Main tendue du Président au chef de file de l’opposition, possibilité d’un gouvernement d’union nationale, jeunes au cœur du nouveau mandat… Ambroise Dakouo, Président du directoire de l’Observatoire des organisations de la société civile pour la gouvernance, la paix et la sécurité, donne son point de vue.
Le Président IBK a insisté sur l’unité nationale et tendu la main à Soumaila Cissé. Peut-on y voir les prémices d’un gouvernement d’union nationale ?
Quand on analyse cette main tendue, il y a derrière l’idée d’un gouvernement d’union nationale. Ce serait la solution idoine pour faire baisser la température, car les positions sont cristallisées. Le Président de la République est dans son rôle, celui d’apaiser le climat. Mais la mise en place d’un gouvernement d’union nationale est-elle une solution durable et permettra-t-elle de résoudre une crise profonde ?
Cela serait-il une bonne réponse aux questions de fond qui se posent au Mali ?
Dans l’immédiat, oui. La priorité est de sortir de cette situation de tension. Le Président de la République, en composant un gouvernement d’union nationale, sera habile et renforcera sa légitimité. Il a été élu, il a donc la légalité pour lui, mais il doit tenir compte du fort taux d’abstention et des contestations du principal candidat de l’opposition et de plusieurs autres. S’il arrive à former un gouvernement avec ces leaders ou leurs représentants, il aura la légitimité de dire : je suis le Président, le garant de l’unité nationale. Cela permettra aussi d’aller à une conférence nationale souveraine ou à des assises nationales pour rediscuter des fondamentaux et des réformes. Un gouvernement d’union nationale devrait permettre de s’attaquer aux causes de la crise, qui sont d’abord politiques. Il y a également une crise des institutions en charge des élections et une crise de la gouvernance. Les gens ne sont pas allés voter principalement parce qu’ils en ont marre de la mauvaise gouvernance et qu’ils ne veulent pas continuer à cautionner les élites au pouvoir. Si une conférence d’entente nationale apporte des réponses durables aux problèmes, tant mieux, mais si c’est juste pour contenter les uns et les autres, comme cela a été le cas par le passé, ce sera contre-productif.
Le Président a affirmé qu’il mettrait les jeunes au cœur de son nouveau mandat. Concrètement, comment ?
C’est joli à entendre, mais il faut que cela se traduise en actions. Pour mettre les jeunes au cœur du mandat, trois facteurs sont primordiaux. D’abord la création d’emplois, avec les conditions nécessaires pour que les jeunes puissent s’épanouir ici et, par voie de conséquence, limiter les migrations. Ensuite, le système éducatif doit être performant, avec des formations de qualité. Enfin, il faut agir au plan politique et travailler pour qu’aux prochaines élections il y ait un renouvellement de l’élite politique, pour que les gouvernants, à l’Assemblée nationale ou dans les institutions constitutionnelles, soient issus de la classe jeune. Il ne faut pas juste procéder à quelques nominations, il faut des réformes profondes. Cette critique est récurrente car depuis 1991 c’est la même génération qui gouverne. Il lui faut céder la place à une nouvelle.
Journal du mali