Depuis plusieurs semaines, les populations de Bamako et environs sont confrontées à une pénurie d’eau potable. Les ménages ne savent plus à quel saint se vouer pour étancher leur soif. Des nuits blanches et de longues files d’attente pour la précieuse denrée sans laquelle la vie n’est pas possible. Quelles sont les causes réelles de ce déficit cruel d’eau ? Qu’envisage l’État pour le résoudre ?
Consciente de la souffrance de sa clientèle, la direction de communication de la Société malienne de gestion de l’eau potable (SOMAGEP-SA) sous la houlette de notre confère, Abdoul Karim KONE, tente d’apporter des éléments de réponses à ces deux questions.
Tout d’abord, au nom de la direction et de l’ensemble du personnel de la SOMAGEP-SA, M. KONE a présenté à tous les clients les excuses les plus sincères de la société avant de donner quelques explications, à cet état de fait indépendant de la volonté de la direction.
Les causes de la pénurie
Selon le directeur de la communication de la SOMAGEP, la crise d’eau à Bamako et ailleurs au Mali ne date pas d’aujourd’hui. Mais plutôt d’une crise structurelle liée à un manque d’investissement dans le secteur sur près de 20 ans.
Les principales raisons de la pénurie d’eau, explique-t-il, résultent du déficit de production. Autrement dit, l’offre est largement dépassée par la demande.
Selon les chiffres officiels, la ville de Bamako comptait en 1960 à peine 100 000 âmes. De nos jours, cette population urbaine est estimée à près de 3 millions habitants. Une situation qui accentue les besoins en eau potable en créant un déséquilibre entre l’offre et la demande.
Mieux, aujourd’hui la capacité de production de la SOMAGEP-SA est de 200 millions de litres d’eau par jour contre une demande des populations estimée à 350 millions, soit un gap à combler de 150 millions de litres d’eau par jour. Cette situation est bien la conséquence de l’inadéquation entre la croissance démographique et le développement des infrastructures de production d’eau. Pour preuve, soutient M KONE, la ville Bamako continue à être alimentée à 70 % par la Station de Djicoroni Para, construite en 1956, qui a une capacité de production de 130 millions de litres par jour.
Cette forte croissance démographique engendre un déficit structurel d’eau potable, depuis 2002, affectant tous les quartiers de la capitale surtout les populations des quartiers situés sur la rive droite du fleuve Niger.
Pour atténuer cette pénurie d’eau potable, le gouvernement a entrepris quelques actions d’urgence ayant consisté à installer des stations compactes de potabilisation d’eau le long du fleuve Niger, dans certains quartiers, à savoir : Baco Djicoroni, Magnambougou, Missabougou et Kalabancoro, pour venir en appui à la Station de Djicoroni-Para. Mais toujours est-il qu’il faut de grands projets structurants à l’image de celui Kabala en construction pour sortir de l’aubaine.
Par ailleurs, note M. KONE, d’autres raisons non moins importantes expliquant les coupures d’eau sont, les coupures intempestives de courant au niveau des stations de pompage ; la situation géographique des clients dont les maisons sont situées en altitude et loin de leurs unités de production.
Le bout du tunnel
Selon le directeur de la communication de la SOMAGEP-SA, la résolution du problème d’accès à l’eau potable, à court et à moyen terme, passe inévitablement par la réalisation du projet structurant de Kabala qui permet d’apporter une production supplémentaire de 288 millions de litres par jour pour la ville de Bamako et ses environs.
Aujourd’hui, a-t-il fait savoir, le taux de réalisation de la Station de pompage de Kabala est estimé à 78 %.
« La fin des travaux est attendue en décembre 2018. Son exploitation commencera en début 2019. Toute chose qui va tourner définitivement la page du stress hydrique à Bamako », a précisé M KONE.
En tous cas, indique-t-on, les travaux de la station de Kabala, une fois terminés, permettront de doter la ville de Bamako et environs de 288 millions de litres d’eau potable par jour, 1 400 km de réseau, 1 208 bornes-fontaines, près de 90 000 branchements sociaux. On assistera au doublement de la capacité actuelle de desserte en eau potable, une population additionnelle de plus de 1 200 000 habitants de la capitale et environs auront accès à l’eau potable.
Ainsi, le taux d’accès à l’eau potable de Bamako passera de 95 % contre 65 % actuellement ».
Pour rappel, la SOMAGEP-SA a pour mission d’assurer l’exploitation de l’eau potable sur toute l’étendue du territoire national, à travers le captage de l’eau brute et son traitement ; le pompage et la distribution de l’eau traitée ; le contrôle de la qualité de l’eau ; la relève, la facturation et le service à la clientèle, la réalisation des branchements ; la réalisation des extensions, des réhabilitations et renouvellements de réseaux ; et la maintenance préventive et curative des installations.
L’état des lieux de l’adduction de l’eau potable de Bamako fait ressortir que l’urbanisation de la ville de Bamako est essentiellement à l’horizontale avec un taux d’accroissement de la population très élevé (1er en Afrique de l’Ouest et 6e dans le monde).
On y retient également que 50 % de la population a accès au réseau de distribution et 26 % est desservie par des bornes-fontaines. Toutefois, les inégalités urbaines persistent. Pour preuve : un million de personnes, les plus démunies, payent l’eau jusqu’à 5 fois plus cher que les tarifs de la SOMAGEP-SA.
Par Sékou CAMARA
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