Que s’est-il passé exactement, le dimanche 3 janvier, vers 15 heures, dans le village de Bounti, dans le centre du Mali ? Une frappe aérienne menée par l’armée française dans le cadre de l’opération Barkhane a-t-elle viré à la bavure ? Depuis le bombardement ciblé, assumé par l’état-major des armées, un certain nombre d’accusations ont émergé, notamment concernant d’éventuelles victimes civiles collatérales. Des « civils » présents ce jour-là à Bounti pour célébrer un mariage. A ce stade, toutefois, les faits ne sont pas clairement établis.
Les versions se contredisent. L’hypothèse d’une manipulation de l’information est évoquée par certaines sources. Celles-ci y voient un possible lien avec le contexte tendu dans lequel évoluent les troupes de Barkhane, déployées au Sahel depuis 2014, alors que cinq soldats sont morts entre le 28 décembre 2020 et le 2 janvier, et que l’éventualité d’un début de retrait suscite des avis mitigés.
Alors que des frappes de Barkhane ont régulièrement lieu dans la région – située dans la zone dite des « trois frontières », entre Mali, Niger et Burkina Faso – la polémique semble avoir débuté le 4 janvier par un post sur Facebook émanant d’une importante association Peul, Jeunesse Tabital Pulaaku, ayant pignon sur rue à Bamako, la capitale malienne. Publié à 14 h 38, ce billet fait état d’une « frappe aérienne (ayant) coûté la vie à une vingtaine de personnes civiles au moins » au cours d’un mariage et fait « plusieurs blessés graves ». « Plusieurs femmes et enfants » auraient été tués lors de ce drame.
Témoignages de victimes présumées
Sur Twitter, le premier message identifiable évoquant les « ratés » présumés de Barkhane dans la zone est apparu le 4 janvier à 10 h 50. Lacunaire, il fait d’abord état de cinq morts, puis de dix-huit morts vers 15 heures. Soit à peu près en même temps que le post Facebook de l’association Peul, où cette dernière appelle, au passage, à l’aide l’Etat malien et la communauté internationale, tout en réclamant « l’ouverture d’une enquête ». Des éléments d’information circulent ensuite rapidement au sein des petits cercles d’initiés de la question sahélienne.
C’est le lendemain, le 5 janvier, que ces nouvelles parcellaires prennent de l’ampleur. Elles sont reprises dans une dépêche de l’AFP publiée en milieu d’après-midi, nourries de témoignages de victimes présumées du bombardement contactées au téléphone. Médecins sans frontières (MSF), engagée dans la région de Bounti, a apporté sa caution à ces informations, sans toutefois apparaître nommément dans la dépêche.
Source: lemonde