De retour de New-York où, dans un discours prononcé samedi 25 septembre, devant l’assemblée générale de l’ONU, il a confondu la France et la MINUSMA dans un réquisitoire aussi sévère qu’inattendu, Choguel Maïga a fait escale à Paris. Entorse compréhensible à une tradition solidement établie entre ce pays et ses partenaires africains, il n’a eu droit à aucune rencontre officielle. Seuls des fonctionnaires d’un certain rang du quai d’Orsay se sont rendus à son hôtel pour tenter de mieux éclairer sa lanterne (si ce vocable sied en la circontance) sur ce qu’il appelle » l’abandon (du Mali) en plein vol « .
Les autorités françaises, Florence Parly en tête, ne s’embarrassent point de circonlocution pour dire tout le mal qu’elles pensent des propos tenus par le chef du gouvernement de la transition. La ministre des Armées déclare : « C’est beaucoup d’hypocrisie, beaucoup de mauvaise foi, beaucoup d’indécence « . Des termes plus proches de la belligérance que de la diplomatie caractérisant les relations entre Etats, justifiés par le fait que l’accusation portée par Choguel Maïga ne repose pas sur la réalité et qu’elle a lieu le lendemain du jour où le 52ème soldat français est tombé au Sahel, sur le sol malien, dans un affrontement avec des terroristes. Ce qui lui fait dire que » s’essuyer les pieds sur le sang des soldats français est inacceptable « .
A l’appui de Florence Parly, le ministre français des Affaires étrangères a rappelé que » la transformation du dispositif militaire (de son pays) au Sahel ne constitue ni un départ du Mali ni une décision unilatérale et il est faux d’affirmer le contraire. Cette adaptation a fait l’objet de consultations avec les autorités saheliennes et maliennes depuis le sommet de Pau, en janvier 2020. »
Le commandant de la force Barkhane renchérit : » Le projet de quitter Kidal, Tessalit et Tombouctou a été élaboré avec les chefs d’Etat du G5-Sahel ( Mauritanie, Mali, Niger, Burkina et Tchad) au cours d’une rencontre à Nouakchott (Mauritanie)« . Ajoutant que la MINUSMA et les FAMa doivent assurer la relève des forces françaises dans ces trois emprises.
Dans une lettre datée du 24 septembre, adressée au premier ministre malien, l’ambassadeur de France au Mali, Joël Meyer lui signalait que « la France, dans ses activités de développement et de coopération d’une part, dans son soutien aux FAMa avec l’opération Barkhane d’autre part, ne quitte pas le Mali. Avec plus de 50 milliards de francs CFA d’appui au développement ne serait-ce que pour la seule année 2021 et 3000 soldats présents sur le sol malien, il est inexact d’affirmer que la France cesse de se tenir au côté du peuple malien« . Rappelant que « l’adaptation du dispositif sécuritaire (français) a été discuté à plusieurs reprises avec les autorités saheliennes, notamment maliennes, les dernières consultations s’étant tenues en marge du sommet de Ndjamena, en février 2021. »
A l’évidence Choguel Maïga a tout faux lorsqu’il affirme, péremptoire, que le Mali a été lâché » en plein vol » par son principal allié dans la traque des terroristes et que ce dernier n’a même pas eu la délicatesse de l’en informer auparavant. Du coup il apporte de l’eau au moulin de la ministre française des Armées qui soutient que » l’objectif du recours à Wagner est de ne pas tenir les engagements pris vis-à-vis de la communauté internationale » de rendre le pouvoir aux civils en organisant des élections présidentielle et législatives en février 2022.Il est vrai que le projet de recrutement des mercenaires russes intervient dans un contexte où il est de plus en plus question de proroger la transition et que des informations de presse font état de ce qu’ils seront en charge en partie d’assurer la protection des personnalités de la transition. En cas de troubles éventuels ?
Le Mali n’en a sûrement pas besoin et s’il lui faut choisir entre la France, ses alliés européens et américains et des mercenaires motivés par le seul appât de l’or, le choix est vite fait. En aucun cas l’appétit du pouvoir ou la soif des réformes -si utiles soient-elles- ne doivent prévaloir sur l’intérêt supérieur du Mali et de son peuple.
Saouti HAIDARA
Source: l’Indépendant