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Accord Mali-UE de réadmission des Maliens en situation irrégulière : Les aveux déguisés du ministre Diop

Des partis politiques (SADI, FARE, ADEMA, CNAS…) demandent au gouvernement de s’expliquer sur le fameux accord Mali-UE de réadmission des Maliens en situation irrégulière. L’opposition parlementaire a déposé une motion de censure contre le gouvernement pour des motifs comprenant le même sujet. L’Assemblée nationale a convoqué une session spéciale sur la question. Tout cela serait-il anodin ? Le ministre des Affaires étrangères, M. Diop, multiplie les déclarations pour démentir tout accord dans ce sens. Pour tout dire, ce dossier est sûrement le plus brûlant de cette fin d’année. Non sans raison, quand on sait que l’apport des émigrés est plus important que l’aide au développement.

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Alors, accord ou pas accord ?

Pour le gouvernement, précisément pour le ministre Diop, il n’y a eu qu’un accord de principe, qui ouvre la voie aux futures négociations sur différents thèmes relatifs à la problématique de la migration, dont celui portant sur la « réadmission » des Maliens en situation irrégulière. Contrairement à ceux qui semblent prendre la « parole gouvernementale » pour parole d’Evangile, nous pensons qu’en l’état, il est peu probable que le ministre Diop arrive à convaincre grand monde. En effet, beaucoup de coïncidences et de faits militent en sa défaveur. Entre autres, l’information est venue de multiples sources dignes de foi, dont les protagonistes eux-mêmes, l’Union Européenne et certains de ses responsables dont le Néerlandais Berth Koenders. Comme on dit, « on ne peut pas être plus royaliste que le roi ». Et le « roi », c’est, en la matière, la seule UE, qui en tire profit.

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Il semble, par ailleurs, que le président sénégalais, Macky Sall, ait parlé de la signature du document par le gouvernement malien. Cela reste à prouver, mais ce dont on est sûr, c’est que Macky Sall a indiqué à la presse que cet accord n’était pas nouveau, et donc qu’il n’était que la continuité des Accords de Cotonou d’août 2013. Il a aussi qualifié la position européenne de « discriminatoire », dans la mesure où, d’une part, on ouvre les portes aux Syriens, et de l’autre, on les ferme aux Africains, qui, du reste, ne sont pas si nombreux qu’on semble le penser, a-t-il dit en substance.

Au-delà des coïncidences fâcheuses, les faits aussi sont contre Diop

Le ministre Diop a certainement du mal à convaincre parce qu’il y a un fâcheux précédent qui est encore dans les esprits. En effet, c’est le ministre Diop qui était monté au créneau pour essayer de faire « avaler » au peuple malien que le premier draft de l’Accord d’Alger « était globalement bon » pour le Mali. Il s’avérera plus tard que c’était le pire des accords. Nous savons aujourd’hui que l’Accord obtenu n’est pas bon pour le Mali, que dire alors de ce premier draft, ce premier projet d’accord ? Qu’on avait du reste tout fait pour cacher à l’opinion avant sa signature, que le gouvernement espérait au plus vite. Il aura fallu la ténacité de quelques journalistes et acteurs politiques pour qu’au moins une poignée d’observateurs avertis prennent connaissance du contenu de ce document abject, et alertent l’opinion. Par la suite, le gouvernement essayera de faire « contre mauvaise fortune, bon cœur », en envoyant quelques émissaires ici et là pour tenter d’expliquer l’inexplicable. Dans les pays véritablement démocratiques, le ministre Diop aurait démissionné. Nous sommes ici sous d’autres cieux, où seule compte la volonté de Koulouba, dont c’était apparemment le choix aussi. Mais cette seule volonté de Koulouba ne saurait faire récupérer au ministre le crédit qu’il a définitivement perdu aux yeux de l’opinion. C’est pourquoi le ministre Diop se trouve rattrapé par son passé de « ministre qu’on ne doit plus croire aveuglement ». Lequel ministre, comme une fuite en avant, « se demande s’il n’y a pas certaines personnes qui voudraient mettre le feu au Mali ».

Autre fait à valeur d’aveu: « La mission d’identification des Maliens en situation irrégulière » en Allemagne 

La seule reconnaissance par le ministre Diop d’une mission d’identification des Maliens en situation irrégulière en Allemagne, constitue en soi, un aveu quant à l’existence d’un accord entre le Mali et l’Union européenne, ou en tout cas entre le mali et l’Allemagne. En effet, la législation en matière d’émigration oblige ces pays à ce que les migrants en situation irrégulière qu’ils s’apprêtent à expulser soient d’abord identifiés par les autorités de leurs pays d’origine. C’est uniquement pour cette raison essentielle que l’UE veut obtenir un accord avec les pays africains. Aussi, à partir du moment où le ministre Diop admet avoir autorisé une mission d’identification en Allemagne, le débat est clos, puisque la finalité de l’accord, c’est bien cela, quand il s’agit en tout cas du volet « réadmission ». Les explications fournies aux députés sur cette mission en Allemagne ne tiennent pas du tout la route.

Cette identification ne pouvait s’opérer que sur la base d’un accord (formel ou tacite, c’est-à-dire non écrit) entre les parties.

La « gestion ATT » de la question

Tout le monde salue aujourd’hui le courage du président ATT de n’avoir pas cédé sur cette question, ni avec la France, ni dans le cadre de l’UE-ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique). Mais les choses n’étaient pas aussi claires qu’on pouvait le penser. En effet, outre la France, l’Espagne, qui venait d’ouvrir son ambassade à Bamako, avait souhaité le même type d’accord avec le Mali. Certains observateurs avaient soupçonné le gouvernement d’ATT d’avoir cédé, mais celui-ci avait démenti, avec un argument plutôt solide puisqu’il n’y avait matériellement aucun document qui pût prouver le contraire. Un document comme celui qui rend aujourd’hui le gouvernement d’IBK « suspect ». Nous n’en sommes pas spécialistes, mais certains vont jusqu’à dire qu’au bout de six mois, un « accord de principe » deviendrait un « accord en bonne et due forme ». Allez savoir !

Pour revenir à ATT, nous nous sommes rendu compte que, même si son gouvernement n’avait pas signé d’accord avec l’Espagne, des expulsions de Maliens d’Espagne avaient suivi quelque temps après. D’où question : Sur quelle base ont été faites ces expulsions, sachant que le Royaume d’Espagne ne peut rapatrier un migrant qui n’aura pas été formellement identifié par les autorités de son pays? Le gouvernement malien, sachant que la pilule d’un accord ne passerait jamais dans l’opinion, se serait-il mis d’accord tacitement avec le Royaume, dans le but d’aider ce pays à expulser nos compatriotes, mais sans tambour ni trompette?  Autant de questions qui restent encore sans réponses. Que l’on peut se poser encore aujourd’hui, au regard des discours contradictoires ou flous, tenus ici et là, par les différents protagonistes.

Peut-être devrions-nous finalement -mais pour l’instant-  résumer la question par cette analyse de Baba Dakono (juriste-chercheur, brillant dans ses interventions au Débat du dimanche dernier sur Africable) : « Est-ce que c’est un Accord ? -Non ; est-ce que c’est de nul effet ? -Non. » Au final, il n’y a qu’un écran de fumée. Qui asphyxie le peuple, mais semble mieux convenir dans la préservation des intérêts des deux protagonistes.

Sory Haidara

Source : Le Point

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