Actuellement, des débats politiques importants ont lieu au Mali sur l’amélioration du cadre institutionnel et juridique pour l’introduction des langues nationales dans le système éducatif malien. La nouvelle constitution a procédé à une modification du statut des langues nationales en les élevant au rang de langues officielles et en déclassant le français comme langue de travail. C’est dans cet optique que l’Université des Lettres et des Sciences humaines de Bamako (ULSHB), à travers ses chercheurs, a initié depuis deux ans, un projet qui porte sur la transition de la langue d’enseignement dans le système éducatif appelé ’’LITES’’ en anglais.
Les résultats de cette étude ont été restitués hier mercredi par le groupe de chercheurs l’ULSHB à la faveur d’un atelier qui avait pour cadre le Mémorial Modibo KEITA. Cette cérémonie était présidée par le directeur national de l’Enseignement fondamental, Issoufi Albert TOURE ; qui avait à ses côtés le représentant de l’ULSHB, le Pr Idrissa Soïba TRAORÉ ; ainsi que le Dr André KONE et Mme Keita Fatoumata KEÏTA, tous membres du groupe des chercheurs.
Selon les initiateurs de cette rencontre, l’étude LITES (Language of Instruction Transitions in Education Systems) vise à combler le manque de connaissances sur la manière dont les systèmes éducatifs devraient efficacement ajouter ou faire passer l’enseignement d’une première langue (L1) à une deuxième langue (L2), en générant des preuves empiriques concernant les facteurs qui contribuent au succès des transitions de la langue d’enseignement pour l’alphabétisation des apprenants en deuxième langue.
Il ressort des différentes présentations que l’éducation bilingue est une priorité dans la politique éducative du Mali. C’est pourquoi, la présente étude a cherché à documenter les progrès réalisés en vue de la réalisation de l’éducation bilingue au Mali en termes de cadre politique et d’initiatives.
Le Pr Idrissa Soïba TRAORÉ a souligné que ce projet qui porte sur la transition de la langue d’enseignement dans le système éducatif, Lites en anglais, est dirigé par l’ULSHB à travers ses chercheurs.
Il ressort de son propos que le projet a pris deux ans pendant lesquels les chercheurs ont fait des investigations qui ont permis de voir comment les enseignants s’approprient de l’enseignement dans nos langues au niveau de certaines écoles bilingues à travers le pays.
«Nous avons vu les difficultés qui se posent à nos enseignants, nous avons vu aussi les meilleures pratiques. Par rapport à tout cela, nous avons proposé des solutions, des options qui peuvent être source d’une meilleure orientation dans le cadre de cette transition de langue dans notre système éducatif», a expliqué le Pr TRAORÉ.
Selon lui, l’introduction et la généralisation de l’enseignement de nos langues est un système qui veut qu’on parte vers un certain bilinguisme. Et à ce niveau, les défis restent nombreux, notamment le recrutement et la formation des enseignants en la matière.
«Tous les enseignants ne sont pas formés quand il s’agit de la transmission du savoir dans nos langues. Si nous voulons avancer, il est mieux que nous choisissons une de nos langues dans chaque contexte et permettre à l’enfant de se former et d’apprendre les autres langues étrangères comme l’anglais et le français», a dit le Pr Idrissa Soïba TRAORÉ.
De son côté, le DR Seydou LOUA a souligné qu’à travers cette rencontre, il s’agissait de partager avec les acteurs de l’éducation les résultats d’une étude LITES dans trois régions différentes, notamment Koulikoro(Banamba), Kayes et Gao.
Selon lui, l’étude a permis de recueillir le ressentiment des parents d’élèves sur la nouvelle vision ainsi que les efforts consentis par le gouvernement pour améliorer le cadre de l’enseignement de nos langues.
Pour une meilleure transition de la langue d’enseignement dans les systèmes éducatifs, le Dr Seydou LOUA appelle à la généralisation de l’enseignement dans nos langues dans les écoles publiques et privées.
«Il faut aussi procéder au recrutement et à la formation des enseignants qui éprouvent beaucoup de difficultés. En effet, il faut l’élaboration des outils pédagogiques adaptés à ce type d’enseignement », a-t-il préconisé.
A travers cette rencontre, l’équipe de chercheurs a partagé avec les participants la mesure dans laquelle la politique d’éducation bilingue a été conçue et mise en œuvre à l’échelle nationale et les facteurs qui ont facilité et entravé la mise en œuvre et le niveau d’adhésion à la politique d’éducation bilingue au Mali.
Cette activité est financée par le biais de la Déclaration annuelle du programme (APS) de l’USAID sur le leadership, l’innovation et l’échange dans l’enseignement supérieur (HELIX) dans le cadre de l’Initiative de nouveau partenariat de l’USAID (NPI).
Par Abdoulaye OUATTARA