Notre source est formelle : à l’appel des organisations et des associations de la société civile, de milliers de maliens s’apprêtent à battre le macadam pour dénoncer globalement les lenteurs dans les procédures judiciaires du dossier de l’ex-junte de Kati et des affaires de corruption remises au procureur général, malgré les moyens mis à la disposition de la Justice pour vider les nombreux dossiers qui dorment depuis plusieurs années, pour certains d’entre eux.
Comme les organisateurs de cette manifestation le rappellent, une bonne partie des Maliens estiment que près de cinq ans après l’arrivée d’IBK aux affaires, les résultats atteints semblent s’éloigner de plus en plus de l’immense espoir et des attentes placées dans le pays après la crise de 2012 . Le sentiment général qui se dégage est que le Mali post-2012 ne se porte pas économiquement mieux, certains allant jusqu’à dire que le principal défi du régime en place ne semble même plus être celui de faire disparaître la pauvreté, mais plutôt de tenter de stopper la paupérisation croissante des populations. Si pendant ce temps, certains barons du pouvoir ou leurs proches sont suspectés de se goberger au caviar et au champagne, on peut comprendre la lourdeur des charges et le ton particulièrement acerbe des Organisation de la société civile (OSC). Mais le plus grave, pour ne pas dire le plus inacceptable dans tout ça, c’est la non-élucidation des surfacturations dans l’achat de l’avion présidentiel et du marché d’équipements militaires, auxquels s’ajoute, le dossier Sanogo, alors que promesse avait été faite au peuple malien par IBK que tous les dossiers sales de la République seraient jugés dans les plus brefs délais et les torts réparés. Malheureusement, presque cinq ans après l’arrivée d’IBK au pouvoir, aucun des dossiers emblématiques n’est encore passé à la barre, et c’est ce qui explique en partie le désenchantement général et la colère de plus en plus grande de ceux qui ont poussé les dignitaires du régime ATT vers la sortie.
Le président IBK devra en tenir compte
Certes, l’essentiel des dossiers de corruption qui ont défrayé la chronique sont tous aujourd’hui remis à la justice, le dossier relatif à l’ex junte de militaire de Kati étant même en phase de renvoie du procès, mais on est littéralement pris de stupéfaction quand on constate le silence radio, pour ne pas dire coupable des autorités politiques et judiciaires actuelles de notre pays sur les affaires de corruption et de détournement de fonds dont on parle depuis l’arrivée du régime IBK au pouvoir en 2013, mais dont les présumés auteurs n’ont jamais fait l’objet de la moindre audition. Alors, « Justice où es-tu ? » est-on tenté de s’interroger. L’indépendance du troisième pouvoir ayant été actée, on s’attendait à beaucoup plus de diligence dans l’instruction des dossiers ultra-sensibles comme ceux de la surfacturation dans l’achat du jet présidentiel, du marché d’équipements militaires et de la disparition du journaliste Birama Touré.
On n’oublie pas évidemment le comportement capitalistique de certains de nos dirigeants qui ont fait main basse sur nos maigres ressources à des fins personnelles ou familiales et qui, en guise de sanction, ont été simplement enlevés de leurs postes et des regards des citoyens, puis placés à d’autres fonctions autant ou plus juteux quelque temps après. Certes, le temps de la justice n’est pas celui des hommes, mais la « lifofilie » (last in, first out) dans nos palais de justice qui consiste à entasser les dossiers puis à commencer l’instruction par le plus récent, est telle que le citoyen lambda se pose aujourd’hui bien des questions. On aurait sans doute pu faire les choses autrement de sorte à aller vite à la réconciliation nationale, tout comme on aurait pu stopper ou à tout le moins ralentir l’inexorable baisse du niveau de vie des Maliens en rapatriant les milliards de FCFA indûment amassés et placés dans des paradis fiscaux, pour aider à créer des emplois et à satisfaire les besoins existentiels de nos compatriotes. C’est donc pour toutes ces raisons que les Organisations et associations de la société civile et apparentés, jurent de donner de la voix dans les jours à venir, pour dire au pouvoir en place de ne pas se montrer amnésique car, en politique aussi, pardon, en politique surtout, « les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets ». Pour un coup de semonce, en tout cas, c’en est un, et le président IBK qui, sauf extraordinaire retournement de situation, sera dans les starting-blockspour la présidentielle de 2018, devra en tenir compte s’il ne veut pas donner à son opposition, une kyrielle d’éléments à charge qui pourraient faire mouche au sein de l’électorat, notamment le plus clairvoyant et avisé. C’est également l’occasion pour tous les dignitaires actuels dont on dit que certains ne sortiraient pas indemnes en cas de jugement du dossier Sanogo et du marché de l’avion présidentiel et d’équipements militaires parce qu’ayant trempé leur barbichette dans la soupe fétide de l’enrichissement illicite, des passe-droits et des retours d’ascenseur, de prouver que tout cela procède de l’affabulation et de grossiers mensonges de certains « petits mangeurs de haricot » revanchards et nostalgiques d’une époque révolue.
Arouna Traoré
Le Pays