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Le syndicalisme dans le monde enseignant : Appel à l’Union et à l’Unité

Etre enseignant au Mali, ne fait pas bonne presse, tant ce corps est victime d’énormes stéréotypes et de préjugés. Comme exemple d’illustration, on entend certains parents dire à leurs enfants diplômés à la recherche d’emploi ceci : «Au lieu de t’asseoir et ne rien faire, tu ferais mieux de te trouver une école privée pour donner des cours avant de te trouver un bon boulot».

 

 enseignant ecole enfants

L’enseignement est donc devenu fonction mal aimée, méprisée, dégradante, voire répugnante par la population dans sa grande majorité. On sollicite les services de l’enseignant, mais peu, sont ceux-là qui le servent, ou, qui, embrassent par amour et de façon volontaire le métier d’enseignant de nos jours. Beaucoup sont devenus et deviendront enseignants par défaut. On s’y contente en attendant de trouver mieux.

Les autorités des deuxième et troisième Républiques ont largement contribué à cultiver et à entretenir une telle image. Le régime militaro-fasciste, dirigé par Moussa Traoré (1968-1991), a décrédibilisé et vilipendé ce corps par le retard chronique du paiement des salaires (trois à quatre mois sans salaire). L’enseignant devenait ainsi aux yeux de la population, l’insolvable, le dernier des fonctionnaires, jusqu’à ce que certains propriétaires de maisons lui refusaient la location, et que des parents refusaient de lui donner leurs filles en mariage. Avec Alpha Oumar Konaré (1992-2002), ce fut le comble.

 

Au nom d’une éducation de masse, la qualité fut sacrifiée. N’importe qui (des diplômés n’ayant pas le profil, des sans diplômés, des individus n’ayant même pas le niveau de la 8eme année fondamentale), étaient tous acceptés pour exercer le métier d’enseignant.

 

Face à la dévalorisation, à la clochardisation du métier d’enseignant, à la gestion calamiteuse des écoles par les collectivités décentralisées, à la baisse catastrophique des niveaux, à l’ouverture anarchique d’écoles privées échappant à tout contrôle, à des pratiques malsaines et dégradantes qui se passent dans l’espace scolaire et universitaire (trafic de notes, notes sexuellement transmissibles, l’érection de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) en mafia, etc.), les syndicats d’enseignants doivent se sentir interpellés.

 

 

Qui mieux que les enseignants, précisément leurs syndicats doivent comprendre que l’école, qui est leur raison d’être, est sérieusement menacée ? A cet effet, les syndicats d’enseignants doivent s’assumer afin de sauver l’école de la déchéance.

 

 

Cependant, pourront-ils relever ce défi dans la désunion sur fond de mésentente et de rivalité? Au niveau des trois ordres d’enseignement, on compte douze (12) syndicats au public : Quatre (04) au fondamental (SNEC, SYLDEF, SYNEB et SYNEFCT). Huit (08) au secondaire (SYNTES, SNEC, SYNESEC, SYNESTP, SYPESCO, SYNTEC, SYNAPEF, SYPESCA, deux au supérieur (SYNESUP, SNEC),deux (02) Fédérations (FEN, FENAREC), une (01) Coordination (C0SES), et un (01) Collectif en gestation.

 

A noter que le SNEC évolue au niveau des trois ordres. A qui profitent cette pléthore et cette prolifération anarchique ? Avec une telle déchirure, l’énormité de forces dont disposent les syndicats d’enseignant est semblable à un colosse aux pieds d’argile. Il est grand temps que les dirigeants des syndicats d’enseignant se ressaisissent en mettant au-dessus de tout l’intérêt supérieur des enseignants et de l’école.

 

Cette rivalité entre leaders syndicaux est une grande perte pour le monde enseignant, car contribue à la dispersion des forces. Par exemple, quand un syndicat X est en grève, les syndicats Y et Z sont en classes. Or tout ce que l’un des syndicats obtient, cela est octroyé aux autres car les problèmes demeurent les mêmes. Alors pourquoi ne pas harmoniser les positions en formant un seul syndicat qui puisse répondre au nom de tous les enseignants ? C’est à ce prix que la revalorisation de la fonction enseignante cessera d’être un leurre pour devenir un jour une réalité.

 

Il faut arriver à taire les divergences et les querelles de leadership qui ne profitent nullement au monde enseignant. A quoi bon de se calomnier, de mentir sur l’autre, de se tirer dans le dos ? Travailler en vue d’un rapprochement, voire d’une unité est un impératif. On n’est jamais assez fort tout seul, l’union fait la force.

La promotion du leader syndicaliste n’est pas condamnable, car avant d’être syndicaliste, le syndicaliste est d’abord un travailleur, et en tant que travailleur, chacun a droit à la promotion. Mais cela doit se faire dans les règles de l’art, c’est-à-dire, selon la compétence et le mérite. Par exemple, enclencher un mouvement de grève, mettre la pression sur les pouvoirs publics par le chantage ou l’intimidation, et profiter pour se faire une part belle est condamnable, malhonnête et indigne de la part d’un leader syndical. Alors que le syndicalisme ne soit pas pour les dirigeants un escalier pour l’ascension, c’est-à-dire, un moyen de promotion, mais qu’il soit un instrument au service de l’amélioration des conditions de travail et de vie des militants.

 

L’Apôtre Paul enseigne : «Que personne ne cherche son propre intérêt, mais celui d’autrui». Alors, il est temps que les dirigeants syndicalistes acceptent d’enterrer les haches de guerre, en se pardonnant et en laissant tomber toutes les vieilles rancœurs.

 

David Augsburger écrit : «Blesser quelqu’un vous place au-dessous de votre ennemi ; vous venger de la blessure vous met à son niveau, pardonner vous met au-dessus de lui. Celui qui cherche à se venger ressemble à celui qui se tire une balle afin de frapper son ennemi au moyen du contre coup de son pistolet. La vengeance est l’arme la plus inutile. Elle ruine le vengeur, tout en confirmant plus fermement encore l’ennemi dans son tort. Elle amorce une escalade sans fin sur l’échelle interminable de la rancœur, des représailles et de la revanche sans pitié».

 

L’heure n’est pas au règlement de compte, car il ne s’agit plus de savoir qui a raison, qui a tort, mais il est tout simplement question de se pardonner et de s’accepter. Ensemble, unis et soudés, les enseignants vaincront et seront capables de faire déplacer même une montagne. Mais cela n’est possible que lorsque les enseignants se donnent les mains. L’Etat se réconforte ainsi dans sa politique de diviser pour mieux régner, et n’hésite pas à exploiter les malentendus et rivalités entre syndicats contre les enseignants.

 

Alors la responsabilité de tous les leaders syndicaux est engagée. S’ils œuvrent réellement pour le bonheur des enseignants, ils doivent pouvoir dépasser leurs rivalités. Si les enseignants ne sont pas aimés et considérés, ils devront pouvoir s’aimer entre eux.

Les autres finiront ainsi par les aimer, les considérer et les respecter. Karl Marx, dans le Manifeste du Parti communiste s’adressait aux ouvriers qui travaillaient dans les usines en ces termes : «Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !». Aux enseignants, disons ceci : «Enseignants du Mali, mettez ensemble vos forces, ne les dispersez pas, mais agissez ensemble !».

 

Halte donc aux mésententes, aux querelles, aux calomnies, aux divisions, aux haines, aux rancœurs, et Vive la Paix, l’Entente, la Cohésion, la Solidarité, la Cordialité, l’Unité et l’Union sacrée entre syndicats d’enseignants. Que Dieu fasse que cet appel et cri de cœur ne tombent dans l’oreille du sourd et que le bon sens prévale au nom du renouveau syndical, pour le bonheur des enseignants et pour le salut de l’école malienne.

 

Sériba KANTE, Enseignant à Bamako

 

 

 Amadou Coulibaly, secrétaire général du SYNEB

 

Bréhima K. Samaké, secrétaire général du SYNTES

 

Maouloud Ben Kattra, secrétaire général du SNEC

 

 

Tiémoko Dao, secrétaire général du SYNESEC

SOURCE: Inter De Bamako
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