Durement éprouvé par une longue période d’instabilité politique et sécuritaire, le Mali a tenté en 2013 d’amorcer un retour vers la normalisation après plusieurs mois de crise née du putsch de mars 2012, ayant précipité la chute du nord du pays aux mains de groupes armés, chassés par la suite par une intervention militaire franco-africaine.
Le Mali aura réussi durant cette année le pari d’organiser des élections présidentielle et législatives en quelques mois seulement, un exploit pour ce pays du Sahel de 14 millions d’habitants mis à mal par un conflit armé interne et une situation sécuritaire régionale des plus inquiétantes. Les autorités maliennes sont parvenues à étendre leur souveraineté sur pratiquement l’ensemble du territoire et à mettre en place de nouvelles institutions élues, mettant ainsi fin à une crise institutionnelle qui a failli plonger le pays dans le chaos. Le putsch de mars 2012 ayant renversé l’ancien président, Amadou Toumani Touré avait entraîné un vide constitutionnel, ouvrant la voie à toutes les incertitudes. Cette situation avait profité aux groupes armés qui avaient pris le contrôle du nord du pays et tenté dans la foulée de progresser vers la capitale Bamako. En janvier dernier, des forces françaises fortes de 4.000 hommes sont intervenues dans le Nord pour déloger les groupes armés dans le cadre de l’opération Serval. Elles ont été appuyées par la suite par les troupes de la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (Misma), composées d’environ 6.300 soldats d’Afrique de l’Ouest et du Tchad. Après la reprise du Nord, la Mission intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma), a pris en juillet le relais de la force panafricaine.
Des élections pour mettre fin à la gabegie
Les nouvelles autorités maliennes, à leur tête le président de transition, Dioncounda Traoré, s’étaient fixées pour objectif d’organiser de nouvelles élections pour en finir avec le désordre politique qui régnait dans le pays. Mais pour tenir un quelconque scrutin, il fallait rétablir la sécurité dans l’ensemble du pays, et résoudre la question de Kidal (nord-est) où le Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA) avait refusé le déploiement de l’armée malienne en vue de l’élection présidentielle. Armée et rebelles s’étaient même affrontés, les combats faisant plusieurs morts. Le 18 juin, après deux semaines de négociations, le gouvernement transitoire et les rebelles du MNLA et du HCUA (Haut conseil pour l’unité de l’Azawad) signent à Ouagadougou un accord de cessez-le-feu sensé permettre la tenue de la présidentielle le 28 juillet à Kidal sous contrôle des groupes armés touareg. L’accord a permis à l’armée malienne d’entrer à Kidal le 5 juillet et, le 28 juillet, le premier tour de l’élection présidentielle était organisé sans grands incidents, mais il a fallu attendre le deuxième tour pour connaître le vainqueur. Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, est élu président avec 77,61% contre 22,4% pour son rival Soumaïla Cissé. L’élection de M. Keïta, investi le 4 septembre, a été saluée par la communauté internationale comme une étape importante pour la reconstruction du pays. Quatre mois plus tard, c’est au tour des élections législatives de se tenir, dont le second tour a eu lieu en décembre. Elles ont été remportées par le parti du président IBK et ses alliés.
Bamako face à des défis politique et sécuritaire
La réussite de ces élections réussie au Mali, même si elle est de bon augure pour l’avenir, ne dissipe pas pour autant les défis auxquels fait face le pays notamment sur les plans politique, sécuritaire et économique. L’armée malienne, en manque d’effectifs, est incapable, aux yeux des observateurs, d’assurer la sécurité dans tout le pays, et les opérations de formation lancées par la mission de l’Union européenne au Mali (EUTM) tardent à se concrétiser sur le terrain. Kidal, fief de la rébellion touareg du MNLA, échappe toujours au contrôle de l’Etat malien qui ne parvient pas à rétablir la sécurité dans la totalité des zones nord et doit encore compter sur les forces françaises et onusiennes. Des analystes estiment que tout règlement au Mali doit d’abord prendre en considération la question du Nord qui est la base de toute solution. Cette solution, souligne-t-on, doit être politique dans le cadre d’un dialogue inclusif, et tout en apportant des réponses aux attentes de la population du Nord, notamment en matière de développement et de partage des richesses. Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-Moon a déploré récemment «le retard que connaît» le processus politique entre le gouvernement malien et les groupes armés, affichant son «inquiétude à propos de la situation sécuritaire dans le nord du pays». La tâche s’avère compliquée : les rébellions touareg et arabe avaient annoncé fin septembre qu’elles suspendaient les négociations avec le gouvernement malien portant sur les territoires du Nord, ou vivent ces deux communautés, ce qui fragilise les perspectives d’une paix durable au Mali.
L’économie : l’autre front
Au plan socio-économique, le nouveau gouvernement aura la lourde tache de reconstruire un pays exsangue, affaibli par des mois d’instabilité, qui ont entravé les efforts de développement et attisé les divisions, en particulier entre les différentes communautés ethniques du pays. Le Premier ministre malien, Oumar Tatam Ly, a annoncé en novembre le lancement prochain d’un plan d’urgence pour la réhabilitation des trois régions de la partie septentrionale du pays, dont le coût est estimé à 11 milliards de FCFA. Ce plan porte sur la sécurisation totale du pays, la restauration de l’autorité de l’Etat, la refondation de l’école et l’édification d’une économie forte entre autres. La communauté internationale a promis de son côté une aide de plus de trois milliards d’euros pour soutenir le Mali à se relever.