Amadou Toumani Touré, une semaine avant sa chute, avait rencontré les femmes révoltées de Kati. Bousculé, ATT a fourni des réponses pouvant constituer une ligne de défense face à la Haute Cour de Justice.
Procureur Général Imaginaire de la Haute Cour : Monsieur Touré, vous avez trahi le Mali en demandant à un capitaine de l’armée de céder face aux rebelles, nous avons enregistré l’entretien…
ATT : Messieurs de la Cour, on veut m’opposer au peuple malien. Un capitaine que je connais ni d’Adam ni d’Eve m’a appelé de Aguelhok. Mon aide de camp, Aliou l’a rappelé avec son téléphone et je lui ai dit « capitaine, serrez la ceinture, vous allez remporter cette guerre ». Je ne connais pas le capitaine. On dit que je lui ai demandé de se taire et s’il rentre, je le nommerai commandant, Soubhanalla, Lahillaha Ilalah Mouhamadou Rassoulillah. Les gens mentent sur moi. Depuis dix ans que je suis au pouvoir, chaque jour on raconte des choses sur moi, ATT a dit, ATT a fait. On dit en ville qu’ATT a appelée les rebelles pour leur dire que les militaires maliens n’ont plus de munitions. Walahi, ils ont menti sur moi. Comment pourrai-je dire de telles sottises, soyons sérieux ?
Procureur Général Imaginaire de la Haute Cour : Monsieur Touré, n’aviez – vous pas tout planifié pour déclencher cette instabilité au nord afin de vous maintenir au pouvoir encore ?
ATT : Je pense qu’il y a trois conflits : d’abord le Nord, puis le conflit à créer entre ATT et son peuple et enfin le conflit contre ATT. On dit que j’ai créé le conflit du nord pour me maintenir au pouvoir, qu’est-ce que je vais encore faire au pouvoir ? Quoi ? 10 ans de pouvoir, la fin arrive donc je dois partir. Si tu sais que tu n’es pas le seul fils de ce pays, tu dois partir et laisser à d’autres le soin de poursuivre le travail de construction en cours. Il y a des pays où le combat est de faire partir le Président, depuis longtemps je vous dis que je suis déjà parti, je ne suis pas le seul fils du Mali à pouvoir construire le pays… (Le procureur l’interrompt…)
Procureur Général Imaginaire de la Haute Cour : C’est pourquoi monsieur Touré, vous avez choisi un candidat préparé pour gagner les élections et ainsi protéger vos arrières !
ATT : On parle des élections, certaines candidatures sont déjà déclarées. En ville, on dit malheureusement que j’ai choisi un candidat. Je veux des élections apaisées pour que le Mali se construise. En janvier 1991, on a fait les élections pendant que le nord était en guerre donc cette élection se fera avec ou sans la guerre au nord. Si on me demande de choisir entre le Mali et le Pouvoir, je choisirai le Mali.
Procureur Général Imaginaire de la Haute Cour : Monsieur Touré, nous avons des preuves qui montrent que vous étiez plus un chef rebelle qu’un chef d’Etat.
ATT : Si on dit que je suis le chef des rebelles cela signifie qu’ils ont gagné la guerre puisque je suis le Président de la République. C’est même ridicule de penser que je suis le chef des rebelles tout en étant président de la république. J’avais entendu ces propos, je croyais que c’était une rumeur mais là c’est trop. Tout ce que l’homme fait sur terre sera jugé par Dieu et non par les hommes. Tout ce que je cherche, c’est de partir du pouvoir en paix et en tranquillité en laissant à la postérité un Mali uni et pacifié.
Procureur Général Imaginaire de la Haute Cour : Monsieur Touré, pourquoi vous donnez des ordres favorables aux rebelles, vous l’avez par exemple fait lorsque le colonel Gamou a voulu attaquer Iyad Ag Ghaly à Zakak ?
ATT : Je ne donne pas les ordres, j’ai nommé des hommes à des postes stratégiques. Il y a une chaîne de commandement et ces hommes responsabilisés s’occupent des ordres. Ils n’ont qu’à agir. Mon rôle est de chercher ce qu’il faut aux militaires maliens pour mener à bien leur mission. Que Dieu me garde d’être un chef rebelle. Je suis Président du Mali.
Procureur Général Imaginaire de la Haute Cour : Monsieur Touré, n’avez-vous laissé pas la situation pourrir et fragilisé nos militaires au profit des rebelles ?
ATT : Nous sommes infiltrés, il faut le reconnaitre. Vous me demandez de me lever, moi je ne suis pas assis. A mon arrivée au pouvoir, le Mali n’avait pas un seul hélicoptère donc aucune possibilité de couverture aérienne or toutes les guerres ont besoin de couverture aérienne. Si je soutenais les rebelles, je n’aurai pas sillonné le monde pour doter notre armée de MIG et d’hélicoptères. Je n’ai jamais hésité à renforcer l’armée malienne. Tout ce qu’on m’a demandé a été satisfait et nul n’ose dire le contraire à ce niveau. L’on me parle des décisions des présidents de certains pays, n’oubliez pas que j’ai été dans ces pays dont notamment le Rwanda, le Burundi et la Centrafrique où je suis resté deux ans pour gérer la guerre. Combattre les rebelles et faire une guerre conventionnée sont deux choses différentes.
Procureur Général Imaginaire de la Haute Cour : Monsieur Touré, nous aimerions bien vous croire et le peuple malien avec, mais il se raconte tellement de choses sur vous…
ATT : Je suis Président et on me salit tous les jours mais c’est le lot quotidien d’un Président de la république. Certains mentent sur moi dans l’espoir de gagner quelque chose si la situation dégénère. Je n’ai jamais donné un franc à un rebelle or mes Gouverneurs de région ont reçu de ma part des dizaines de millions. Je vous le redis, entre le Mali et le Pouvoir, je choisis le Mali, je suis un militaire du Mali et le militaire malien est un homme d’honneur.