En dépit de l’absence criarde de la partie la plus belliciste des pourparlers, l’épisode final de l’agenda du processus d’Alger était bien parti pour être conclu en beauté, Vendredi, le 15 Mai 2015, au Centre international de conférences de Bamako
Pour la circonstance, le Cicb a refusé foule et réuni un beau monde autour du président de la République avec une dizaine environ de chefs d’Etat venus témoigner leur intérêt pour le processus de paix et la stabilité au Mali.
L’absence criarde d’une personnalité de la dimension du rôle de la France dans le processus ainsi que des représentants des mouvements armés rebelles ont certes pesé sur la cérémonie en lui donnant un goût d’inachevé. Mais, elle n’a entamée outre mesure l’assurance de toutes les parties prenantes que notre pays, le Mali, a amorcé l’ultime phase de sa marche vers la paix. Et pour cause : les orateurs qui se sont succédés ont, tour à tour, magnifié le document issu du processus d’Alger et l’ont identifié comme un précieux déclic de stabilité et de réconciliation, quoiqu’une la signature sans les protagonistes essentiels l’assimile plus à un accord de fait qu’à un accord de paix.
Les jugements positifs sur le produit d’Alger, tout comme les espoirs qu’il suscite, apparaissent notamment dans les propos de chacune des éminentes personnalités qui se sont succédé à la tribune pour exprimer leurs impressions. «Une belle page de l’histoire du Mali est ouverte», a relevé le ministre des Affaires étrangère de l’Algérie, qualifiant le document de cadre idéal pour une paix durable au Mali.
Même son de cloche du côté de la secrétaire d’Etat française en charge de la coopération, de celui des porte-voix respectifs des Etats-Unis, de l’Union européenne ou encore des Nations-unis.
En définitive, les opinions pour reconnaître que l’accord précédemment paraphé à Alger, comme tous les instruments de même nature, ne donne pas satisfaction à toutes les parties. Mais, elle constitue une base solide pour la recherche de solution durable à la crise du Nord-Mali.
Les parties-prenantes recommandent par conséquent une stricte observation de son application et le respect des nombreux engagements contenus dans le document.
Les avis divergent, par contre, sur la teneur effective de la cérémonie de signature de Vendredi dernier ainsi que sur la suite à donner aux nombreuses réserves soulevées par la Coordination des mouvements de l’Azawad, dont la prise en compte conditionne leur ralliement à l’acte solennelle du 15 Mai 2015.
Pour la communauté internationale, à quelques exceptions près de ses composantes, non seulement l’accord devra rester ouvert à la signature des entités absentes de l’étape bamakoise, mais également le dialogue doit surtout pouvoir se poursuivre entre elles et les autorités maliennes. Toutes choses qui apparaissent dans les interventions respectives de la sous secrétaire adjointe chargée des questions de politique économique d’Afrique de l’Ouest et du secrétaire général adjoint des opérations de maintien de la paix des Nations unies.
Cependant, «le dialogue doit continuer avec les groupes qui ne sont pas ici», a déclaré Hervé Ladsous au nom de Ban Ki Moon, ajoutant dans la même veine : «Le fait que seules certaines des parties signent l’accord de paix ne peut pas servir de prétexte à la reprise d’opérations militaires contre les non-signataires». Et, de renchérir en ajoutant que «le processus n’a de sens que s’il est durable et associe l’ensemble des parties».
Comme qui dirait que la cérémonie du 15 Mai est dépourvue de tout effet quant à retourner à l’Etat malien sa souveraineté sur la totalité de son territoire, son droit d’y déployer l’administration.
Au demeurant, toute démarche allant dans ce sens est passible de sanctions auxquelles une allusion singulière a été faite tout au long de la cérémonie.
Il n’en fallait pas plus pour susciter le courroux d’IBK et réveiller les démons de l’hostilité ayant naguère caractérisé ses rapports avec la mission des Nations unis au Mali. Face à une opinion nationale majoritairement lasse de la question, le chef de l’Etat malien n’est pas versé dans la profanation de la Charte de l’Onu comme un certain Mouammar Kadhafi. Toutefois, ne s’est-il pas abstenu du plaisir de remettre en cause –devant ses illustres hôtes– l’impartialité et la bienveillance de la présence onusienne au Mali. «Il est temps que les malices cessent et que l’Onu soit d’égal partage», a–t-il martelé, en s’inscrivant en faux contre les allusions à une violation des engagements relatifs à la cessation des hostilités.
Au contraire, le Mali n’a jamais manqué à ses engagements et a plutôt «souffert du manque de sincérité de l’Onu», soutient IBK, en appelant l’Onu à faire preuve de justice et respecter notre pays.
Annoncée comme une fête de la paix et de la réconciliation nationale, la cérémonie de signature a ainsi tourné à la clarification et pourrait avoir marqué l’ouverture d’un autre front : celui du combat pour ramener la confiance entre le Mali et la communauté internationale. Ce n’est pas une première d’autant que les bisbilles et malentendus entre IBK et l’Onu remontent encore à l’époque de Bert Koenders, le tout premier représentant spécial du secrétaire général de l’Onu dans notre pays.
Néanmoins, il faut espérer que la différence de ton n’ait pas cette fois approfondi les divergences au détriment de l’essentiel.
AU RYTHME DU MALI
Aux vérités d’IBK, la réplique d’Hervé Lassous
Dans la salle de l’Union africaine de l’hôtel de l’Amitié, quartier général de la Minusma, une conférence de presse a systé- matiquement fait suite, avant-hier, à l’incident survenu lors de la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.
Hervé Ladsous, secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a tenu à faire une mise au point sur ce qu’il convient d’appeler «les vérités d’IBK».
C’est lui, Hervé Ladsous, qui avait à la veille provoqué l’ire du président malien, lors de la signature de l’Accord au Cicb, en présence des hautes autorités du continent et des institutions internationales impliquées dans la crise. Face à la presse, Samedi après-midi, le représentant de Ban Ki Moon a derechef insisté sur la teneur de la cérémonie de signature de l’Accord au Mali, en revenant notamment sur une nécessaire poursuite de la négociation avec les non signataires ainsi que sur l’inter- diction de toute intervention militaire au risque de tomber dans la violation de l’accord de cessation des hostilités.
Aux yeux du mes sager du secrétaire général de l’Onu, « les contributions de la MInusma n’ont pas été reconnues après pratiquement deux ans d’activités » marquées par l’organisation de l’élection présidentielle et des législatives en 2013, la contribution au retour de l’Etat et de l’administration dans le Nord-Mali ainsi que par les nombreux efforts consentis par la mission onusienne pour stabiliser le pays.
Au demeurant, indique M. Ladsous, même la cérémonie de signature de l’Accord de paix est en partie redevable aux efforts continus de la Minusma qui ne sauraient toutefois se substituer au Mali dans le règlement des problèmes internes.
Quid de la passivité de la Minuma et des soupçons qui pèsent sur l’impartialité de l’Onu. Le secrétaire général adjoint botte en touche. Il évoque une mauvaise compréhension de son mandat et a annoncé l’éventualité, en Juin prochain, d’étendre la mission à une brigade d’intervention.
Le numéro deux des Nations unies en a profité, par ailleurs, pour appeler le Mali à ne pas oublier le « prix humain » payé par les casques bleus ajoutant des statistiques à son argumentation : trente-cinq morts et 155 blessés au total, sans oublier que depuis le début de l’année, 78 attaques ont été effectuées contre les troupes onusienne.
source : Le temoin