Le géant chinois du commerce électronique Alibaba a lancé vendredi une colossale opération boursière à Hong Kong, où il espère lever plus de 12 milliards d’euros, au moment où l’ex-colonie britannique s’enfonce dans la violence politique.
Le groupe fondé par l’excentrique milliardaire Jack Ma, qui avait écrit l’Histoire en 2014 en réussissant la plus grosse introduction en Bourse de tous les temps à Wall Street, a choisi la place chinoise pour récupérer des fonds qui doivent l’aider dans son développement mondial.
« Pour une jeune entreprise qui n’a que 20 ans, c’est un nouveau départ », a assuré le PDG du groupe, Daniel Zhang, dans une lettre aux investisseurs. Il a aussi tenu à adresser un signe de confiance à Hong Kong, après cinq mois de manifestations de plus en plus violentes contre l’emprise jugée croissante du régime communiste sur le territoire autonome.
« En cette période de changements, nous continuons à croire que l’avenir de Hong Kong reste resplendissant. Nous espérons contribuer, à notre manière, à l’avenir de Hong Kong », a-t-il déclaré.
– Plus près de Pékin –
Alibaba avait écarté « avec regret » une cotation à Hong Kong lorsqu’il avait choisi New York en 2014, a rappelé M. Zhang. Alibaba avait alors récolté 25 milliards de dollars — un record mondial absolu pour une introduction en Bourse.
Cette fois, Alibaba offre jusqu’à 575 millions d’actions aux investisseurs au prix unitaire maximum de 188 dollars de Hong Kong, soit un total de 13,8 milliards de dollars US ou 12,5 milliards d’euros.
Ce montant est inférieur aux dernières estimations: le quotidien de Hong Kong South China Morning Post, qui appartient à Alibaba, annonçait mercredi que le groupe prévoyait de lever jusqu’à 15 mds de dollars US, ce qui en aurait fait la plus grosse introduction en Bourse dans l’ex-colonie britannique depuis 2010.
Des médias évoquaient même fin mai la somme de 20 milliards de dollars US, mais les troubles politiques qui ont débuté juste après ont pu dissuader le groupe chinois de risquer une opération surdimensionnée.
Les dirigeants chinois cherchent à encourager les géants de la tech à être cotés plus près de Pékin, après la perte d’Alibaba, mais aussi du géant de l’internet Baidu, au profit de Wall Street.
La Bourse de Hong Kong a modifié ses règles ces dernières années afin d’autoriser une entreprise à être cotée sur deux places différentes.
La cheffe de l’exécutif hongkongais, Carrie Lam, a également incité le fondateur d’Alibaba à vendre des actions à Hong Kong.
– 2 mds de consommateurs en 2036 –
Le mastodonte fondé en 1999 a profité à plein du phénoménal appétit des consommateurs pour le commerce en ligne — un sport national en Chine — et est devenu l’une des entreprises à la plus forte capitalisation boursière au monde.
Ses différentes plateformes de commerce en ligne réunissent en Chine même 785 millions d’utilisateurs mensuels sur téléphone portable.
A l’horizon de cinq ans, le groupe ambitionne de compter en Chine un milliard de consommateurs (sur une population totale de 1,4 milliard d’habitants). En 2036, l’objectif est de totaliser 2 milliards de consommateurs au plan mondial. « Alors que le monde se transforme en une économie numérique (…) la mondialisation est l’avenir du groupe Alibaba », a souligné Daniel Zhang dans sa lettre aux investisseurs.
Alibaba a attendu lundi sa traditionnelle « Fête des célibataires », la plus grosse journée mondiale de soldes, pour procéder à son introduction en Bourse: le géant, dont le siège se trouve à Hangzhou (est), a réalisé à cette occasion des ventes record de près de 35 milliards d’euros en 24 heures, soit un chiffre d’affaires en hausse de 26% sur l’an dernier.
Alors que Jack Ma, 55 ans, a pris sa retraite en septembre dernier, son groupe a plus que triplé son bénéfice net au dernier trimestre à 9,24 milliards d’euros, tandis que son chiffre d’affaires bondissait de 40% à 15,15 mds EUR.