 40 milliards de subvention pour éviter qu’EDM ne mette la clé sous le paillasson. Ce fonds permettra de résoudre quasiment tous ces problèmes là et d’alimenter correctement les abonnés. C’est pourquoi, le Makan Tounkara avait promis de réduire considérablement le délestage intempestif. Et il l’a fait. Mieux, dans trois à cinq mois, il espère que EDM sa sera complètement remontée. Surtout si la société rentre dans ses droits vis-à-vis de certains créanciers : les abonnés doivent à EDM près de 30 milliards ; les municipalités près de 3 milliards ; les industriels doivent 6 milliards. Il y a des institutions dotées de primes d’eau et d’électricité, mais qui ne payent pas. C’est ça qui tue EDM. Cependant, l’Etat ne doit pratiquement rien à Energie du Mali, car les 5 milliards qu’il lui doit correspondant, à peu près, à trois mois de facturation conformément à son rythme de paiement.
Dernière précision de taille de Makan Tounkara : si la mesure d’augmentation de la grille tarifaire n’était pas prise, on serait entrain de fermer la porte d’EDM sa aujourd’hui.
Toutefois, la situation difficile de trésorerie était aussi empirée par un management exécrable. En effet, ça faisait trois ans qu’il n’y avait pas de réunion du Comité de direction à EDM-sa, ni de Conseil de discipline depuis 5 ans.
ST