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« Monsieur le juge, de grâce, je n’ai pas tué la prostituée »

L’un des deux hommes suspectés d’avoir assassiné Dorothée Nnomo-Rey réclame un non-lieu au juge d’instruction. Il est à bout.

serge mazoyer accuse crime jamais commis

 

Il a la carrure massive d’un videur de boîte de nuit, ce qu’il a été un temps dans sa vie, et n’aurait fait qu’une bouchée de ses propres mains du sort de la frêle Dorothée Nnomo-Rey, une prostituée sauvagement assassinée dans son fourgon en mars 2011 le long de la route nationale 6 à Rully, en région chalonnaise.

Problème de taille, l’homme, Serge Mazoyer, 64 ans, domicilié dans le canton de Verdun-sur-le-Doubs, ne sait plus sur qui jurer pour qu’on le croie définitivement : il affirme qu’il n’a pas tué cette femme qu’il dit n’avoir jamais ni croisée ni fréquentée. Le sexagénaire n’en peut plus. Il est à bout de nerf, ébranlé psychologiquement par l’attente des conclusions de l’enquête judiciaire. Depuis trois ans et sa mise en examen pour assassinat dans ce dossier criminel, pas un jour ne passe sans que les soupçons de crime qui pèsent sur lui ne lui tambourinent le crâne.

« Moi, Mazoyer Serge, handicapé à 65 %, incapable de saigner un lapin, vous m’avez sans ménagement accusé de meurtre… », écrit-il maladroitement et dans un français approximatif au nouveau juge d’instruction chalonnais. « Je n’ai pas été longtemps à l’école », s’excuse l’ancien chaudronnier qui a effectué toute sa carrière dans une entreprise chalonnaise. Pas érudit mais frappant de sincérité. « J’ai été incarcéré à Varennes-le-Grand du 15 septembre au 8 décembre 2011, puis libéré », poursuit-il dans sa missive. « Je ne pointe plus et ils m’ont rendu mon passeport. Les enquêteurs, la justice, avec des moyens énormes ont tout fait pour m’accuser… »

Serge Mazoyer ne se dit pas très malin mais a le fort sentiment d’être pris pour un pigeon. « Nous avons été au mauvais endroit au mauvais moment. » « Ce fameux samedi, j’étais chez mon copain Daniel Joblot à Rully, on partait pour Lux et nous sommes effectivement passés devant le fourgon de la prostituée. La porte était entrouverte, des chaussures étaient visibles à l’entrée. Personne n’est descendu de la voiture, on n’a rien vu. On a continué notre chemin jusqu’à Lux où nous sommes allés au restaurant, des témoins nous ont vus. Je ne suis jamais monté dans cette camionnette. »

Celui qui participait aux soirées camerounaises de l’ancien hôtel de Rully, propriété de son copain Joblot, Serge Mazoyer, l’habitué des filles qu’il payait pour partager des bons moments, ne connaissait pas Dorothée Nnomo-Rey. « Je ne l’ai jamais vue. J’ai toujours respecté les femmes et aucune d’elle n’a eu à se plaindre de moi. »

« J’aimerais bien connaître l’assassin »

« Je n’ai jamais été violent, j’ai vécu 40 ans avec la même femme avant une séparation en bon terme, elle a témoigné en ma faveur. » De même que le soutien inconditionnel de ses quatre enfants et des villageois qui lui ont écrit lorsqu’il était détenu, lui a fait « chaud au cœur ».

Le sexagénaire n’arrive pas à relever la tête sur laquelle pèse l’image d’un tueur de prostituée. Dans son esprit, il est toujours copain avec Daniel Joblot. « On ne se doit rien et on sait tous les deux qu’on n’a rien fait. » Dans les faits, il n’a pas le droit de rentrer en contact avec lui. « Ils m’ont tout pris, je veux sauver mon honneur. »

L’homme, souffrant de problèmes de dos et à peine sorti d’une nouvelle hospitalisation d’un mois, reste robuste. Le regard bleu profond se rougit d’une émotion retenue. Il se remémore inlassablement la même phrase : « On vous arrête pour crime… ». « Vous vous rendez compte, ils sont venus me chercher chez moi avec une armada de gendarmes… Moi qui n’ai jamais eu affaire à la justice, je n’ai jamais volé une poule. » Lui, l’ancien conseiller municipal durant dix-huit ans de son village. « Ils se sont acharnés sur nous, nous étions les coupables idéaux. » Et de marteler : « Je suis accusé à tort. Je demande un non-lieu et des excuses surtout pour ce qu’ils m’ont fait. Je suis mis plus bas que terre. J’ai la haine contre ces trois enquêteurs. »

« J’aimerais bien connaître l’assassin. Vous vous rendez compte que dans le camion, il y a plein d’ADN de type masculin et pas les nôtres ! Ils n’ont aucune preuve contre nous. » Mais alors, pourquoi avoir dit, alors que le duo était sur écoute avant son arrestation : « Avec cette connerie, on peut aller en prison ». « Mais on parlait du crime, de notre passage sur les lieux… C’était une maladresse, pas un aveu. »

Et Serge Mazoyer comme Daniel Joblot, n’arrive pas à comprendre pourquoi la « chef » supposée des prostituées de la région, une certaine Nadia, n’a pas été « invitée » par les enquêteurs à être plus bavarde. Pourquoi le mari de Dorothée « alors qu’elle devait le quitter deux jours plus tard, le lundi, pour partir vivre chez sa famille à Annemasse », n’a pas été davantage impliqué dans le dossier. « Pourquoi, pourquoi tant d’acharnement ? Ils m’ont scié les pattes. On a beau clamer notre innocence, rien ne se passe. C’est très dur à vivre », conclut Serge Mazoyer dont les yeux sont définitivement devenus ­rouges.

source : bienpublic

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