Le Collectif des Associations Musulmanes a organisé, vendredi dernier, un meeting à la Bourse du Travail. En fait c’est une marche qui était programmée. Au moment de lire son discours, Mohamed Kimbiri a annoncé le meeting en lieu et place de la marche. Ce qui a créé un tollé général et certains ont voulu marcher. La présence dissuasive de la police les en a empêchés. Mohamed Kimbiri a été vite conduit dans la salle de la Bourse du Travail et les policiers ont du intervenir pour le protéger de la foule déchainée.
Pourtant avant de lire sa déclaration, il avait expliqué que le changement dans le programme est intervenu, la veille, à cause de l’intervention des familles fondatrices de Bamako et de certaines notabilités. Il avait, aussi, indiqué qu’un plan B était prévu, pour faire une prochaine marche. Toutefois, il ne semble pas avoir tout dit, vu la détermination de la police à charger les marcheurs, alors que le bruit avait couru que la marche était autorisée. Dans sa déclaration, il a indiqué : « depuis un certain moment, l’école malienne connait, de façon récurrente, des années scolaires et universitaires ponctuées de perturbations et de troubles. Le système éducatif malien est tombé dans un état calamiteux très avancé : sorties intempestives, grèves à répétition, violence dans l’espace estudiantin, programmes tronqués, baisse catastrophique des niveaux, années blanches, etc. » Conscients de ces problèmes, le Collectif des Associations musulmanes a décidé d’assumer sa responsabilité pour la défense et la sauvegarde des valeurs de l’école malienne. Il rappelle que l’Etat doit remplir toute sa mission, tout son rôle dans la gestion de l’école. Il a indiqué, en propos prémonitoire, que l’Etat ne doit pas prendre des engagements qu’il ne peut pas honorer. L’association estime que les pouvoirs publics et les syndicats doivent se ressaisir. Elle « dénonce les comportements anti-pédagogiques qui ternissent l’image de l’éducateur : à savoir le refus d’évaluer et la rétention des notes… fustige l’intolérable démission grandissante de l’environnement familial face aux enfants. » Elle exige instamment du gouvernement et des syndicats, des mesures diligentes pour la reprise immédiate des cours dans nos écoles.
B.D.
Réactions des participants au meeting des Associations musulmanes
Au cours du meeting improvisé des Associations musulmanes, nous avons eu le temps de tendre notre micro à des participants avant que la situation ne dégénère. Lisez leurs réactions !
Mohamed Kimbiri, Leader religieux
Les enfants ont composé pendant le premier trimestre, les notes n’ont pas été corrigées, souvent certaines notes sont même restées au niveau des directions, donc, le deuxième trimestre vient de s’achever. Il y a le refus d’évaluer, la rétention des notes, le gouvernement ne joue pas franc jeu, nous, en tant que société civile, nous devons jouer notre partition dans cette affaire pour dire la vérité aux enseignants et au gouvernement : trop c’est trop ! L’avenir de nos enfants est au dessus d’un poste ministériel ou d’un droit syndical. Nous avons un plan B. Aujourd’hui, ce n’est qu’une première sortie et le jour où on appliquera le plan B, le Mali saura qu’il a une société civile forte.
Chiaka Coulibaly, Leader du Mouvement Associatif des Personnes Handicapées
Je suis sorti aujourd’hui pour montrer ma solidarité contre toutes les injustices qui prévalent aujourd’hui, au Mali et aussi, à cause du risque d’année blanche qui se profile à l’horizon. Nous voyons que depuis la rentrée jusqu’à la date d’aujourd’hui, pratiquement, nos écoles sont fermées, donc on pense qu’à un moment donné, il y a risque d’année blanche.
Quels sont les problèmes que les handicapés ont récemment rencontrés ?
Le 11 mars, le Groupement des personnes handicapées a voulu rencontrer le Premier ministre qui nous avait accordé un entretien et au vu de cet entretien, il avait promis des choses concernant les revendications des personnes handicapées, surtout le volet emploi des personnes handicapées. Comme il nous avait donné 72 heures pour régler le problème, au mois de juillet, on a attendu jusqu’au mois de mars et le 11 mars, on était parti pour lui rappeler ses engagements. On a trouvé qu’il y avait pratiquement l’armée malienne qui était à la porte et nous avons été accueillis par des jets de gaz et une brutalité sans nom parce qu’on a saccagé des motos des personnes handicapées, des casques, on a même eu beaucoup de blessés dans nos rangs et la violence était telle que je pense qu’il y avait l’intention de tuer des personnes handicapées. Imaginez que parmi les personnes handicapées, il y a des personnes qui ont des problèmes de peau, des personnes qui ont des problèmes de vision, des aveugles, il y a des personnes qui ont des problèmes de respiration, donc, quand on leur envoie des gaz, l’intention était de les tuer. Il y a même des personnes handicapées qui étaient couchées et qui ne pouvaient plus bouger, parce que n’ayant pas usage de leurs jambes, mais, on a jeté des gaz entre leurs jambes, donc, vraiment, c’était pour les tuer.
Abdoulaye Doucouré, Coordinateur du Mouvement Initiative Citoyenne Indépendante du Mali
On est là dans le cadre de la grande mobilisation, car tout le monde sait qu’au Mali, ça ne va pas. Plus particulièrement à l’école. Il y a à peu près trois mois que les élèves et les enseignants sont à la maison et nous sommes là aussi, pour les crises sécuritaires au Mali et pour informer l’opinion nationale et internationale concernant les problèmes qui sévissent actuellement au Mali. Ce soir, toutes les associations se sont réunies dans le but d’informer la population sur la situation et dénoncer certains faits de nos gouvernants qui sont en train de créer la mésentente entre les élèves et les étudiants. A propos de la situation sécuritaire, on ne peut pas comprendre au Mali, que tout le monde sache que la situation est dégradée, actuellement et qu’on voit certains responsables militaires, fêter, soi-disant, leur anniversaire. On est sorti pour dénoncer tous ces cas et le président Ibrahim Boubacar Kéita doit faire face à ces problèmes.
Mme Maiga Azahara Maiga, Membre fondatrice de « l’Association SOS Ecole Malienne »
On a créé un mouvement qui se nomme « SOS Ecole Malienne » c’est par rapport à la crise, donc on a décidé de faire ce mouvement uniquement pour sauver l’école malienne et c’est dans le cadre de l’écoute de nos religieux aujourd’hui, en fait, c’est pour que nos enfants rentrent à l’école. Je crois que ça va avoir de l’influence, je crois que le gouvernement aura pitié de nous, les mamans et faire quelque chose. Je crois aussi que les enseignants doivent avoir pitié des enfants, parce que si les enfants sont dans la rue aujourd’hui, c’est très dangereux, si on voit les petits enfants former des groupes, faire des grèves, parce qu’il n’y a pas d’école… les enfants sont inconscients, car, pour eux, la grève, ça leur permet de s’amuser, ils ne comprennent rien pour le moment, c’est dans l’avenir qu’ils vont comprendre. Je demande au gouvernement et aux enseignants de tout faire pour mettre fin à cette grève, ça n’arrange personne
Mamadou Moustapha Diop, parent d’élèves
J’ai reçu un message sur les réseaux sociaux qui nous invite à répondre à un rassemblement concernant la grève des enseignants. Je paie l’année scolaire pour mes enfants, j’ai quatre enfants, dont que je paie les études, chaque année. J’ai compris que cette année, j’aurais payé pour une année blanche. Et que je serais obligé de payer encore une seconde fois, en tant que parent d’élève, je trouve ça un peu trop. Je suis sûr et convaincu que leurs établissements ne vont pas enseigner gratuitement l’année prochaine, ils ne vont pas m’accorder cette faveur. Je suis invité à sortir par rapport à ça et je dois répondre à cet appel. J’avais moi même cette initiative d’appeler les parents d’élèves pour qu’on sorte, pour dire que l’année scolaire est finie, que nous sommes au mois de mars, puis avril mai, juin, l’école est finie. Or il n’y a pas eu d’école, depuis l’ouverture des classes. Celui qui était en sixième va redoubler, on a payé la sixième, cette année, on va la payer l’année prochaine aussi. Que les autorités et ceux qui détiennent le pouvoir regardent les enseignants, car, ils ont un droit de regard sur leur situation, qu’ils cherchent la solution de façon immédiate.
Alfousseini Haïdara, société civile
Tout le monde voit les difficultés actuelles du pays. Même le président sait qu’il est incapable de diriger le pays. Depuis qu’il est arrivé au pouvoir, il n‘a pu trouver la solution aux problèmes. L’alimentation l’école, le carburant, tout est resté sans solution, il y a aussi la corruption. J’ai voyagé en Afrique et je suis né au Mali, à Ségou. Je ne suis pas satisfait de la manière dont les choses sont conduites au Mali. Si le président sait qu’il n’a plus de solution, qu’il s’approche des gens et qu’il fasse partir Boubèye, puisque c’est la masse qui le lui demande, même les religieux ont parlé. S’il ne le fait pas de gré il le fera d’une manière compliquée.
Adama Ben Diarra, Porte-parole du Mouvement On a Tout Compris
Nous avons répondu à l’appel des associations musulmanes parce que nous estimons que la cause est très noble, patriotique et hautement citoyenne parce que l’éducation étant un droit constitutionnel, en l’article 7 de la constitution du Mali, si ce droit constitutionnel est violé au vu et au su de tout le monde et que les enfants ne sont plus sur le chemin de l’école, nous pensons que c’est plus qu’une nécessité, que de se mobiliser pour cette cause. La deuxième raison, c’est pour que la gouvernance du pays puisse changer, parce que tous les secteurs sont paralysés. Partant de cette mauvaise gouvernance, nous pensons que c’est seulement la mobilisation du peuple qui peut faire que les dirigeants feront le choix de leur peuple, qu’ils puissent aller dans le sens de l’écoute du peuple. La crainte de l’année blanche est très visible, conformément aux textes du CAMES, on peut dire qu’on n’est pas très loin de l’année blanche, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle, nous sommes là pour exiger que nos enfants reprennent la classe, au-delà de ça, nous estimons qu’aujourd’hui, le système éducatif malien a montré toutes ses limites. Il faut aller vers une réforme profonde du système éducatif pour l’adapter aux réalités socio-économiques et professionnelles de notre pays.
Cheikh Ahmed Siby, représentant du Chérif de Nioro
Boubèye est à la base de tous les problèmes : la mort des militaires, l’insécurité au centre, l’injustice aussi, c’est pourquoi le Chérif de Nioro avait demandé que Boubèye ne soit pas nommé. Si on nous appelle, c’est pour que nous réclamions le départ de Boubèye, sinon, il ne faut pas nous appeler.
B.D.
Source: Canard Déchainé