Cette année, le gouvernement a revu à la hausse les objectifs de production agricole par rapport à ceux de la campagne écoulée. Mais toutes les conditions ne semblent réunies pour l’atteinte de ces objectifs.
Pour cette campagne agricole qui démarre, il est prévu 800 000 tonnes de coton graines contre 775000 tonnes en 2018 ; 11 millions de tonnes de céréales (toutes spéculations confondues) contre 10 millions de tonnes l’année dernière. Cette année, l’accent est mis sur la culture du maïs avec plus de 3,5 millions de tonnes attendues cette année.
Pour s’imprégner des réalités du terrain et recenser les difficultés des producteurs, le ministre de l’Agriculture Moulaye Ahmed Boubacar a effectué, la semaine dernière, une mission d’observation dans les filières sud de la CMDT. Le constat est on ne plus amer : la campagne agricole 2019- 2020 sur laquelle le gouvernement mise, démarre très mal. Outre l’installation tardive et la mauvaise répartition des pluies, le gouvernement ne semble pas réunir toutes les conditions pour l’atteinte des objectifs annoncés. A quelques semaines de la fin de l’ensemencement des champs, les producteurs attendent, toujours et désespérément, les engrais, les semences et les équipements agricoles subventionnés promis par le gouvernement. Partout, c’est le même refrain : insuffisance d’engrais, des semences et des équipements agricoles et surtout les tracteurs subventionnés devenus inaccessibles.
Du coup, les Maliens s’interrogent sur la destination des 15% du budget alloués chaque année au secteur de l’agriculture. Le dernier conseil supérieur a adopté le plan de campagne agricole 2019 estimé à 229 milliards FCFA. A en croire le ministre de l’Agriculture, plus de 20 milliards CFA sont destinés cette année pour les subventions des produits agricoles. Avec tant de budget pour l’Agriculture il est inadmissible que les producteurs manquent de l’essentiel pour cultiver.
Selon plusieurs sources, les problèmes d’accès des producteurs aux intrants agricoles subventionnés s’expliqueraient par le fait que de nombreux partenaires estiment que les subventions des produits sont mal gérées et ne sont plus prêts à accompagner le gouvernement dans ce sens.
Ces dernières années, force est de constater que les produits subventionnés ne sont pas accessibles aux producteurs auxquels ils sont destinés. Les bailleurs dénoncent le fait que ces produits soient souvent détournés et revendus sur le marché noir par des opérateurs véreux en complicité les autorités en charge de la gestion des intrants agricoles. Toutes choses qui prouvent à suffisance que le secteur agricole fait partie des secteurs les plus corrompus au Mali. Une corruption qui sape l’élan de productivité agricole. Il y a quelques jours le Directeur General de l’Office du Niger a indiqué, lors du lancement de la campagne agricole, qu’il sera difficile d’atteinte l’objectif de 900 000 tonnes de riz Pady prévues, a cause de l’insuffisance des équipements et engrais.
Rappelons que ces dernières années, les scandales financiers se suivent sans discontinuer dans le secteur agricole. Engrais frelatés par ci, détournement de fonds par là et attribution des marchés gré à gré partout.
Le dernier scandale en date, est celui qui concerne le patron de l’APCAM, Bakary Togola. Il est accusé par certains de ses collaborateurs de s’enrichir à coût de milliards sur le dos des paysans avec l’argent à eux destinés. Selon certaines sources, cette affaire est actuellement pendante devant la justice.
Face à la mauvaise gestion des subventions et les plaintes des bailleurs, le ministre de l’Agriculture, Moulaye Ahmed Boubacar n’a qu’un seul refrain sur ses lèvres : « les subventions ne seront plus gérées comme avant, rien ne sera plus comme avant ». Selon lui, les enquêtes sont en cours pour démasquer les responsables. Il s’agit malheureusement d’une chanson qui ne dit plus rien aux Maliens, de plus en plus, désespérés face à la corruption galopante.
Aboubacar Berthé
Source: Le Serment du Mali