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Attention à la banalisation de la fonction présidentielle et halte à la prolifération inutile des partis politiques au Mali!

Makan DIALLO Makan DIALLO

 

La communauté internationale amenée par la France a sommé le Mali d’organiser l’élection présidentielle pour dit-elle, le faire sortir de la grave crise qui a suivi la chute d’ATT et installer des institutions légitimes et démocratiques. La date du 28 juillet 2013 a été arrêtée pour le premier tour du scrutin. Ce qu’il faut retenir c’est que cette date a été imposée par la communauté internationale et les autorités Maliennes docilement l’ont acceptée même si en apparence on fait croire à une initiative Malienne dénuée de toute pression. Les propos de François HOLLANDE à ce sujet sont éloquents et ne souffrent l’ombre d’aucun doute.

Il est clair que le Mali doit organiser les élections libres et démocratiques pour se sortir de cette crise, la question n’est pas à ce niveau, mais Est ce que notre pays avait encore besoin d’une injonction aussi flagrante de la communauté internationale (énième humiliation) pour décider de ce qui relève indubitablement de ses prérogatives de souveraineté nationale surtout que le délai imparti pour une bonne organisation matérielle parait court ? Ne nous voilons pas la face, le Mali est sous tutelle de la communauté internationale depuis un moment déjà ! Il faut juste espérer que cette situation ne dure trop longtemps.

 La chute d’ATT a entrainé celle du Mali pas tant que le général Président a maudit le pays. Que nenni ! Mais tout simplement parce que les aventuriers écervelés qui ont osé ce coup de force, ont plongé le pays dans un précipite sans fin par leur inconscience et leur incapacité. Le pays s’est effondré en un laps de temps. Plus d’institutions, anarchie à tous les niveaux, insécurité, crise économique, guéguerre entre responsables politiques et militaires confondus, tueries entre frères d’armes, occupation des 2/3 du pays par des organisations criminelles etc. Pour un coup d’Etat, le bilan est lourd. Le Mali a failli disparaitre à jamais. Il faut le dire, le Mali a touché le fond et on se demande ce qui est arrivé au Mali, un pays pour autant paisible cité parmi les plus stables du continent. Le constat était là implacable, le pouvoir a failli, les dirigeants n’ont pas été à la hauteur face à certains évènements, résultat : retour à la case « coup d’Etat » vingt années après avec les conséquences que l’on sait. Le peuple Malien avait-il besoin de tout cela ?  Nos dirigeants doivent comprendre cette simple logique politique qui lie le POUVOIR à la RESPONSABILITE et la RESPONSABILITE à la SANCTION en cas de défaillance.

 Les coups d’Etat ne sont que malheureusement les conséquences désastreuses de leurs agissements.  Les fautes commises par ATT lui ont été fatales. Dans une vraie démocratie, la sanction provient des urnes (rejet populaire), en Afrique malheureusement les  coups d’Etat militaire sont légion.

Au Mali, le spectacle qui s’offre à nous en cette veille du scrutin présidentiel inquiète et fait croire que le Malien  n’a pas pu ou su tirer les enseignements nécessaires de la grave crise que traverse notre pays. Sinon comment comprendre cette ruée incroyable vers Koulouba, une première dans notre processus démocratique en attendant que la cour constitutionnelle fasse le ménage. Tout le monde pense qu’il peut être Président. Tout le monde pense que son tour est arrivé. Tout le monde pense que c’est maintenant ou jamais. A se demander finalement que la seule fonction qui vaille aujourd’hui c’est : PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE. Qu’on nous le dise enfin Pourquoi la fonction présidentielle attire tant ? Du prétendant inconnu du grand public aux éternels et infatigables candidats, en passant par des petits escrocs de circonstances et autres jeunots pressés de se faire valoir, le landerneau politique Malien grouille d’individus de tout acabit prêts à arpenter la colline du pouvoir.  Mais attention, n’est pas Président qui veut, et la fonction requiert beaucoup de qualités qui ne sont pas à la portée du premier venu.

Des candidatures légitimes et sérieuses il y en a certainement. Des candidats prêts et aptes pour le job il y en a sans doute, et c’est tant mieux ! L’envers du décor, c’est  malheureusement, cet engouement inédit de personnes souvent sans réelle envergure politique, aux compétences douteuses venues du néant.

 La fonction Présidentielle par son importance ne doit et ne saurait être banalisée. On ne devient pas Président de la République du jour au lendemain. C’est un travail de longue haleine, le combat souvent de toute une vie. Un Président a un parcours, un vécu. En général il ne sort pas du néant, et d’ailleurs très souvent, il est élu en fonction des actes qu’il a eu à poser auparavant. Certains candidats doivent comprendre que l’on ne saurait commencer une chose par la fin. Certes, il est audacieux de se présenter directement à la fonction présidentielle sans parcours connu, pour peut-être enrichir son CV comme on dit, mais force est de reconnaitre qu’il ne s’agit non plus de n’importe quel poste pour que l’on s’autorise à assouvir ses désirs ou à atteindre des desseins inavoués. Ce n’est pas le but du jeu et cette part de prestige, d’insigne honneur qui caractérise la fonction doit être sauvegardée.

 Voyons juste le parcours des Présidents élus à travers le Monde pour comprendre que l’accession à la magistrature suprême est souvent le couronnement de toute une vie faite d’actions publiques, l’aboutissement d’un long chemin souvent semé d’embuches.

Entendons-nous bien, il n’est pas interdit de se présenter pour être Président de la République, mais faudrait-il en être capable  (savoir-faire et savoir être). Est-ce le cas de tous les prétendants ? J’en doute fort, et c’est là que ça devient gênant et dommageable.

 A quelles fins certains candidats se présentent-ils ? Pour amuser la galerie ?  Pour se faire voir, et dire après J’ai été ? Jouent-ils les seconds couteaux à des fins d’alliance pour des candidats plus sérieux ? Lorgnent-ils autre chose sachant que le fauteuil Présidentiel est réservé à une seule personne ? Entre nous n’y a-t-il pas d’autres postes pour servir son pays et se faire valoir ? Faut-il absolument se présenter (d’abord) à l’élection Présidentielle pour  espérer être Ministre, conseiller, maire ou député après, si tel est l’objectif secret visé par  certains ?  

Une chose est sûre, avec tout ce qu’il a enduré ces derniers temps,  le peuple Malien ne veut plus être le mouton de panurge d’une quelconque intrigue politicienne. Le peuple veille au grain et une prise de conscience citoyenne émerge petit à petit au sein de la société civile.  L’homme politique, le dirigeant, le responsable doit être un méritant au service du Peuple, rien d’autre. Il est temps que certains principes, certaines valeurs et  vertus morales irriguent le marigot politique Malien pour que ce peuple meurtri, éternelle victime voit enfin le bout du tunnel.

Observons un tant soit peu l’incroyable nombre de formations politiques au Mali. La prolifération de partis politiques (plus de 100 partis politiques) frise le ridicule et donne à penser que le Malien use et abuse du concept de démocratie et du multipartisme. Nombrilisme, égoïsme et opportunisme expliquent certainement  cette propension à vouloir toujours être aux premières loges, à vouloir jouer les premiers rôles. Sinon le propre d’un parti politique, celui du collectif, du partage, de la solidarité, de l’idée d’équipe, de vision commune etc. s’accommode mal avec cet esprit solitaire et individualiste qui caractérise de plus en plus l’homme politique Malien. Au  rythme où vont les choses, il est à craindre que d’ici quelques temps, chaque Malien aura son propre parti! Cette conception patrimoniale ramenant le parti à sa « chose » à son « bien » et qui sous-tend ce besoin irrationnel de création à tout bout de champ doit laisser place à l’idée du collectif au service de la masse populaire. Avoir un parti politique au Mali aujourd’hui est synonyme de fonds de commerce et c’est à qui saura le faire fructifier « intelligemment » !

Le Mali n’a pas besoin de tous ces partis politiques, les Maliens n’ont pas besoin de toutes ces formations pour sa démocratie. Le nombre de partis politiques dans les vieilles démocraties notamment la France et les USA se compte sur le bout des doigts. Les grands regroupements sont privilégiés pour éviter un émiettement inutile, et le jeu politique n’en est que plus cohérent.

Au Mali, avons-nous autant d’orientations et d’idéologies politiques antithétiques, autant de solutions « miracles », autant de compétences antagonistes, autant de divergences politiques pour se trouver à créer quotidiennement ce que j’appelle des officines pour une ascension sûre et rapide au sein de l’appareil d’Etat? Une véritable escroquerie intellectuelle sur le dos du peuple !

 Les hommes politiques doivent comprendre que la prolifération de partis politiques est contre-productive et ne veut pas dire forcement vitalité de notre démocratie. Au contraire, elle dénote d’une inconsistance, d’une absence totale d’idéal commun et surtout d’une incapacité à se regrouper à s’accepter et à travailler ensemble. Toute chose contraire à l’idée de parti politique.

 Donnons-nous la main, acceptons de travailler ensemble. Notre multipartisme peu s’accommoder d’au plus cinq grands partis étant entendu que les idéologies politiques vont essentiellement du socialisme au libéralisme en passant par la social-démocratie et des  concepts politiques telle que l’écologie. Faisons la politique autrement, redessinons vertueusement notre sphère politique, et ensemble bâtissons le Mali de demain !

               

Makan DIALLO

Docteur en Droit Privé

Avocat au barreau de Paris

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