Wendy Luhabe entre dans une pièce, et sa présence puissante, lumineuse s’impose d’emblée. Comment devient-on une figure africaine classée parmi les 100 personnalités les plus influentes du monde par le magazine « Time », quand on naît en Afrique du Sud, en 1957, en plein apartheid ? « Mes parents gagnaient leur vie misérablement, résume Wendy Luhabe.
Leur obsession : pouvoir inscrire leurs quatre enfants à l’école, payante pour les élèves noirs. Ma mère m’a toujours appris que tout était possible. » Première de sa famille à s’inscrire à l’université de Fort Hare, la jeune femme s’offre un billet d’avion pour l’Europe avec ses économies. « Je voulais traverser le monde, abolir les frontières. Très tôt, j’ai eu envie d’une existence sans barrières ».
Devenir soi
Suite à l’implosion du système éducatif de son pays, en 1976, Wendy est envoyée à l’université du Lesotho. « Pour la première fois, j’ai eu le choix des matières à étudier. Et osé me demander : que veux-tu faire de ta vie ? Cette question ne m’a plus quittée », sourit-elle.
Après un diplôme de commerce, elle entame une carrière de dix ans dans le marketing, au sein de Vanda Cosmetics en Afrique du Sud, puis chez BMW aux États-Unis. « J’ai eu la chance de rencontrer des femmes plus âgées qui m’ont coachée, m’ont appris à demander de l’argent. Je n’avais qu’une envie : évoluer. »
L’entrepreneuriat social
Aider les autres
C’est vite devenu insuffisant. « Pour grandir, avoir une influence sur l’économie de mon pays et lui être utile, il fallait créer ma propre structure. » Elle se lance à 34 ans dans l’entrepreneuriat social, d’abord avec un cabinet de formation destiné à aider les salariés noirs à mieux intégrer les entreprises. Puis elle crée un fonds d’investissement faisant appel à des capitaux féminins, et le Women Private Equity Fund destiné à soutenir des projets initiés par des femmes. « En 1993, quand il a fallu repenser le rôle des communautés noires, les femmes avaient été écartées. Leur apprendre à maîtriser l’argent, c’était leur donner les clés du pouvoir. »
Femme d’influence
Depuis six ans, elle préside le jury de sélection pour l’Afrique subsaharienne des Cartier Initiative Awards, qui soutiennent l’entrepreneuriat féminin dans le monde.
En 2011, Wendy Luhabe est invitée par Hillary Clinton à rejoindre l’International Council on Women’s Business Leadership avec les plus grandes femmes leaders de la planète. Son credo : « Gravir les échelons en entreprise demande trop de sacrifices. Pour créer de la croissance et continuer d’élever ses enfants, il faut devenir son propre patron. »