Les premiers observateurs africains sont arrivés au Soudan du Sud. Envoyés par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (Igad), ils sont chargés de voir où en est l’application du cessez-le-feu signé le 23 janvier dernier à Addis-Abeba par le gouvernement et les rebelles de Riek Machar. Si, depuis, les violences ont diminué, des affrontements sporadiques ont éclaté malgré l’accord.
Les observateurs de l’Igad arrivent au Soudan du Sud dans un contexte encore très tendu. Ce dimanche encore, les rebelles ont affirmé que l’armée avait repris Leer, la ville natale de leur chef Riek Machar, située dans l’État d’Unité. « Les hommes du président Kiir ont détruit la ville. Nous nous sommes repliés pour épargner la population », a déclaré un porte-parole rebelle.
Les habitants ont fui la zone en masse samedi devant la menace d’une attaque loyaliste. Face à l’insécurité, les employés de Médecins sans frontières ont de leur côté évacué totalement l’hôpital de Leer pour se réfugier en brousse, transportant avec eux plusieurs dizaines de patients, les plus gravement blessés. Du côté de l’armée, le porte-parole a affirmé ce dimanche ne pas être au courant d’une opération dans ce secteur et assuré que le pouvoir respecterait le cessez-le-feu.
La trêve signée le 23 janvier est donc bien mal en point. Alors qu’elle n’était même pas encore officiellement en vigueur, les rebelles accusaient déjà l’armée de mener des attaques. Le lendemain, c’était au tour du pouvoir de lancer les mêmes accusations.
La tension avait continué à monter, surtout dans l’État pétrolier d’Unité, presque entièrement conquis par les rebelles fin décembre.
Même si l’intensité des combats a baissé depuis l’accord du 23 janvier, la persistance des violences hypothèque la reprise des pourparlers prévue officiellement le 7 février.
Le maire de Bor accuse les rebelles de « génocide »
Les observateurs de l’Igad doivent notamment se pencher sur les situations de Juba, Bentiu, Malakal et Bor. Bor, dans l’État de Jongleï, au nord de la capitale, tente de panser ses plaies après de sanglantes batailles entre les deux camps. Son maire, Nhial Majak Nhia, parle d’un génocide :
« Nous appelons la communauté internationale à venir constater l’horreur, les massacres et le génocide perpétrés à Bor. Il faut que les responsables de ces crimes contre l’humanité soient punis. Donc nous rassemblons des preuves, des témoignages montrant les meurtres de femmes, d’enfants, de vieux, dans leurs maisons ou à l’hôpital.
C’est ma priorité. Avant d’enterrer ces victimes massacrées par les rebelles, il faut identifier les corps pour montrer que ce sont les plus vulnérables qui ont été tués. Ensuite nous devrons réparer les dégâts. La ville est à terre. La plupart des bâtiments sont détruits, tout a été pillé, il n’y a plus de nourriture. Donc j’appelle les agences humanitaires à l’aide.
J’ai parlé de génocide parce que les habitants dinkas ont été visés par les forces de Riek Machar et assassinés dans leurs maisons. Pour moi, c’est un génocide. Mais le problème de fond n’est pas tribal, il n’est pas entre les Nuers et les Dinkas. Tous les Nuers ne sont pas ennemis des Dinkas. J’appelle les groupes du Soudan du Sud à rester unis, à ne pas viser une communauté. Parce que les horreurs qui se sont déroulées à Bor ne doivent pas se reproduire ailleurs. »
RFI