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Mme Touré Assian Sima, la directrice de l’ANGESEM : « Nous sollicitons la collaboration de tout le monde »

Mme Touré Assian Sima : Bonjour Madame, vous êtes la directrice de l’Agence nationale de gestion des stations d’épuration du Mali, pouvez-vous nous présenter votre structure ? En quoi consistent les missions qui lui sont assignées ?

L’ANGESEM est un Etablissement public à caractère administratif doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Il a été créé par l’ordonnance n°07- 015 du 28 mars 2007, ratifiée par la loi 07-042 du 28 juin 2007, et a pour missions d’assurer la gestion durable des stations d’épuration des eaux usées et ouvrages annexes.

À ce titre, elle est chargée de : promouvoir et veiller à la gestion des ouvrages d’assainissement suivant les normes établies en la matière ; identifier, organiser et renforcer les capacités d’étude, de réalisation des infrastructures d’assainissement ; concevoir, coordonner, suivre et contrôler la réalisation, l’installation ou la réhabilitation des ouvrages et équipements ; contribuer au transfert de la maîtrise d’ouvrage de l’Etat aux Collectivités territoriales. Elle s’occupe spécifiquement de la gestion collective des eaux usées.

Qu’est-ce une eau usée ?

 On entend par eaux usées, toutes eaux souillées résultantes des activités humaines. Selon l’article 3du décret n°01-395/ P-RM du 06 septembre 2001, fixant les modalités de gestion des eaux usées et gadoues, on entend par eaux usées ou déchets liquides : toutes eaux modifiées dans leur qualité par utilisation ménagère, commerciale, artisanale, agricole et industrielle.

Il y a différents types d’eaux usées :les eaux usées domestiques ; les eaux usées urbaines ; les eaux usées industrielles ; les eaux usées agricoles ; les eaux de pluie et de ruissellement.

C’est quoi une station de d’épuration, quelle est son utilité dans le système d’assainissement d’une ville ?

C’est un ouvrage où toutes les eaux usées sont acheminées à travers un réseau d’égouts pour les débarrasser des impuretés avant leur rejet dans la nature.

Avec l’augmentation galopante de la population dans les villes, l’assainissement individuel ne peut plus répondre et vous voyez l’eau des puits des quartiers anciens de Bamako comme Médine et Bagadadji qui ne mousse plus. Cela montre un degré important de contamination de l’eau de la nappe car le sol est gorgé d’eau.

Le type d’assainissement est le collectif qui permet non seulement de protéger les ressources en eau mais surtout d’améliorer le cadre de vie au niveau de la ville qui est une vitrine du pays. Donc son utilité n’est plus à démontrer.

De sa création à nos jours, quelles sont les grandes actions réalisées par votre agence ?

Plusieurs actions ont été réalisées de 2007 à nos jours. On peut noter la construction d’une station des eaux usées industrielles et de teinturerie à Sotuba ; la construction de stations d’épuration dans quatre hôpitaux du Mali (Pont G, l’hôpital de Sikasso, CNAM et l’hôpital du Mali à Bamako) ; la signature de conventions de gestion avec les collectivités territoriales de Mopti et de Tombouctou pour la gestion de leur station d’épuration.

Pour cela, l’ANGESEM a réhabilité la station d’épuration de la ville Mopti qui était à l’arrêt. Elle est aujourd’hui fonctionnelle. Elle a aussi effectué les travaux de réhabilitation de la station d’épuration de la ville de Tombouctou. Actuellement, nous sommes en train de faire l’extension du réseau sur le versant Est de la ville.

En outre, nous pouvons signaler l’ouverture de trois antennes régionales à Bamako, Mopti et Tombouctou ; la finalisation du cadre organique de la Direction générale et des antennes de l’ANGESEM ; la réalisation de l’étude d’instauration de la redevance du service public d’assainissement des eaux usées au Mali ; la construction du siège de l’Agence à Sotuba ; la mise en place d’une stratégie de communication.

Il est évident que tout n’est pas parfait dans votre domaine d’activité, quelles sont les difficultés auxquelles l’agence fait face ?

La principale difficulté rencontrée est l’insuffisance de crédit alloué à l’Agence. C’est aussi le problème foncier qui entrave nos activités et l’insuffisance de personnel qualifié.

Quels sont les projets à court terme que l’agence s’apprête à mettre en œuvre ?

Il y a surtout la construction d’une station de traitement de boues de vidange à Bamako ; la construction d’une station de traitement des boues de vidange à Sikasso et à Ségou qui sont déjà en chantier ; la production de compost pour l’agriculture avec des boues de vidange.

Il y a aussi la production d’électricité à travers les boues de vidange, le renforcement du cadre partenarial avec les acteurs de l’assainissement au Mali et les sociétés et entreprises homologues d’autres pays, la mise en œuvre du schéma directeur d’assainissement de la ville de Bamako.

Mme la directrice, il est établi que 80% des eaux que nous utilisons deviennent des eaux usées ; avec le projet de Kabala où 144 000 md’eau potable sont attendus ; quelles sont les dispositions prévues pour cette quantité importante d’eaux usées qui seront produites ?

Avec Kabala, il est prévu la construction de deux stations d’épuration des eaux usées de part et d’autre du fleuve Niger à Bamako, une sur la rive gauche et une sur la rive droite à l’horizon du projet 2030. L’importante quantité d’eaux usées produites sera alors traitée avant son rejet dans le fleuve Niger. Déjà, la Banque Africaine de Développement, à la suite de la table ronde réalisée, a mis la main à la poche, comme on a coutume de le dire, avec la somme de 25 milliards de FCFA. Parallèlement, une solution sera trouvée à l’épineux problème de la gestion des boues de vidange par la réalisation de deux stations de traitement sur les deux sites retenus.

Malheureusement, ce financement de la BAD, nous l’avons perdu pour n’avoir pas pu honorer certains engagements. Mais il y a depuis le mois de mars 2020, une lueur d’espoir avec l’intérêt que porte la Banque Mondiale au projet dans le cadre du projet Bamako moteur de croissance inclusive.

Si les eaux ne sont pas traitées, quelles conséquences cela peut avoir ?

Les principales conséquences est la pollution de nos ressources en eau et la dégradation de notre cadre de vie par divers polluants que sont les métaux lourds, les produits chimiques, etc. Avec ces pollutions, les risques de maladies liées à l’eau sont fréquents comme la diarrhée.

Nous sommes actuellement confrontés à une pandémie sans précédent, le Covid 19. Pouvez-vous nous dire s’il y a un risque de contamination avec les eaux usées ?

Les coronavirus sont présents dans les eaux usées. Toutefois, on estime que le risque de contracter le COVID-19 est faible, en raison de l’environnement qui n’est pas favorable à leur survie. Ceux-ci s’ajoutent aux autres pathogènes qui sont véhiculés dans les égouts, les stations de pompage, les stations de traitement des eaux usées et les camions de pompage à vide.

Comme les autres pathogènes, ces milieux de travail contaminés justifient déjà des mesures d’hygiène accrues ainsi que le port d’équipements de protection individuels (ÉPI) appropriés en fonction de l’évaluation des risques liés aux tâches à effectuer ainsi qu’à l’environnement de travail.

Avez-vous un appel à lancer ?

Nous sollicitons la collaboration de la population en lui demandant d’éviter de jeter aux toilettes plusieurs objets indésirables, plus particulièrement les lingettes désinfectantes et autres objets dans les ouvrages de traitement.

Nous invitons tout le monde au respect des mesures barrières. Les mesures de prévention recommandées pour tous les milieux contaminés par des eaux usées sont  de : recourir aux Mesures de prévention générales recommandées.Il est aussi recommandé de prendre une douche à la fin du quart de travail, lorsque les risques liés à la tâche le justifient. Mais aussi de choisir les ÉPI imperméables (bottes, gants, lunettes, visière, survêtements, etc.) pour la tâche à effectuer (ex. : nettoyage au jet d’eau) et à la situation de travail (ex. : dégrilleurs, des sableurs, espaces clos, etc.), ainsi qu’une protection respiratoire appropriée afin de protéger les travailleurs de tous les pathogènes.

Fanta Sakiliba

Source: Nouvelle Libération

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