La crise sanitaire a tout bouleversé dans le monde du sport, en général et celui du football en particulier. Elle peut ouvrir la voie à une prise de conscience générale et à l’avènement d’un modèle moins inégalitaire
Il y a quelques jours, le président de la Fédération malienne de football (Femafoot), Mamoutou Touré «Bavieux» confiait dans nos colonnes que l’instance dirigeante du football national veut «achever la saison» et n’envisage pas d’arrêter le championnat national et la coupe du Mali. Cette déclaration du premier responsable de la Femafoot faisait suite à un courrier adressé quelques jours plus tôt aux fédérations par la Confédération africaine de football (CAF). Dans cette correspondance, la CAF a demandé à toutes les fédérations de faire parvenir leur programme de reprise des compétitions, après la crise sanitaire. à l’évidence, l’instance dirigeante du football continental n’envisage pas une annulation de la saison et se prépare déjà à l’après-coronavirus. Mais combien de temps durera la pandémie du Covid-19 ? Deux, trois, quatre mois ? Personne ne peut le prédire pour la simple raison que l’homme est impuissant face à cette pandémie qui a déjà fait des ravages, notamment en termes de perte en vies humaines (plus de 260.000 morts au dernier comptage de nos confrères d’AFP).
L’humanité entière prie pour que le Covid-19 se termine le plus vite possible, mais nul le sait quand ou comment le monde sera débarrassé de la maladie. Dans ces conditions, est-il sage de faire des projections, alors que le virus continue à se propager, notamment dans les pays africains ?à notre avis la réponse est non parce que les préoccupations sanitaires du moment semblent autrement plus urgentes. Personne ne le souhaite, mais Imaginons que le coronavirus dure encore deux mois, que fera le monde du sport, notamment les fédérations qui écartent l’hypothèse de la saison blanche ? Il est clair que ces associations n’auront d’autre choix que de faire machine arrière. A n’en pas douter, l’après-coronavirus est plein d’incertitudes et l’histoire risque de donner raison aux pays ou fédérations qui, comme la Guinée, le Burkina Faso, le Niger, la France, les Pays-Bas, la Belgique ont décidé de faire une croix sur la saison. Dans le cas du Mali où la saison a démarré en retard et au sortir d’une longue crise qui a duré quatre ans, la Femafoot serait inspirée de trancher maintenant plutôt que d’attendre le dernier moment pour prendre une décision. En effet, il n’est point besoin d’être un cadre de sport ou spécialiste de foot pour savoir que l’après-coronavirus s’annonce difficile à gérer pour les associations à faible revenu comme la nôtre qui ne vivent que grâce aux mânes de la CAF et de la FIFA. Même sur le plan technique, il nous paraît difficile d’imaginer la Femafoot réussir à relever le défi d’achever le championnat national et la coupe du Mali.
-LA FIN DU FOOT BUSINESS ? Dans les pays développés, les ligues professionnelles et les clubs peuvent se relever de l’après-coronavirus grâce au rééquilibrage de leur masse salariale stratosphérique. Mais même là, les plus petits acteurs du football vont souffrir des conséquences du Covid-19. Autrement dit, la vie sera dure pour beaucoup d’entre eux. Au-delà des simples événements sportifs, de la vie des clubs ou de celle des fédérations, c’est tout un écosystème qui a été bousculé par la crise sanitaire, et notamment du côté des équipementiers. Et si pour une fois, une forme de solidarité sportive se mettait en place, avec l’idée d’une redistribution des revenus des plus riches vers les plus précaires ? Et si le Covid-19 donnait l’occasion au monde du sport en général et celui du football en particulier de mettre un terme à ce modèle économique où les clubs les plus puissants gagnent toujours plus, au détriment des plus petits ?
Et si la pandémie marquait la fin du sport business à outrance ? En Angleterre, la Ligue de football professionnel a déjà pris les devants, elle a débloqué 50 millions de livres (environ 37 milliards de Fcfa) pour aider les clubs en difficulté, avec des liquidités à court terme, afin de régler des problèmes urgents de trésorerie et payer les joueurs. Auparavant, c’est la FIFA, l’instance suprême du football mondial qui avait débloqué une enveloppe de 140 millions d’euros (environ 93 milliards de Fcfa) pour aider les fédérations à faire face aux conséquences économiques liées à la pandémie de coronavirus. Au total, 211 fédérations nationales affiliées à l’instance, dont la Femafoot bénéficieront de cette aide. « La pandémie a engendré des défis sans précédent pour l’ensemble de la communauté du football et, en tant qu’instance dirigeante du football mondial, la FIFA se doit d’être présente et de soutenir ceux qui se retrouvent dans le besoin. Cela commence par un soutien financier immédiat à nos associations membres, dont beaucoup sont en proie à de graves difficultés financières », a déclaré le président de la FIFA, Gianni Infantino. Espérons donc que cette crise sanitaire ouvrira la voie à une prise de conscience générale de la planète foot et à l’avènement d’un modèle moins inégalitaire.
Souleymane B. TOUNKARA
Source : L’ESSOR