Les autorités militaires au pouvoir dans ces trois pays, en brouille diplomatique avec la CEDEAO, en général et avec le Président Alassane Ouattara en particulier, ont réservé un accueil digne d’une grande personnalité à l’ancien Président de l’Assemblée Nationale Ivoirienne Guillaume Soro.
Cet acte rappelle fort opportunément à un vieil adage africain selon lequel l’ennemi de mon ennemi devient mon ami. En déroulant le tapis rouge à l’opposant d’Alassane Ouattara, à savoir l’ancien premier ministre et ancien Président de l’Assemblée Nationale, les autorités du Mali, du Niger et du Burkina Faso n’ont-elles pas voulu se venger ou tout au moins vexer celui qu’elles considèrent comme étant leur irréductible ennemi, à savoir le Président Ivoirien ? En accueillant Soro Guillaume à bras ouvert les autorités de la transition de ces trois pays n’auront-elles pas en rajouté à la crise diplomatique avec la Côte d’Ivoire ? Ne devraient-elles pas chercher à améliorer leurs relations diplomatiques avec ADO sachant bien que la Côte d’ivoire est l’une des destinations importantes pour ces trois pays ? Que dire des relations économiques et commerciales avec ce pays considéré comme le poumon de l’économie de l’UEMOA?
Guillaume Soro désormais citoyen d’honneur au Mali est devenu un trophée de guerre des autorités des trois pays en rupture de ban avec l’organisation sous régionale. Le Colonel Assimi Goita du Mali, le Général Abdramane Tiani du Niger et le Capitaine Ibrahim Traoré du Burkina Faso auraient dû analyser tous les contours des relations qui unissent leurs pays à la Côte d’Ivoire avant d’accueillir triomphalement l’Opposant d’Alassane Ouattara. Ils auraient dû mettre les intérêts de leurs pays avant de poser l’acte qu’ils ont posé pour contrarier davantage le Président ivoirien. Accueillir Guillaume Soro n’avait d’autre but que de provoquer, voire irriter Alassane Ouattara qui ne semble pas être en bonne odeur de sainteté avec les autorités du Mali, du Niger et du Burkina Faso. Ne se sont-elles pas trompées d’adversaire ? Si tant est que les autorités de ces pays ont juste tenu compte des intérêts de leurs peuples respectifs, elles allaient réfléchir mille fois avant de poser cet acte diplomatiquement maladroit et qui ne fera qu’empoisonner davantage les relations déjà très tendues entre ces trois pays et la Côte d’Ivoire. Tous ces trois pays ont des intérêts socioéconomiques importants avec la Côte d’Ivoire. En effet, faudrait-il sacrifier ces rapports sur l’autel des ambitions politiques des autorités actuelles de ces trois pays ? Les autorités devraient plutôt avoir le flair, non pas de ne pas recevoir sur leur sol l’ancien PM ivoirien, mais de ne pas dérouler le tapis rouge devant lui pour ne pas crisper davantage les relations très tendues entre la Côte et ces trois pays.
La bonne question que tout bon esprit doit se poser est celle de savoir en quoi dérouler le tapis rouge devant Guillaume Soro peut-il permettre à ces trois pays de trouver des solutions à leurs multiples crises. Bien au contraire il ne fera qu’envenimer les relations tant avec ADO qu’avec les autres pays de la CEDCEAO, qui au-delà des relations diplomatiques ont des intérêts économiques voire sociaux communs. Cette attitude que l’on peut qualifier de belliqueuse, des autorités des trois pays gouvernés par les militaires isolerait non seulement ces pays du sahel, mais aussi réduirait toutes chances de médiation avec les organisations sous régionales, surtout quand on sait que le Président de la Côte a une aura certaine et un poids à ne pas minimiser au sein de toutes ces organisations, qu’elles soient politique, CEDAO ou financière, UEMOA. N’a-t-on pas coûtume de dire qu’un pays n’a pas d’amis mais des intérêts ? Cette assertion semble être reléguée au second plan par les autorités du Mali, du Niger et du Burkina Faso qui agissent beaucoup plus par pulsions que par raison. Sinon elles ont plus à gagner en dissipant tout malentendu avec la Côte d’Ivoire que d’accueillir en grandes pompes Guillaume Soro.
En somme, les relations diplomatiques sont basées sur quatre principes, à savoir le principe de l’universalité de la communauté des Nations, le principe de la responsabilité collective des Etats pour le maintien de la paix et la prévention de l’agression, le principe de la coopération internationale pour l’avancement du progrès social et économique et enfin la place centrale des Nations Unies et son rôle dans les affaires internationales. Nos autorités feignent-elles d’oublier ceux-ci ?
Youssouf Sissoko
L’Alternance