L’émission grand jury de la chaine « Renouveau » n’a jamais aussi bien porté son nom qu’avec les déboires judiciaires dont sont sujets, en moins d’un mois, deux hautes personnalités qui avaient accepté la plus redoutable comparution télévisuelle.
En effet, après l’arrestation inopinée de l’ex Premier ministre Soumeilou Boubeye Maiga, le 26 aout 2021, suite à des propos ayant probablement traversé le Rubicon, tenus à l’émission grand jury, c’était au tour du président de l’Association malienne des procureurs et poursuivants (AMPP), en la personne de Cheikh Mohamed Cherif Koné, d’avoir des démêlées avec ses pairs de la magistrature mais également avec la juridiction dont il est le premier avocat général. Si Cherif Koné a «parlé sans gant» lors de sa comparution, le jeudi 2 septembre au Grand Jury, il n’a pas vu venir l’uppercut du conseil des ministres le mercredi 8 septembre 2021. Cet état de fait est le résultat de sa discordance avec la Cour suprême qui considère que c’est en violation de son obligation de réserve que l’avocat-général a exprimé son opposition aux mesures prises par elle. Elle en veut au magistrat de s’être illustré par des sorties médiatiques intempestives et virulentes, à travers des récriminations contre des procédures judiciaires pendantes devant la plus haute juridiction en matière de délinquance économique et financière. Cette attitude, jugée irresponsable et en porte-à-faux avec les principes de la magistrature par la cour suprême, a inspiré au bureau de cette juridiction une session extraordinaire, le 1er septembre 2021, à l’effet d’examiner le cas Cherif Koné et à l’issue de laquelle le ministre de la justice a été mis à contribution pour abrogation urgente du décret de nomination de Monsieur Cheikh Mohamed Cherif Koné.
C’est à la suite de cette demande que les dispositions du décret n°2021-0098 /PT-RM du 18 février 2021 portant nomination à la cour suprême ont été abrogées en ce qui concerne Monsieur Cheikh Mohamed Cherif Koné, en qualité de premier avocat général de la cour suprême.
Cependant l’intéressé, évincé de la Cour suprême, ne va peut-être pas se contenter de simples jérémiades et de lamentations sur son sort. Ipso facto, il semble avoir usé des recours légaux pour contrer ce qu’il considère comme injustice et abus. De toute façon, au Mali, avec la nouvelle trajectoire de la transition, on serait bien inspiré de nous tenir à l’écart des contentieux jurico-judiciaires qui risquent de persister en nous donnant des tournis.
Ousmane Tiemoko Diakité