Si naguère les groupes ex-rebelles touareg étaient plutôt mus par leur propension à l’irrédentisme, il y a lieu de reconnaitre qu’actuellement la donne semble changer. Certainement parce qu’ils se sont rendus à l’évidence que leur lutte indépendantiste a très peu de chance d’aboutir et cela pour plusieurs raisons. On sait que depuis plus d’une trentaine de mois maintenant, les groupes armés du nord, notamment la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) et la Plateforme des Groupes d’autodéfense, ne vibrent qu’au rythme de la mise en œuvre de l’Accord issu des pourparlers inclusifs inter- maliens d’Alger. Cet accord qui, il est vrai, quoi qu’octroyant aux irrédentistes d’hier des avantages énormes en termes de gouvernance locale, ne leur garantit pas une ascension au niveau national dans l’appareil d’Etat.
C’est un secret de polichinelle que dire, depuis la signature de l’Accord en juin 2015, chaque remaniement ministériel a été une occasion d’espoir pour les groupes armés du nord de se voir attribuer un ou des postes ministériels et par ricochet, se voir confier certaines directions des services de l’Etat.
Mais cet espoir n’a jusque-là pu se réaliser, à telle enseigne que par moment, certains dirigeants ex-rebelles touareg ne se sont pas embarrassés de dénoncer la mise à l’écart de leurs mouvements dans la gestion du pays. Certes qu’à la faveur de certaines dispositions de l’Accord d’Alger, des postes de responsabilité leur ont échu au niveau des collectivités locales ou alors au sein des différents organes de la mise en œuvre de l’Accord. Mais ce serait une lapalissade que dire, les ambitions qu’ils nourrissent vont bien au-delà du niveau local et régional pour lorgner des postes au niveau national. Si l’arme principale des dirigeants ex-rebelles est et demeure, jusqu’à la preuve du contraire, le texte de l’Accord d’Alger, force est de reconnaitre que cet outil bien qu’étant placé sous le sceau d’acte international, ne leur permet pas de se positionner dans l’arène politique afin de se hisser au niveau national. D’ailleurs le patron de la MINUSMA, Mahamat Assaleh Annadif, a été très clair en signifiant que la mise en œuvre de l’Accord d’Alger ne doit pas être empreinte de manœuvres politique. « Les acteurs maliens ne doivent pas oublier, en cette année électorale, que la mise en œuvre de l’Accord doit demeurer une priorité et ne surtout pas devenir un enjeu politique. Autant les élections de 2013 ont rétabli l’ordre constitutionnel au Mali, autant celles de 2018 doivent confirmer l’ancrage démocratique irréversible du pays », a souligné le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU, patron de la MINUSMA. De ces propos de Mahamat Assaleh Annadif on déduirait que pour les Nations Unies, il n’y a pas de commune mesure entre la mise en œuvre de l’Accord d’Alger et l’action politique, même si en certaines circonstances les deux peuvent être complémentaire l’une de l’autre.
C’est un secret de polichinelle que dire, bien avant aujourd’hui, certaines organisations internationales avaient appelé et encouragé la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) à se transformer en parti politique afin de pouvoir se hisser, un jour, au niveau national.
Si cette proposition n’avait pas tellement agréé aux groupes ex-rebelles, compte tenu peut-être de leur propension à l’irrédentisme, force est de reconnaitre que de nos jours les donnes ont changé et tout laisse entrevoir que l’ex-rébellion touarègue ambitionne de s’essayer à la politique. D’ailleurs à en croire certaines indiscrétions, des tractations seraient même en cours au sein des groupes ex-rebelles touareg, pour plancher sur les voies et moyens à dégager afin de désigner un candidat issu de leurs rangs et qui se positionnera dans le starting-block pour la prochaine élection présidentielle. Si cela se confirmait, ce serait de très bon augure pour la suite du processus de paix. En effet, si l’ex-rébellion parvenait à porter un d’entre eux, candidat à la présidentielle, cela impliquerait forcement que le verrou de Kidal serait sauté car, il faudrait bien que les autres candidats puissent s’y rendre pour mener campagne, tout comme le candidat des ex-rebelles devrait pouvoir rencontrer les populations des autres villes du pays.
Mamadou GABA
Source: lesursaut