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Malgré le chaos, la Centrafrique prépare les élections

De violents affrontements intercommunautaires ont lieu depuis jeudi 20 août dans les environs de Bambari, au centre de la République centrafricaine (RCA). Ces heurts font suite au meurtre d’un jeune musulman, abattu par un groupe identifié comme anti-balaka (miliciens d’autodéfense majoritairement chrétiens). Le bilan provisoire des représailles fait état de 15 morts et 20 blessés. Ces violences démontrent l’instabilité qui prédomine toujours en RCA, alors que les Centrafricains sont appelés, à l’automne, à approuver le projet de Constitution, puis à choisir leurs représentants. Mais l’organisation d’élections libres et transparentes relève du défi, tant la situation sécuritaire reste précaire.

presidente transition Catherine Samba Panza centrafrique

Ces élections, initialement prévues en novembre 2014, ont été par deux fois ajournées. Sous la pression de la communauté internationale, les autorités ont finalement fixé au 18 octobre le premier tour des législatives et de la présidentielle.

Alors que l’échéance se rapproche, aucune candidature n’a encore été validée par les autorités centrafricaines. Supposé s’ouvrir le 9 août, le dépôt des candidatures a été reporté sine die, faute de découpage électoral, et en attendant l’adoption des dispositions dérogatoires au code électoral de 2013. « Il n’y a pas vraiment de campagne, pas de candidats qui viennent s’exprimer », note Lewis Mudge, de l’ONG Human Rights Watch, après avoir passé trois semaines dans l’est du pays.

« Zones rouges »

La sécurité, nécessaire au recensement et au processus électoral, est loin d’être rétablie. Celle-ci « s’améliore partiellement dans la capitale, et en général dans l’ouest, mais reste volatile dans le reste du pays », note le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) de l’ONU. D’est en ouest, il existe de facto des « zones rouges », où se multiplient les braquages et les extorsions. « Est ce que les gens vont oser sortir de la brousse et aller en ville, après une année où les villages ont été brûlés ou des membres de leur famille ont été tués ? s’interroge Lewis Mudge. Pour aller en ville, il faut marcher une quinzaine, voire une vingtaine de kilomètres. »

Dans le centre du pays, la Séléka (milice à dominante musulmane, qui avait pris le pouvoir à Bangui en mars 2013, avant d’en être chassée l’année suivante), aujourd’hui divisée en quatre groupes armés, règne sur la province de Ouaka. Mais ce sont les miliciens anti-balakas, tenant Bouca, plus à l’ouest, qui inquiètent le spécialiste : « Ils circulent en plein air avec leurs kalachnikovs. Les femmes accusées de sorcellerie sont tuées et les gens qui ne paient pas les anti-balakas voient leur village brûlé ». Dans l’Ouest anti-balaka, les camions sont régulièrement attaqués sur l’axe commercial Bangui-Garoua-Boulaï, principal chemin d’approvisionnement du pays, si bien que les chauffeurs camerounais ne prennent plus la route, entraînant la pénurie de certains produits dans la capitale.

A Bangui, l’OCHA constate également une augmentation de la délinquance et de la criminalité. Les tensions entre la population et les forces onusiennes sont récurrentes dans la capitale. Le 2 août, un casque bleu a été tué lors d’un affrontement dans le quartier de PK5. Le scandale des accusations de viols à l’encontre des forces françaises et des membres de la mission de l’ONU en Centrafrique (Minusca) ne contribue pas à apaiser la situation. Le 12 août, Babacar Gaye, chef de la Minusca depuis 2013, a été contraint à la démission sur fond d’accusations d’abus sexuels, d’un viol et d’un double-homicide commis par des casques bleus. A moins de trois mois de l’échéance prévue pour les élections, il a été remplacé par le Gabonais Parfait Onanga-Anyanga, sans expérience du terrain centrafricain.

« Je pense que ça n’est pas raisonnable d’avoir des élections législatives et présidentielle dans un contexte de guerre », estime Lewis Mudge. A l’absence de sécurité s’ajoutent des retards en cascade dans l’organisation des élections. Depuis l’officialisation du calendrier électoral, le 19 juin, l’Autorité nationale des élections (ANE) centrafricaine rencontre nombre de difficultés dans le processus de recensement. Les agents de l’ANE n’ont démarré leur mission que le 26 juillet, dans l’ouest de la Centrafrique, alors que les opérations de recensement devaient s’achever le lendemain au plus tard.

La capitale est désignée comme responsable de ce retard. Les habitants de Bangui ont longtemps boudé les 470 agents de recensement déployés dans la ville. Si bien que l’ANE a dû prolonger de deux semaines les opérations et organiser une campagne de sensibilisation de la population d’environ 600 000 habitants pour recueillir 314 000 inscriptions sur les listes électorales. Contacté par Le Monde, le président de l’ANE, Dieudonné Kombo-Yaya, estime que « le retard de Bangui s’est légèrement répercuté sur le reste du pays ». Aujourd’hui, le recensement des citoyens de l’est du pays commence avec près d’un mois de retard.

La question des déplacés

Les agents de l’ANE sont également tenus de recenser les 460 000 réfugiés et les 368 000 déplacés centrafricains. D’abord écartés du processus démocratique Conseil national de transition (tenant lieu de Parlement), pour des raisons de coût, ils sont finalement appelés à participer aux scrutins. Le 20 juillet, la Cour constitutionnelle a réaffirmé le droit de vote des réfugiés centrafricains établis au Tchad, au Cameroun, au Congo et en République démocratique du Congo.

Mais, note Lewis Mudge, « les élections ne sont pas la priorité [des déplacés]. Ils cherchent à manger, à boire et à éviter le paludisme ». Malgré les 2 millions d’euros versés par la France le mois passé, les organisateurs des élections manquent de ressources. Dieudonné Kombo-Yaya le reconnaît : « Nous avons de sérieux problèmes de financement, il nous manque environ 8 milliards de francs CFA [12 millions d’euros] » pour organiser de manière optimale les élections de l’automne.

Deux mois après la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC) du 25 mai, le chef d’Etat gabonais Ali Bongo, président en exercice de la CEEAC, vient de signer l’acte de prorogation du régime de transition centrafricain jusqu’au 30 décembre. La CEEAC et ses membres influents accordent encore quatre mois de répit à la présidente de transition Catherine Samba-Panza pour organiser ces élections législatives et présidentielle.

Source: lemonde.fr

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