Sida, cholera, Ebola, paludisme, fièvre jaune et maintenant Covid-19, notre planète n’a pas fini avec les pandémies et les épidémies. Au Mali depuis mars 2020, la Covid-19 a affecté tous les pans de l’activité socioéconomique. Tous sont affectés, cependant pas, au même degré, y compris au niveau de l’éducation des enfants. Au mois de janvier dernier, les élèves ont repris le chemin de l’école avec des instructions fermes de l’Etat quant au respect des mesures barrières. Les écoles ont-ils les moyens de mettre en place ces mesures et de les faire respecter ?
L’éducation est un droit constitutionnel, de même que la sécurité des apprenants. Le Fonds des Nations unies pour l’enfance, l’Unicef, pense que chaque enfant, « quel qu’il soit, quel que soit l’endroit où il se trouve, a droit à l’éducation ». « L’éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et au renforcement du respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales », selon la déclaration universelle des droits de l’Homme.
L’article 26 de cette déclaration universelle dit que « toute personne a droit à l’éducation. L’éducation doit être gratuite, au moins en ce qui concerne l’enseignement élémentaire et fondamental. L’enseignement élémentaire est obligatoire ».
Les enfants sont favorisés ou marginalisés, selon les moyens de leurs parents et ne bénéficient pas de la même qualité d’éducation. La Covid-19 a révélé au grand jour les inégalités entre les enfants, selon les établissements scolaires qu’ils fréquentent.
Selon Attaher, élève à l’école privée catholique Saint-Kizito, un établissement de moyen standing, les formats du cours n’ont pas changé encore moins la disposition des salles ou des tables bancs. « Mais nous sommes obligés de porter nos masques pour avoir accès à la cour de l’école et à l’entrée nous appliquons le gel ou lavons nos mains avec du savon disponible à la porte ».
C’est tout le contraire pour Oumou Douma, élève à l’école fondamentale de Taliko, un établissement public, dans un quartier populaire. « Depuis la reprise, les cours continuent d’être dispensés comme auparavant. Aucun changement, aucune mesure édictée par l’État n’est respectée : ni la distanciation sociale, ni le kit de lavage de mains, ni le port du masque. Nous sommes 3 par table-bancs. Moi, personnellement, je mets souvent le masque ».
Fatoumata Sylla, commerçante, pour sa part, pense que les écoles font de leur mieux. « Elles ont repris en retard, accélèrent pour essayer de combler leur retard. Mais les conditions restent les mêmes : l’effectif, l’aménagement de la classe ou l’agencement des table-bancs restent comme avant. Elles n’ont pas fait d’efforts à ce niveau ».
Ibrahim Ag Hamadalamine, membre d’un comité de gestion scolaire a procédé à une sensibilisation des parents pour inviter les enfants au respect des mesures barrières, au lavage des mains au savon et au port de masque.
« J’ai mis des kits de lavage des mains dans ma cour, chaque personne qui rentre se lave les mains et met le gel. Le port du masque est obligatoire par les administrateurs, les professeurs, les élèves, ainsi que les visiteurs. Nos cours sont dispensées en toute sécurité car on respecte les mesures-barrières d’un mètre afin de nous protéger de la Covid-19 », explique Mme Macalou Djénéba Doumbia, proviseur du Lycée Banassou de Lafiabougou (LBNL), un établissement privé.
Pendant que certaines écoles respectent les mesures et font même des cours en ligne, l’école fondamentale de Missira, établissement public, ne dispose d’aucun moyen pour assurer le minimum afin de protéger les enfants. Faboly Diarra, directeur, avoue que les effectifs sont pléthoriques dans les classes. « Le gouvernement n’a pris aucune mesure pour cela. Les cours sont dispensés comme d’habitude, pas de changement d’horaire car nous venons tous les jours à l’école du lundi au vendredi. Les élèves n’ont plus de masques, ni de savon et de gel dans les classes ».
Zoom, Skype, Google-meeting
Rahoul Wazou Mounkoro, éducateur expérimenté dans le programme du baccalauréat international directeur des études Enco-Bamako-campus, un établissement huppé et de réputation mondiale, qui fait partie d’un réseau d’écoles internationales avec 14 écoles dans toute l’Afrique, a pris les devants pour mieux préparer le terrain en prenant toutes les dispositions possibles afin que ses élèves continuent leurs programmes dans les meilleures des conditions. « Bien avant que le Mali n’enregistre son premier cas, toute la logistique pouvant nous permettre de basculer entièrement en cours en ligne a été prise en compte car les élèves et les enseignants ont été formés aux nouveaux outils de travail mais aussi et surtout des informations sur la pandémie ont été données. Nous avons basculé à 100 % sur des cours en ligne avec des classes de zooms et Google classic pour les supports, les devoirs, un espace que Google offre aux élèves et enseignants pour pouvoir interagir, télécharger des cours et assigner des devoirs et les corriger jusqu’à ce jour ».
« Un spot a été conçu pour l’information et la sensibilisation des acteurs et partenaires de l’école. Il est diffusé sur les ondes de la TV nationale et de certaines télévisions privées. Les écoles sont dotées de kits de lavage des mains, de gel hydro-alcoolique et de savon. En ce qui concerne les élèves, les enseignants et l’administration scolaire sont dotés de masques», a-t-il ajouté.
C’est le 1er décembre 2019 que l’organisation mondiale de la santé, OMS a enregistré le premier cas de Covid-19. Le 11 mars 2020, l’épidémie à Coronavirus est déclarée pandémie.
Jusqu’en mars, le Mali figurait parmi les pays observateurs de l’évolution du virus et du ravage qu’il a fait à travers le monde. Le Mali a enregistré son premier cas le 24 mars 2020 et son premier décès le 29 mars 2020.
A ce jour, le Mali compte, selon la coordination nationale Covid-19, une situation cumulée de 10 841 cas positifs, 332 décès dans les centres de prise en charge.
Dès que le Mali a enregistré son premier cas, le ministère de l’Education a fait un communiqué annonçant la fermeture immédiate des classes et mettant en vacances les élèves pendant plusieurs mois. Pendant ces vacances prolongées et non prévues, le gouvernement, les écoles privées et les parents d’élèves, se sont organisé, chacun de son côté, pour assurer des cours aux enfants, avec plus ou moins de bonne fortune, selon le milieu, les moyens.
Depuis les confinements, des entreprises, à travers le monde, ont développé des moyens de dispenser des cours à distances. Parmi ces outils modernes, Zoom, ou Google meeting. Ces outils permettent aux enseignants de dispenser des cours. Il existe, selon Tidiani Togola, promoteur d’une société de développement du numérique, une dizaine de solutions de dispensation de cours à distance. Parmi les plus utilisés, justement, Zoom, Skype, Google-meeting.
Cependant, cela coute cher, à l’utilisation et grève considérablement les budgets des utilisateurs, demande aux établissements scolaires des installations particulières, onéreuses.
Le Gouvernement du Mali ne s’est pas compliqué la tâche. Ainsi, le gouvernement, avec des organisations non gouvernementales de soutien aux enfants et /ou à l’éducation, ont organisé des leçons à la télévision nationale et sur des radios privées, prioritairement pour les élèves des classes d’examens.
Le ministère de l’Enseignement normal MEN a instruit le respect strict des mesures barrières dans les établissements d’enseignement et les structures de gestion de l’éducation. « Nous disposons désormais d’un studio de production de ressources pédagogiques vidéo et audio », nous a affirmé Issoufi Dicko, directeur national adjoint de l’enseignement normal.
Aminata Agaly Yattara
« Cet article est publié avec le soutien de JDH – Journalistes pour les Droits Humains et Affaires mondiales Canada »
Source: Mali Tribune