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Moussa Ag Acharatoumane : pour une cohabitation pacifique entre les populations

L’homme qui fut le numéro 2 du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et un membre influent de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), avant de créer le Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA) en septembre 2016, s’est prêté aux questions de Journal du Mali pour une interview exceptionnelle sur les scissions et les évolutions au sein de la CMA.

Moussa Ag Acharatoumane leader mnla azawad negociation pourparlers

Quel était l’objectif de votre récent séjour en France et en Suisse ?

J’étais à Paris pour expliquer la nouvelle dynamique de la naissance du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA), ses objectifs et ses projets d’avenir, et ce qui m’a poussé à créer ce mouvement. Il s’agissait de reprendre contact avec tout mon réseau en France et en Suisse.

Quel est le regard de ces pays sur votre mouvement ?

Le MSA est très bien vu par une bonne partie de ceux qui suivent de très près l’évolution des mouvements politico-militaires dans la zone de l’Azawad parce qu’il s’inscrit dans une nouvelle dynamique intéressante, qui n’embarrasse pas beaucoup de monde à cause de son caractère non-indépendantiste. Il s’inscrit dans le cadre de l’accord d’Alger, qui suit la logique de ramener la paix, la cohésion sociale et surtout apporter la sécurité et le développement pour les populations. Tout ce que le MSA est en train de faire à Gao et à Ménaka, c’est de poser des actes concrets au-delà de venir à Bamako. Il faut sortir des discours de positionnement qui ne font pas avancer. Le plus grand défi du MSA c’est de permettre à la population de cohabiter ensemble sur tous les plans. Nous essayons aussi de nous hisser au-dessus des contradictions telles qu’elles existent entre la CMA et la Plateforme, souvent liées à de problèmes d’ordre tribale ou de ceux liés au trafic de drogues.

Qu’est-ce que le retrait de la CMA des instances du Comité de suivi de l’Accord (CSA) augure pour le futur selon vous ?

Ce communiqué pouvait se justifier à un moment donné parce qu’effectivement les choses n’avançaient pas du tout. Mais, il est arrivé à trois ou quatre jours d’un autre communiqué de la CMA, qui réaffirmait sa participation aux patrouilles mixtes et à la mise en œuvre de l’Accord. Ce nouveau communiqué était signé par Algabass Ag Intalla, qui venait de prendre la tête de la CMA, alors que l’autre était signé de Bilal Ag Chérif, trois jours avant. On a donc l’impression qu’il y a une contradiction dans ces deux positionnements. De mon point de vue, il y a une part de vérité dans ce communiqué, le fait que l’Accord n’avance pas. C’est une réalité qu’on ne peut pas nier. La responsabilité est aussi partagée, même si la paternité de la mise en œuvre de l’Accord revient au gouvernement. Il faut que le gouvernement revoit sa stratégie dans la mise en œuvre de l’accord. Beaucoup des mesures prises par les autorités n’avancent pas, notamment la mise en place des autorités intérimaires, les patrouilles mixtes et les nouvelles commissions. Aujourd’hui, l’inclusivité contenue dans l’Accord, n’est pas une réalité sur le terrain. À l’intérieur du gouvernement, il y a des têtes politiques qui prennent des décisions par rapport aux affinités sans tenir compte de l’ensemble des acteurs.

Il est question de démarrer les patrouilles mixtes sans la CMA. Cela peut-il fonctionner selon vous ?

Je ne pense pas que les patrouilles mixtes puissent apporter les résultats escomptés en l’absence de toutes les parties. La CMA, qu’on le veuille ou pas, est une partie importante dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord. Mais la réalité est que la CMA est très divisée à cause des problèmes à l’interne. Ce sont ces problèmes qui empêchent malheureusement cette organisation de répondre à tous les engagements qu’elle a pris précédemment. Cependant, l’expérience nous a montré que si une partie ne répond pas au rendez-vous, on peut démarrer la machine en attendant. C’est ce qui s’est passé lors de la signature de l’Accord et j’ai l’impression que la même chose va se répéter.

Les divisions actuelles au sein de la CMA sont elles dues au duel de leadership entre Bilal Ag Chérif et Algabass Ag Intalla ?

Il s’agit là de deux personnages très différents. Bilal Ag Chérif est un jeune très instruit qui a une vision assez précise de beaucoup de choses. Ce qui n’est malheureusement pas le cas d’Algabass Ag Intalla qui n’est pas instruit, mais qui a une expérience politique avérée. C’est vrai qu’ils ne sont pas d’accord sur tous les sujets, mais je ne pense pas pour autant qu’il y ait une rivalité entre les deux. Ils ont plutôt intérêt à s’unir, car beaucoup de choses gravitent autour d’eux qui ne marchent pas forcement à leur avantage. Cependant, on constate que dans les démarches politiques que les uns et les autres font, il y a une différence. Quand Bilal était à la tête de la CMA, on constatait une certaine constance et une certaine continuité malgré les résistances. Il est plus diplomate contrairement à Algabass.

Quelles sont vos relations aujourd’hui avec ces deux leaders ?

Aujourd’hui je suis dans une posture de rassembler les gens, je ne coupe jamais contact avec quelqu’un. Mais, il faut reconnaître qu’un fossé s’est créé entre nous depuis la naissance du MSA que certains n’ont pas compris et que d’autres ont du mal à accepter. Ce qui ne nous empêche pas de s’appeler et d’échanger.

La CMA est-elle affaiblie par votre départ ?

Même si elle n’est pas affaiblie, elle a quand même pris un coup dur parce que ce sont des communautés, tribus et régions entières qui lui ont tourné le dos, en l’occurrence celles de Ménaka, Tombouctou et Gao. Le constat est aujourd’hui que, depuis notre départ, elle n’a gagné aucune bataille. Le MNLA et le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) sont réfugiés à l’intérieur de Kidal, ils ne contrôlent rien à l’extérieur.

Va-t-on vers un éclatement de la CMA ?

On est aujourd’hui en pleine recomposition interne au sein de cette organisation. La CMA est une coordination d’un ensemble de mouvements, de communautés et de personnages qui n’ont pas forcément les mêmes visons sur un certain nombre de choses. On peut dire qu’il y a deux branches de la CMA : celle de Kidal avec le MNLA et le HCUA, et celle de Ménaka, Gao et Tombouctou constituée du MSA, du Congrès pour la justice dans l’Azawad (CJA), de la Coalition des peuples de l’Azawad (CPA) et de la Coordination des mouvements forces patriotiques de résistance (CMFPR2). Aujourd’hui ces deux courants ne parlent pas le même langage, parce que quand nous avons signé l’Accord, malheureusement, la légalité de la signature est restée entre les mains de nos anciens mouvements. Les nouveaux mouvements ont certes une légitimité à la base mais pas la légalité de signature de l’Accord que les autres amis ont signé à notre place.

Comment vous imaginez-vous dans les deux ou trois ans à venir sur plan politique ?

Pas mal de gens ont leur regard braqué sur moi et depuis un certain temps le contact est assez fluide. Les gens sont très contents du travail qu’on est en train de faire qui s’inscrit dans le cadre de la vision et de l’intérêt de l’État. À cause de notre travail beaucoup de gens, même de l’extérieur, disent que Ménaka est devenue la région pilote de la mise en œuvre de l’Accord, parce que c’est la seule région où l’on trouve la fluidité entre tous les mouvements, sans problèmes. Quand à ma personne, aujourd’hui, j’évolue positivement dans le paysage politique dans ma région locale qui est Ménaka. Au plan national, j’ai des relations avec pas mal d’hommes politiques à Bamako. Aujourd’hui, je suis dans une posture qui m’amène à faire forcément de la politique dans les années à venir. Mon souhait le plus ardent est de contribuer à ramener la paix et la quiétude à la population du nord du Mali. Et si je peux apporter quelque chose de positif au plan national je serais ravi de le faire.

 

Source: journaldumali

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