Désigné comme un des prétendants au podium de la Tropicale Amissa Bongo, l’Algérien Youcef Reguigui a pourtant très mal débuté sa course. La faute à des maux d’estomac. Désormais, le voilà dernier du classement à plus de vingt minutes. Mais il ne faut pas s’arrêter à ce mauvais résultat. Reguigui, pétri de talent, est le seul coureur professionnel algérien actuellement en activité. Ils n’ont été que trois dans l’histoire de ce pays.
Avec notre envoyé spécial au Gabon, Farid Achache
Fatigué mais pas abattu. Après une journée de galère lors de la première étape de la Tropicale entre Bitam et Eboeowa au Cameroun, lundi 13 janvier, Youcef Reguigui nous reçoit dans sa chambre. La main posée sur le ventre pour atténuer les douleurs, le seul coureur algérien professionnel était venu avec d’autres ambitions pour sa première Tropicale Amissa Bongo. « Aujourd’hui c’était spécial, c’est l’estomac », dit-il en souriant. Alors que le soleil se couche sur Bitam, allongé sur son lit, Reguigui a quand même tenu à nous ouvrir sa porte.
« Je l’admirais »
Youcef Reguigui fait partie des meilleurs coureurs africains du moment. Au même titre que les Erythréens Daniel Teklehaimanot et Natnael Berhane ou encore le Tunisien Rafaâ Chtioui, tous issus du Centre mondial du cyclisme à Aigle, en Suisse.
« Presque tous les professionnels nés en Afrique sont passés par là », commente-t-il. Comme Christopher Froome, le vainqueur du Tour de France 2013. Surtout, Reguigui marche sur les traces de son père, ancien champion d’Afrique en 1988 et vainqueur du Tour d’Algérie en 1987. Les deux hommes sont très proches. « Il me donne toujours des conseils », avoue-t-il en souriant. Et pour cause,Youcef est le seul garçon de la famille, et ses deux soeurs dit-il, ne sont pas vraiment préoccupées par sa passion.
« J’ai commencé le vélo à six ans pour faire comme lui car je l’admirais. J’ai toujours voulu passer professionnel et laisser le nom de Reguigui dans le livre de l’histoire du cyclisme algérien », lance-t-il d’un air malicieux. « En 2012, mon entraîneur qui était en Afrique du Sud m’a dit que MTN [NDLR: MTN-Qhubeka est la seule équipe cycliste professionnelle sud-africaine] voulait me faire passer professionnel. J’ai sauté sur l’occasion ».
Ils sont peu de cyclistes algériens à être passés dans les rangs professionnels. Youcef Reguigui est le troisième, pratiquement cinquante ans après ses glorieux aînés.
Fini les années sombres pour l’Algérie
« Il faut travailler dur et faire beaucoup de sacrifices », raconte-t-il. Surtout, Reguigui voudrait que d’autres le suivent. « L’Algérie a vécu des heures sombres dans les années 1980 et aujourd’hui le sport progresse », tient-il a préciser.
A l’image de tous les coureurs africains, Youcef Reguigui rêve de grandes épreuves comme Paris-Nice, Milan San-Remo et bien entendu le Tour de France. Si la qualification de l’Algérie pour le Mondial au Brésil a déclenché beaucoup de passion, le natif de Blida pense qu’au-delà du football, le sport algérien existe. Il n’attend plus de reconnaissance des autorités et trouve quand même « que ça va mieux ».
Si le cyclisme se développe au Maghreb, Youcef Reguigui se dit « fier d’être Africain ». A 24 ans, il est persuadé que dans les prochaines années, son continent sera de plus en plus présent sur la scène mondiale. « Nous avons besoin de continuer à progresser et c’est bien qu’il y ait des coureurs européens dans l’équipe MTN », admet le jeune sportif.
Après le Gabon et peut-être une victoire d’étape, Youcef Reguigui ira rouler sur le sol malaisien (Tour de Langkawi) avant de venir en France. S’il a remporté entre autres le Tour d’Azerbaïdjan, il voudrait désormais passer à la vitesse supérieure. Pourvu que son ventre ne lui mette plus des bâtons dans les roues.
rfi