Les menaces sur les patrimoines culturels de la ville des 333 saints du Mali est sur beaucoup de lèvres qui expriment leur crainte face à cette situation. Pour mieux nous imprégner du sujet, nous avons rencontré Sane Chirfi Alpha, un vieil écrivain connu pour ses intérêts vis-à-vis des patrimoines matériels et immatériels. Sur le réseau social Facebook, M. Chirfi Alpha ne se lasse pas de dénoncer des pratiques qui mettent en péril les patrimoines de sa ville. Dans cette interview, il revient sur la place que jouent les patrimoines pour une nation et explique les menaces qui pèsent sur les patrimoines de Tombouctou.
Lisez l’interview !
Le Pays : Que représentent les patrimoines culturels pour un pays ou une ville?
Sane Chirfi Alpha : Le patrimoine culturel, c’est l’essence même d’une ville ou d’un pays. Il y a le patrimoine matériel et le patrimoine immatériel. Ils sont les fondements d’une nation, ce sont des richesses inestimables.
Quels sont les patrimoines culturels de renommée nationale à Tombouctou?
À Tombouctou, les 3 mosquées Sankoré/Sidi Yahia et Djingareyber ainsi que les seize mausolées sont classés au patrimoine mondial de l’humanité. A côté de ceux-ci, il y a la Médina de Tombouctou. Aujourd’hui, l’ancienne ville (Tombouctou) est classée au patrimoine national.
Pouvez-vous nous dire les menaces qui pèsent sur ces patrimoines ?
Ces patrimoines sont menacés par l’occupation anarchique, la dégradation, le non respect du périmètre de sécurité, le manque d’entretien, la dénaturation ainsi que l’intervention anarchique.
Les autorités locales, notamment le maire, sont tenues pour responsables des occupations anarchiques de ces patrimoines, par certains. Le maire nie toute complicité de sa part. Selon vous, qu’en est-il réellement ?
Le maire et les conseillers municipaux sont autant responsables de ces occupations. Néanmoins le seul responsable moral demeure le maire. De multiples avertissements donnés aux occupants de ces lieux sont restés lettre morte. Ce qui les a encouragés à perdurer dans leur illégalité.
Quelles peuvent être les conséquences pour Tombouctou et pour tout le Mali, si ces patrimoines ne sont pas libérés ?
Tombouctou est déjà sur la liste rouge, celle du patrimoine en péril. Si des mesures ne sont pas prises, ces sites risquent d’être déclassés et c’est extrêmement préjudiciable à l’heure où les nations se battent pour avoir plus de sites classifiés. Ceci sera très mauvais pour l’image du Président de la République déclaré champion des arts, de la culture et du patrimoine, pour l’image du Mali, membre de la commission du patrimoine mondial.
Selon le maire de la commune urbaine de Tombouctou, la seule option qui reste pour déguerpir ces occupants illégaux est l’usage de la force. Dans ce contexte insécuritaire, partagez-vous cette option ?
Dans tous les cas, force doit rester à la loi et il n’y a pas d’insécurité qui tienne. Cette situation a été sciemment entretenue et des dispositions doivent être prises pour le respect de la loi et pour l’honneur de notre pays.
Quel est l’appel que vous lancez aux autorités ainsi qu’aux Tombouctiens en termes de protection de ces joyaux culturels?
Aux autorités de prendre toutes leurs responsabilités, de s’assumer… et aux populations de s’impliquer pour sauver le patrimoine. Nous sommes sur une pente dangereuse et la seule richesse que nous avons est notre patrimoine.
Réalisée par Fousseni TOGOLA
LE PAYS