«Rébellion et communauté culturelle peule: préoccupations et pistes de solutions», c’était la quintessence d’une conférence de presse organisée par l’association des amis de la culture peule, Tabital Pulaaku. Elle était animée par l’ancien député, Timoré Tioulenta, avec à ses côtés, le Président de l’association, l’Honorable Amadou Cissé et Modibo Sidibé, membres de l’Association.
Dans un exposé, Tioulenta a brossé les évolutions de la crise et ses répercussions, dressé le bilan des pertes enregistrée par la communauté peule et proposé des pistes de solutions. D’entrée de jeu, il a regretté la succession de ces rébellions depuis l’avènement de l’indépendance dans notre pays (1963, 1990, 2006, 2012).
Il a par la suite chiffré le bilan de ces tragiques évènements pour la communauté peule. En effet, dans son exposé, il a indiqué que la rébellion de 1990 avait fait, dans le cercle de Ténenkou, «41 morts et 25 blessés, quelque 8 668 bovins et 6 776 ovins / caprins enlevés, 8 armes volées, 7 boutiques pillées, le tout pour une valeur estimée à 1 440 611 500 F CFA. A Goundam, 10 morts, 9 789 bovins, 2 621 ovins / caprins et 10 chameaux enlevés. A Youwarou, 4 morts,1 503 bovins et 2 120 ovins / caprins enlevés» (les données des cercles de Diré, Koro, Djenné,,Mopti et Niafunké sont disponibles).
Malgré ces pertes, le conférencier a regretté qu’aucune des victimes et aucun ayant droit n’ait encore été indemnisé, malgré l’adoption et la promulgation d’une loi à cet effet. Avant d’ajouter «entretemps, le tapis rouge sera déroulé pour des bandits armés: des grades et titres de leur choix, des affectations dans des services dorés…»
Il a aussi souligné que, durant la rébellion de 2012, la communauté peule sera plus éprouvée que précédemment. Ainsi, il a brossé un tableau sombre de cette dernière concernant la communauté peule. «Les Peuls qui habitent dans les régions de Kidal, Gao, Tombouctou et Mopti vivront les mêmes affres que les membres des autres groupes ethniques: imposition de principes dits islamiques d’intolérance, enlèvements de biens matériels, exactions de divers ordres sur les populations.. Avec, cependant, au chapitre des horreurs mémorables, l’assassinat du Chef de village de Hombori, le 2 Février 2012 et le massacre de 53 éleveurs, le 18 Novembre 2013, à Tinahamma, dans le cercle d’Ansongo, près de la frontière avec le Niger (la liste des victimes est disponible)», a-t-il déclaré.
Dans les cercles à dominante culturelle peule, Youwarou, Tenenkou, Douentza et Niafunké, le conférencier a fustigé les actes barbares commis par la rébellion «meurtres, tortures, saccage de bâtiments administratifs et de patrimoines culturels, enlèvement d’animaux, contrôle de conscience, fermeture de services sociaux de base…».
Doungoura: tout comme à Aguel Hoc… sur des civils
Pour ceux qui ne le savent pas, Doungoura est une bourgade de la commune rurale de Toguéré Coumbé, dans le cercle de Ténenkou. C’est à quelque 7 kms de là, précisément au lieu dit Neenga, qu’a été opéré le massacre de civils le plus important de la rébellion de 2012, le 18 mars 2013. En effet, à cette date, des bandits armés ont intercepté des véhicules de forains sur l’axe Léré – Dioura. «Telle que décrite, la scène est simplement insupportable: une vingtaine de passagers, ligotés, les yeux bandés, égorgés ou fusillés, drainés dans les profondeurs d’un puits», a décri Timoré Tioulenta, visiblement très éploré.
Conséquence, la transhumance de 2013 a été annulée. Ce mouvement des troupeaux du Delta vers des terres exondées, autrement appelé transhumance, est un rite classique des pasteurs peuls du Delta intérieur du Niger. Il s’est imposé à eux par la forte concentration des animaux sur des espaces limités et par la nuisance des hautes eaux et des parasites.
Faut-il le rappeler, les célèbres fêtes pastorales qui parsèment l’espace culturel Yaaral (traversée des animaux à Diafarabé) – Degal (descente des animaux à Dialloubé), classé Patrimoine immatériel mondial par l’UNESCO en 2005, en sont une illustration vivante et de référence.
Face à la succession des rébellions, la communauté peule propose «la sécurisation effective et permanente des zones frontalières, des espaces et axes sensibles, le retour effectif de l’administration partout elle est absente, l’identification des auteurs des crimes et délits et leur jugement, le recensement des victimes et l’indemnisation des préjudices subis et l’implication de Tabital Pulaaku dans les structures officielles dédiées à la réconciliation», entre autres.
Youssouf Diallo
SOURCE: 22 Septembre