« Le FMI ne nous intéresse pas… Si l’Etat malien ne paie pas, on le poursuit »
Me Kassim Tapo et Me Malicky Ibrahim Mohamed représentant les intérêts de la Société Guo-Star ont animé, samedi dernier, une conférence de presse au cabinet de Me Tapo sis à Bamako-Coura. Pas de place à la langue de bois.
De l’avis de Me Malicky Ibrahim Mohamed, « Guo Star, une filiale de l’Etablissement Kouma, exécute depuis 1997, les marchés d’équipements des forces armées maliennes. La société est également sollicitée dans beaucoup d’autres pays. Et elle possède de nombreuses banques partenaires ». A l’heure actuelle, poursuit-il, le marché malien relatif à la fourniture d’équipements militaires et à l’origine de beaucoup de bruits, a été exécuté à plus de 85% et l’Etat malien n’a déboursé le moindre sous. «L’atteste Un constat d’huissier établi à la date du 20 octobre 2014 par le cabinet de Me Doucouré », a renchérit Me Tapo. Et de poursuivre : « 400 conteneurs sont sur place et pas un seul ne manque. L’Etat a reçu la marchandise. Il doit donc payer».
Aux dires de Me Tapo, «l’on doit d’ailleurs saluer le patriotisme des différents intervenants… Les banques partenaires ont pu mobiliser 40 milliards F CFA sans bourse déliée de l’Etat du Mali… Le Ministre de la défense a été exemplaire… »
«Ce n’est pas un hasard, ajoute-t-il, si Guo Star est dans ce marché». Et de préciser plus loin que«Guo Star n’a rien à voir avec Sidy Mohamed Kagnassy lequel n’est ni actionnaire, ni responsable de la société », même si, reconnait-il plus loin, « M Kagnassy a été doublement mandaté et par Kouma et par l’Etat malien pour signer le protocole d’accord ».
La lettre de garantie de 100 milliards du Ministère des Finances, souligne-t-il, n’avait que pour but de sécuriser la procédure. Rien d’autre !
De surfacturation ? Point, estime l’ex-Bâtonnier. « C’est nous qui avions donné le prix fournisseur… La surfacturation n’existe pas dans le cadre d’un marché libre… Qu’on nous montre un texte réprimant la surfacturation ! Le reste n’est que fantasme… ».
« Surfacturation ? Mais par rapport à quoi», s’interroge Me Malicky Ibrahim ? Les 29 milliards F CFA d’écart, à ses dires, représentent bien les frais bancaires et autres charges d’approche supportés par son client.
Selon Me Tapo, les textes en la matière sont clairs. «Les prix des biens, produits et services sont libres sur toute l’étendue du territoire national et sont déterminés par le seul jeu de la concurrence.
Toutefois, dans les secteurs économiques et dans les localités où la concurrence par les prix est limitée, pour quelque raison que ce soit, dans les situations de crise ou dans les cas de hausse excessive sur le marché, le gouvernement peut, par décret pris en conseil des Ministres, réglementer les prix ou les fixer. Il peut également fixer les prix dans le cadre de conventions appropriées» (Ordonnance 07025 PRM du 18 juillet 2007 – Art.3.-Titre 2 – De la liberté des prix).
Aux dires de Me Malicky, Guo Sarl s’est d’ailleurs avéré moins-disant. Et c’est la même société qui a livré le matériel de l’armée malienne pendant la transition.
Revenant à la charge, Me Tapo persiste et signe : «Le FMI n’a aucun diktat à nous faire… Notre problème ce n’est pas le FMI qui ne nous intéresse pas. Ce sont les 69 milliards et on ne renoncera pas à un centime. Aussi, la Cour suprême n’a jamais dit de ne pas payer. Si l’Etat malien ne paie pas nous l’attaqueront ».
Le marché de Guo SARL a-t-il été annulé comme tous les autres et conformément à l’annonce fait par le ministre de Défense ? « Jamais, s’insurge, Me Tapo. Le marché de Guo Star n’a pas été annulé. C’est clair et net : nous ne sommes pas concernés par les annulations. Pas question d’annuler impunément ce contrat».
B.S. Diarra
Et pourtant!
Les arguments juridiques des conseils de GUO-SARL sont certes éloquents, mais autant convaincants, de l’avis de certains spécialistes. Et pour cause.
Ayant, quand même bien à sa disposition, le rapport provisoire du Vérificateur Général (qu’il n’aurait pas du avoir, a-t-il précisé), Me Tapo s’est abstenu de faire le moindre commentaire sur le contenu du document en question. En tout état de cause et à ses dires, «les cas de surfacturation [évoqués par le fameux rapport]n’existent pas… C’est nous qui avions donné le prix fournisseur… La surfacturation n’existe pas dans le cadre d’un marché libre…».
Pour sa part, Me Malicky s’interroge : « Surfacturation ? Mais par rapport à quoi… ». Les 29 milliards F CFA d’écart, à ses dires, représentent bien les frais bancaires et autres charges d’approche supportés par son client.
Récapitulons : il n’y a pas surfacturation pour la simple raison que le marché est libre et parce que, a-t-on dit, il n’existe aucun comparatif (Surfacturation ? Mais par rapport à quoi… ?).
Et pourtant, dans son rapport provisoire, le VEGAL parle bien de cas de «surfacturation». Qu’en est-il réellement ?
La réponse à la question de Me Malicky se trouve dans celle de son confrère Me Tapo. En somme, si la question avait été adressée au Vérificateur Général, il aurait certainement répondu ceci : par rapport aux prix (factures proforma) livrés par le fournisseur lui-même. En clair, dans son rapport provisoire, le VEGAL a établi une comparaison entre les montants de facture proforma du fournisseur et les montants, par lui, réellement facturés (voir fac-similé). Et c’est l’écart entre les deux montants qu’il attribue à la surfacturation.
Mais que vaut une facture proforma ? Son montant est surtout indicatif mais toujours égal ou inférieur au prix réel actualisé, du moins, selon les spécialistes en la matière que nous avions interrogés.
L’Ordonnance 07025 PRM du 18 juillet 2007 évoquée par Me Tapo, précise en outre, en son article 7 que «le prix d’achat effectif est le prix unitaire figurant sur la facture majoré de toutes les taxes afférentes à cette revente et du prix du transport » (Titre 2 – De la liberté des prix. Art.3.».
Alors, soutiennent nos spécialistes, «la facture proforma, ne peut –être que le reflet de la facture réelle puisque censée englober toutes les charges inhérentes à la marchandise. Ce n’est qu’à ce prix, qu’elle (la facture pro forma) s’avèrera crédible et indicative».
Bien entendu, un texte de loi ne vaut que par l’interprétation qu’on en fait. Me Tapo et son confrère n’étant pas de la dernière pluie, l’on suppose à raison, qu’ils ont une autre interprétation des mêmes textes. C’est dire qu’on est bel et bien parti pour bataille juridico-judiciaire.
B.S. Diarra
Me Tapo, par rapport aux déclarations du PM Moussa Mara
«De la farce !»
Le Premier Ministre Moussa Mara a annoncé, la tenue prochaine de «grands procès » en rapport avec les dossiers dits de surfacturation et de passation de marchés de l’Etat. Qu’en pense donc Me Tapo, conseil de Guo-Star ?
« Qu’est-ce qu’on fait de la séparation des pouvoirs ? Ne jouons pas à la farce. Un procès n’est pas une farce», a-t-il indiqué.
Et par rapport à l’avion présidentiel, Me Tapo répond : «Je ne suis pas l’avocat du président de la République. Mais en tant que citoyen, je dirais qu’on a autre chose à faire que de parler d’avion. Je ne suis pas payer pour le dire, mais je dis, ça suffit ! »