Le projet avec la Principauté de Monaco arrive à terme à la fin de l’année, alors qu’il faut financer le suivi à domicile de 23 enfants et la moitié des salaires des agents
Assise sur une chaise, une jeune maman observe sa fille attachée autour d’un verticalisateur pour une séance de rééducation. Le cri de l’enfant qui se mêle à plusieurs autres est pathétique au point de faire couler des larmes aux visiteurs et parents au chevet de leur progéniture. Pourtant, selon des témoins, c’est l’atmosphère qui règne chaque mardi et jeudi dans cette salle du Centre Père Bernard Verspieren de Bamako, un centre de réadaptation, de rééducation et d’appareillage orthopédique.
Créé en 2006, ce centre participe beaucoup dans la prise en charge du handicap dans notre pays. Il donne espoir à des milliers de patients et à leurs familles en leur permettant l’accès à des soins de qualité. Comme c’est le cas de Mme Coulibaly Mariam Traoré étudiante à la Faculté de médecine et d’odontostomatologie. Cette jeune mère explique qu’à la naissance, sa fille a eu une souffrance fœtale. «On a débuté la rééducation dans ce centre il y a quatre mois après avoir fréquenté trois autres centres sans constat d’amélioration. Par la grâce d’Allah, les soins dans ce centre commencent à porter fruit. Ma fille arrive à se mouvoir, à s’asseoir et essaie même de marcher à quatre pattes», témoigne-t-elle.
Dans le même centre, Salimata Dougnon, une autre maman visiblement affectée, a les yeux rivés sur sa petite fille de plus d’une année. «Quand j’ai accouché, mon enfant n’a pas crié. On nous a orienté vers un centre où je partais chaque jour. Par finir, on m’a indiqué le centre Bernard Verspieren de Bamako. Cela fait deux mois que je viens avec mon enfant et constate que mon bébé arrive à dresser le cou. Elle arrive petit à petit à s’asseoir», se réjouit cette maman.
Sis à Baco Djicoroni, le centre Bernard Verspieren est géré par le Programme de réadaptation d’orientation des personnes handicapées d’encadrement thérapeutique élargi (PROPHETE), une association de droit malien. Il s’est progressivement développé dans les domaines d’activités suivants : rééducation kinésithérapie, ergothérapie, psychomotricité, orthophonie, appareillage (prothèses, orthèse et aides techniques aux personnes en situation de handicap), consultations médicales, mission d’appareillage orthopédique dans plusieurs Régions, réadaptation à base communautaire (RBC).
Ce centre prend en charge quotidiennement en moyenne une vingtaine d’adultes ainsi qu’une quarantaine d’enfants en situation de handicap pour des séances de rééducation en kinésithérapie ou d’orthophonie. Selon son directeur d’exploitation, il travaille beaucoup avec le Centre national d‘appareillage orthopédique du Mali (CNAOM) avec lequel il s’inscrit dans la complémentarité.
Au regard de l’aide qu’il apporte dans la prise en charge du handicap dans notre pays, le centre a aussi besoin de l’accompagnement de l’état pour élargir l’offre de soins. Le centre Père Bernard fonctionne à travers les aides de ses partenaires notamment la Fondation de France, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), la Principauté de Monaco mais aussi les ressources qu’il génère: «On fait du social en essayant de venir en aide à toute personne en situation de handicap peu importe leur capacité financière.
L’État nous a offert le terrain mais nous n’avons malheureusement jusque-là aucun financement de lui après plusieurs démarches auprès des autorités. On essaie d’avoir des tarifs relativement bas. Malheureusement, ceux-ci ne permettent pas de faire fonctionner correctement le centre », explique le directeur d’exploitation. Il rappelle que le centre est en partenariat avec le CICR qui l’aide à financer la section d’appareillage orthopédique. «Cette section lui permet de proposer des prothèses aux personnes amputées au Mali et de fabriquer des orthèses pour les enfants en nécessité d’appareillage. Nous en fabriquons en moyenne une vingtaine par mois», dit-il.
Le Centre est également lié par un partenariat à la Fondation de France qui lui finance un projet d’appareillage des victimes de mines au Mali. Il développe aussi un projet avec la Principauté de Monaco qui arrive malheureusement à son terme à la fin de l’année 2021. «Ce projet finance le suivi à domicile de 23 enfants et la moitié des salaires du centre. Nous sommes à la recherche de nouveaux partenaires, afin de garantir l’existence du Centre et la continuité de la prise en charge des enfants et adultes en situation de handicap dans notre pays.
Nous proposons également le parrainage d’enfants pour permettre de financer une partie de leur prise en charge ou leurs frais de transport», explique le directeur d’exploitation. Il sollicite une subvention de l’état. «Cela nous permettra d’assurer la pérennité du centre et de conserver les mêmes services et éventuellement les améliorer. Nous avons aussi besoin d’équipements, d’un ophtalmologiste pour faire fonctionner le service ophtalmologie, déjà équipé, de conventionner avec la Caisse malienne d’assurance maladie (Canam) pour que les malades bénéficient de l’Assurance maladie obligatoire (Amo)».
Il espère que ces différentes doléances auront toute l’attention requise des autorités afin que sa structure puisse continuer à donner espoir aux personnes en situation de handicap. Il estime que le handicap est encore très incompris au Mali parce que source de stigmatisation et d’exclusion.
Aminata Dindi SISSOKO
Source : L’ESSOR