Enfant chéri du système devenu candidat “anti-système”, conformiste ou audacieux, “ni de droite, ni de gauche”, Emmanuel Macron, surdoué de 39 ans animé d’une ambition immense, a fait irruption dans la campagne présidentielle et vient de s’offrir l’Elysée pour premier trophée.
Ancien banquier d’affaires chez Rothschild encore inconnu il y a trois ans, ministre de l’Economie deux ans durant, héritier et parricide de François Hollande, le plus jeune président de la République de l’histoire promet un “renouvellement” profond de la vie politique, à la tête d’un grand mouvement “ni gauche, ni droite“.
Mickaël Guiho, Marie-Charlotte Perrier, Christelle Juteau-Lermechin, Marie Benoist, Laurent Pénichou, Mathieu Maillet ;
Parcours rectiligne, éducation bourgeoise chez les jésuites à Amiens, nez dans les livres auprès de sa grand-mère directrice de collège, c’est un élève modèle mais aussi rebelle, quand il s’agit de défier les conventions pour épouser sa professeure de français au lycée, de 24 ans son aînée.
Ce “vilain petit canard” ne fait pas comme ses parents ni ses frères et soeurs, respectivement médecins, radiologues et néphrologues.
Grâce à sa tête bien faite – Sciences-Po Paris, diplôme de philosophie, ENA promotion Sedar-Senghorpuis Inspection générale des finances – il attire l’oeil de ses premiers mentors politiques: Jacques Attali, qui en fait le rapporteur adjoint de sa commission pour la libération de la croissance dès 2007;puis François Hollande, qui le nomme secrétaire général adjoint de l’Elysée en 2012 et le propulse à Bercy à l’été 2014.
Brigitte
C’est en 2007 qu’il se marie avec Brigitte Trogneux, 53 ans. C’est son ancienne professeure de français. C’est au lycée qu’ils se rencontrent. “Elle était littéralement fascinée par cet élève. Elle avait enfin trouvé quelqu’un avec qui parler littérature pendant des heures. Leur connivence était incroyable, mais d’abord intellectuelle”, raconte une amie au magasine Pop Story. La fille de Brigitte alors Auzière est dans la même classe qu’Emmanuel Macron.
L’arrivée d’Emmanuel Macron dans la famille ? “Elle s’est très bien passée parce qu‘il a toujours été très respectueux de tout le monde“, raconte Tiphaine Auzière, benjamine des trois enfants de Brigitte. Avant “d’épouser notre maman, il est venu voir si on était d’accord, et je pense que dans les familles recomposées, tout le monde n’a pas ce tact”, dit-elle.
Portrait craché de sa mère, Tiphaine mène une campagne énergique pour son beau-père. Tractage sur les marchés, réunions publiques de soutien au candidat d’En Marche!, cette avocate au barreau de Boulogne-sur-Mer s’est investie à fond.
Brigitte l’influente
Ce n’est pas un secret, les Macron, couple romanesque et ambitieux, mènent ensemble la bataille pour l’Elysée. De 24 ans son aînée, Brigitte Macron est loin de se contenter d’observer son mari. “Ni conseillère politique ni éminence grise, elle est à la fois ses yeux et ses oreilles pour voir et entendre la société”, écrivent Caroline Derrien et Candice Nedelec dans leur livre Les Macron.
Malgré sa discrétion, elle reste omniprésente. Elle tient une place importante dans la carrière politique d’Emmanuel Macron. “Elle n’a pas de place dans l’organigramme officiel, pas de bureau au siège d’En marche!, elle n’assiste pas au comité politique, mais, une fois par semaine, elle participe aux réunions d’agenda“, raconte le magazine L’Express dans une enquête.
Forte d’un carnet de contacts bien rempli et d’un relationel plus qu’aisé, Brigitte Macron repère les lieux, les sujets, les problématiques qui peuvent intéresser son époux. “Tiens, ce sas de resocialisation, où des mômes en perdition apprennent à s’en sortir: il faut absolument qu'”Emmanuel” revienne. Et ce partenariat que Patrick Toulmet voudrait nouer entre le Campus et l’école du réalisateur Luc Besson: pas de souci, Brigitte Macron connaît “Luc”, elle va l’appeler pour nouer le contact”, poursuit L’Express.
Homme d’intuition
Ses “intuitions”, alors qu’il n’a que “cinq ans de boutique en politique”, selon l’expression d’un rallié de droite, suscitent l’admiration dans son premier cercle comme chez ses adversaires.
“Je pense que Macron a eu l’intuition, précisément parce qu’il était extérieur à la vie politique traditionnelle, que les partis de gouvernement avaient créé leurs propres faiblesses, avaient perdu leur propre attractivité, étaient, pour reprendre un vieux mot, usés, fatigués, vieillis”, confiait récemment François Hollande.
Emmanuel, c’est le maître des horloges, il sent quand il faut y aller
Par exemple, “il a eu cette intuition de créer En Marche! quand il a élaboré sa loi” adoptée par 49-3 à l’été 2015, se souvient le député PS Richard Ferrand. C’est en ferraillant pour défendre ce texte fourre-tout, qui va de l’extension du travail du dimanche à la libéralisation du transport en autocar, qu'”il a constaté les scléroses du pays”, souligne ce soutien de la première heure, désormais secrétaire général du mouvement lancé le 6 avril 2016.
A la tête de sa petite entreprise politique, siglée de ses initiales et qui revendique aujourd’hui quelque250.000 adhérents, sans obligation de cotisation, Emmanuel Macron a affiché de plus en plus ostensiblement ses ambitions, avec un fervent meeting fondateur à La Mutualité le 12 juillet 2016 devant 3.000 personnes, puis en quittant le gouvernement le 31 août pour se lancer dans l’aventure présidentielle.
“Son plaisir, c’est de jouer”
Après son bac passé à Henri IV à Paris pour lui faire passer son penchant pour sa prof de français, Emmanuel s’était inscrit au Cours Florent et se présentait parfois à des castings.
“Je le trouve courageux et libre. Il lui a fallu rompre tout le temps”, louait il y a peu un membre du gouvernement.
Emmanuel Macron veut à la fois “libérer” et “protéger”, en refondant “un modèle social dépassé”tout en “réarmant les individus”. Un programme jugé flou par ses détracteurs, qui raillent sa propension à articuler dans la même phrase deux idées contradictoires, parfois teintées de jargon “techno”.
Lui vante sa volonté de “tourner la page non seulement des cinq dernières années, mais aussi des vingt dernières années“, et érige la “bienveillance” en marque de fabrique.
Au fur et à mesure de son ascension dans les sondages, Emmanuel Macron, regard bleu clair et sourire photogénique, s’est laissé gagner par la ferveur des réunions publiques, s’attardant sur scène, se délectant des “Macron président!” fusant dans la salle.