Les trois syndicats de la Justice veulent désormais se donner la main pour imprimer une meilleure visibilité à leurs actions. Il s’agit du Syndicat libre de la magistrature (Sylima), du Syndicat autonome de la magistrature (Sam) et du Syndicat autonome des greffiers et secrétaires des greffes et parquets (Synag). Ces trois syndicats ont de concert animé une conférence de presse samedi dernier à la Maison de la presse. Au menu de la rencontre : le cahier de doléances des membres de la famille judiciaire.
La rencontre avec les journalistes fut également l’occasion pour ces syndicats de se pencher sur des questions relatives au bon fonctionnement de leur corps. Les débats ont été essentiellement animés par Djaliha Djomansy du Synag, Issa Traoré du Sam et Adama Yoro Sidibé du Sylima.
Ces responsables syndicaux ont décrit la situation qui prévaut actuellement au sein de la famille judiciaire après les mandats décernés à l’encontre de certains de leurs collègues (quatre magistrats, un greffier et un clerc d’huissier). A ce sujet les conférenciers ont signifié leur « total désaccord » et « leur incompréhension » tout en dénonçant une violation des textes et lois en vigueur en la matière.
Ils estiment qu’en se référant à une « lecture du droit » et au vu des articles 112 et 123 du CPP (Code de procédure pénal), les mandats en question décernés à l’encontre de leurs collègues ne s’imposaient pas. En outre, les responsables syndicaux s’insurgent contre ce qu’ils qualifient de « non respect par le Garde des sceaux de la présomption d’innocence ». « Nous invitons le Garde des sceaux à respecter la présomption d’innocence dont doit bénéficier nos camarades », ont-ils demandé.
Les syndicats n’ont pas non plus apprécié certaines sorties médiatiques du ministre de la Justice et certains de ses propos. Ils ont tenu à le faire savoir. De leur point de vue, certaines de ces interventions médiatiques affectent sérieusement l’image de la justice malienne surtout à l’échelle internationale. « Nous dénonçons le discours va-t-en-guerre du Garde des sceaux qui desservent le corps et affectent son image aussi bien au Mali qu’à l’extérieur du Mali », soutiennent ainsi les syndicalistes. Toutefois, ont-ils précisé, ils adhèrent totalement à la politique actuelle des autorités, politique relative à la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption et la délinquance financière.
Djaliha Djomansy, Issa Traoré et Adama Yoro Sidibé ont aussi marqué leur désaccord vis-à-vis du report de la session de la Cour d’assises qui aurait dû en principe s’ouvrir le 24 février pour durer trois mois avec plus d’une centaine de dossiers au rôle. Ils croient savoir que c’est une raison « d’humeur personnelle » qui aurait motivé ce report et souhaitent des éclaircissements à ce sujet.
Auparavant, les conférenciers avaient fait le point de leur cahier de doléances qui se trouve sur la table du gouvernement depuis 2007, des doléances gelées pendant un bon moment compte tenu de la situation socio politique du pays. Les points de revendications se rapportent entre autres au plan de carrière, à la composition du costume d’audience des magistrats, aux modalités d’installation des chefs de juridiction et de parquet, aux modalités de mise en œuvre du régime de la sécurité sociale des magistrats, aux conditions de la mise d’office en congé d’expectative du magistrat ayant fait l’objet de la sanction disciplinaire. Il est aussi question de primes et d’indemnités à octroyer ou revaloriser.
Le Synag, le Sam et le Sylima. assurent qu’au-delà des magistrats, l’ensemble des justiciables pourrait tirer bénéfice de la satisfaction de ces revendications. « L’objectif est d’éviter au magistrat de devoir louvoyer entre deux récifs : manquer au plan professionnel à son sacerdoce en trichant ou en démissionnant de ses obligations familiales.. ». En résumé, les syndicalistes soutiennent la nécessité de satisfaire à leurs doléances par le fait qu’il faut « mettre le magistrat en situation d’accomplir efficacement son rôle d’arbitre, de gardien du temple ».
Les conférenciers ont aussi abordé la question de la relecture des textes se rapportant à leur corps. A ce propos, ils estiment que l’Etat doit intégrer les évolutions du temps et s’inscrire dans une dynamique tendant à faire de la magistrature un véritable pouvoir. Afin d’éviter toute situation de bras-de-fer, les syndicalistes ont lancé un appel aux autorités de tutelle : « Nous invitons le Garde des sceaux à plus d’écoute et de dialogue avec ses partenaires sociaux. Ainsi la volonté d’assainissement prônée se donnera plus de chance de succès ».
Mh. TRAORE