Situé en plein cœur de Bamako, il est l’un des plus grands hôpitaux du Mali. Ses services d’urgence reçoivent en moyenne une quarantaine de patients par jour.
Du sang et de l’odeur nauséabonde ! C’est dans cette atmosphère insalubre que les malades pour la plupart victimes d’un accident de circulation sont soignés aux services d’urgence de l’hôpital Gabriel Touré. Majoritairement des jeunes hommes malades sont couchés sur des lits, civières et souvent à même sur le sol. On entend ici des cris et plus loin des gémissements. Très encombré, il est difficile de se frayer un chemin.
A l’extérieur, les proches piaffent d’impatience et attendent sous un hangar les nouvelles de leurs parents. Faute de chaises ou de bancs, ils sont assis sur des nattes ou par terre. L’inquiétude, le dépit et l’angoisse se lisent sur leur visage. Les rancœurs et les récriminations se font entendre. La cause de celles-ci sont les comportements et les agissements de certains agents de santé.
Le frère d’Amadou Coulibaly est admis depuis deux jours à l’urgence à la suite d’un accident de circulation. Visage crispé et d’une voix hésitante, il déplore le peu d’empressement du personnel sanitaire. « Pour que les médecins puissent s’occuper du malade, il faut que celui-ci ait une connaissance à l’hôpital. Autrement, il mourra » déplore-t-il.
Non loin de ceux-ci, Oumar Traoré, la cinquantaine, a du mal à cacher sa détresse. « Depuis l’admission de ma mère hier nuit à la suite d’un accident vasculaire cérébral, nous ne l’avons plus revue. Nous ne savons même pas comment elle se porte. Même pour lui donner à manger, on nous oblige à leur remettre la nourriture», se désole-t-il. « Wallaye, (au nom de Dieu) ici ce n’est pas la peine. Les médecins n’ont aucun respect pour les visiteurs et les patients. Or personne ne vient ici par plaisir. Il faut transférer les malades à l’hôpital du Mali», commente un de ses proches.
Mariam la quarantaine, assise sur une natte, les mains sous la joue, salue la promptitude des agents de santé. « Ils se sont bien occupés de mon malade depuis son admission» confie-t-elle. Néanmoins, elle déplore les conditions de vie des accompagnants. « Nous dormons à la belle étoile sans moustiquaire. Nous allons aux toilettes de la mosquée pour nos besoins naturels. On vient ici en bonne santé pour sortir avec une maladie », glisse-t-elle.
Ces accusations, les responsables hospitaliers s’en défendent. Pour le Major Alassane Sangaré, la prise en charge du patient commence depuis la salle du tri des malades, située à l’entrée des services d’urgence. « En fonction de l’état de gravité de la maladie, l’agent de santé délègue un de ses collègues pour s’occuper du patient », explique-t-il. Mais le problème au Mali : « tout le monde est pressé pour que sa prise en charge soit faite. Alors qu’il faut d’abord s’occuper du cas des plus urgents», affirme l’interlocuteur.
L’insuffisance de lits est criarde. « On est obligé de faire descendre du lit un malade au profit d’un autre. Car, il y’a pour toute l’urgence vingt cinq lits et dix civières», précise-t-il. Toutefois, « tous les cas d’accidents de circulation sont admis même s’il faut les faire coucher à même le sol. Car les autres hôpitaux n’en prennent presque pas», a-t-il poursuivi.
Au service des urgences de l’hôpital Gabriel Touré, les sirènes des ambulances raisonnent comme des tambours. Elles annoncent l’arrivée de nouveaux malades.
Abdrahamane Sissoko
Source: Le Pays