La deuxième session spéciale de la cour d’Assises, consacrée au jugement des infractions qualifiées de crimes économiques et financiers, est ouverte, ce lundi 15 novembre 2021, dans la cour d’Appel de Bamako. En la matière, 18 dossiers concernant 54 accusés seront jugés.
Prévu à 9h00, il a fallu attendre 9H50 pour que les hommes de droit commencent leur travail. Le début des travaux de cette deuxième session spéciale a d’abord nécessité une prestation de serment par les huit (8) assesseurs composés de six (6) hommes et deux (2) femmes. Il s’agit des civils cooptés parmi les citoyens lambda, et qui participent aux délibérés aboutissant à la prise d’un arrêt par la cour. Lequel arrêt peut soit inculper ou disculper les accusés qui comparaitront devant la juridiction, courant cette session. Leur prestation étant faite, le procureur général près la cour d’Appel, Idrissa Arizo Maiga, a pris la parole. La présente session prévoit, d’après lui, à son rôle 18 affaires concernant 54 accusés. Les infractions recensées sont essentiellement constituées d’atteintes aux biens publics ; de faux et usage de faux, de blanchiment de capitaux, d’abus de confiance…, relevant de la compétence du pôle économique et financier. Au public, le procureur général a fait part que l’engagement personnel du magistrat, sa rigueur intellectuelle et morale, son courage et son professionnalisme sont les seuls gages de l’aboutissement heureux des dossiers en charge, dans les délais raisonnables. « Le spectacle enivrant de la détention ne suffit plus, il faut des résultats, donc les dossiers instruits et des jugements. C’est à cette seule condition que tous les torts seront réparés, les délinquants seront condamnés, les innocents relaxés ou quittés, et le trésor public dédommagé », a-t-il indiqué dans son discours.
Rendre la justice n’est pas exercice autocentré dans un décorum particulier. Rendre la justice nécessite d’être conscient des interdépendances à l’œuvre dans le processus judicaire, selon Idrissa Arizo Maiga. Le faire c’est d’être aussi curieux de son environnement et de ses interlocuteurs. « Rendre la justice constitue un défi permanent, personnel et collectif qu’exige de garder la tête froide par rapport aux évidences instantanées et à leur corollaire d’injonction », a-t-il avancé. Aussi, il trouve que la justice est attendue au tournant, dans cette lutte contre la délinquance économique et financière. De la justice, le procureur explique qu’il est attendu du professionnalisme, de la rigueur dans le traitement des dossiers, du respect, de l’application correcte de la loi, voire du respect de la présomption d’innocence. Puis de rappeler que ces règles sont des principes légaux de la détention dont l’usage doit être observé dans des conditions peu contestables. Ainsi, les juges doivent, selon lui, s’armer de courage pour résister à la tentation de la corruption. Le procureur estime qu’ils doivent résister aux pesanteurs sociales négatifs qui s’appellent favoritisme ; le népotisme ; la collusion ; la suffisance ; le clientélisme en ayant comme unique credo et repère : le respect de l’éthique et de la déontologie. Et de préciser que le combat contre la corruption et la délinquance financière est un combat de longue haleine. Lequel se gagnera que par la constance dans l’effort. Il faut donc savoir s’inscrire dans la rupture, lorsque le respect de la loi et des principes généraux de droit le nécessitent, a-t-il souligné aux juges. Au nom du Barreau malien, le Bâtonnier Moustapha Cissé ajoute que la cour d’Assises est une juridiction « extrêmement importante » dans l’architecture judiciaire du pays. Le barreau se réjouit de la tenue régulière des sessions d’Assises et notamment de cette session. « Nous sommes dans un pays où les ressources sont rares, les choses qui doivent être gérées doivent l’être dans la transparence. Il est alors important que vous (juges) puissiez donner le niveau de thermomètre de conscience à nos concitoyens, à travers un examen minutieux, délicat et responsable des dossiers », a-t-il plaidé. En clair, Me. Moustapha estime que le barreau ne sera pas un observateur passif dans cette audience, mais plutôt un acteur déterminé pour assurer la défense, l’honneur et la dignité des citoyens qui comparaitront à la barre. De son côté, le président de la cour, Aldjoumagate Dicko maintient que la tenue de cette audience honore la cour d’Assises. Il a, par ailleurs, déploré que les montants reprochés via les 18 affaires équivalent à des milliards de nos francs. « En tout état de cause, la cour ne faillira pas à ses missions », a-t-il promu.
Mamadou Diarra
Source: LE PAYS