Quand un parti politique Sénégalais édifie mieux le peuple malien sur les problèmes de son pays à la place des hommes politiques maliens, à travers un mémorandum du Parti de l’Indépendance et du Travail (PIT/Sénégal).
Aujourd’hui, il semble peu contestable qu’IBK ait atteint ses limites sociales et que son maintien en tant que Président de la République et Chef de l’Exécutif risque de précipiter le Mali dans un gouffre insondable. L’entêtement dont il fait montre ne fera qu’enfoncer davantage le Mali dans la crise sécuritaire et sociopolitique, avec tous les risques de déstabilisation des pays du Sahel que cela comporte.
Les raisons profondes du désamour du citoyen lambda pour la classe politique malienne.(Lisez plutôt)
Afin de mieux comprendre la crise sociopolitique que traverse le Mali, il est important de prendre en compte le fait qu’elle résulte, non pas d’une crise post- électorale, mais de l’incapacité du Président Ibrahima Boubacar Keïta (IBK) notamment de gérer les problèmes sécuritaires que vit ce pays.
Or, la CEDEAO, en réduisant les difficultés du Mali à une « crise électorale », a fait des recommandations ajoutant à la crise sécuritaire et sociopolitique du Mali une crise institutionnelle. En atteste la demande de la CEDEAO de démission de députés, pourtant élus au suffrage universel, avec validation par la Cour constitutionnelle, alors que la même CEDEAO considère illégitime l’exigence de l’opposition malienne de démission du Président Ibrahima Boubacar Keïta, au motif que ce dernier est élu au suffrage universel direct.
Une incohérence qui ne traduit pas que l’ampleur de la crise au Mali, mais révèle aussi l’embarras des chefs d’Etat de la sous-région face aux enjeux de la tragédie malienne.
Globalement, à la suite de la France, la CEDEAO, l’Union Africaine, l’Union Européenne et l’ONU considèrent que le Mali est victime du terrorisme djihadiste international. Un terrorisme qu’il faut éradiquer pour sauver l’Afrique sahélienne et préserver la sécurité de l’Europe, étant donné leur proximité géographique.
Mais, derrière ce bel engagement de solidarité, se cachent de gros intérêts économiques et géostratégiques de la France soutenue par l’Union Européenne (UE) et les Etats-Unis.
Quels sont les intérêts économiques et géostratégiques de la France ?
Bien avant l’éclatement de la crise au Nord Mali, la France a été confrontée, au Niger, à un puissant mouvement citoyen s’opposant à des contrats léonins dans l’exploitation de l’uranium du pays. Un pays qui contribue à hauteur de 40% dans la couverture des besoins en électricité de la France, faisant de celle-ci une puissance militaire nucléaire de rang mondial.
A cette contestation civile, qui déstabilisait dangereusement le Niger, s’était ajoutée une vague d’arrestations et de prises d’otages de travailleurs français et européens d’AREVA, c’est-à-dire de la société qui exploitait l’uranium nigérien. Une situation qui n’a pas manqué de faire réagir l’opinion française. Ce qui a amené l’Etat français à adopter une double stratégie: d’une part, le Gouvernement français, recourant à l’intermédiation des Présidents du Mali et du Burkina de l’époque, Amadou Toumani Touré (ATT) et Blaise Compaoré, a, de façon récurrente, cédé aux pressions des groupes armés, souvent djihadistes, en leur versant des rançons dans le but d’obtenir la libération des otages et, d’autre part, pour rassurer son opinion publique, a déployé des « troupes spéciales » dont les interventions musclées ont causé des dégâts collatéraux avec mort d’hommes, que l’opinion publique française a eu de plus en plus mal à supporter.
C’est bien ce qui avait motivé le Président français d’alors en exercice, Nicolas Sarkozy, à faire les « yeux doux » au Président libyen de l’époque Khadafi. Il s’agissait d’obtenir le soutien de celui-ci contre les groupes armés preneurs d’otages, d’avoir un plus grand accès au pétrole libyen et de faire adouber le projet de « l’Union des Peuples du Pourtour Méditerranéen » au détriment du projet américain de groupement des pays d’Afrique du Nord et du Moyen Orient, appelé « Middle East North Africa » (MENA) par la Banque mondiale et le FMI.
Ne parvenant pas à embarquer Khadafi dans ses projets, (notons que celui-ci s’opposait à toute tentative française ou américaine de détacher l’Afrique du Nord du reste de l’Afrique et s’attelait à matérialiser l’unité économique et monétaire des pays africains regroupés dans l’Union Africaine (UA), Sarkozy profita du «Printemps Arabe» pour susciter des manifestations publiques, fortement médiatisées, en Libye, dans le dessein de convaincre le Président des Etats Unis de l’époque, OBAMA, pour une intervention militaire en vue de renverser le régime libyen .
Une agression contre la Libye qui, en définitive, a permis au Président Sarkozy de faire d’une pierre deux coups :
Accéder au pétrole libyen et envoyer au Nord Mali, à Kidal, avec l’accord de ATT, des Touaregs lourdement armés, anciennement au service de Khadafi, pour contribuer à sécuriser l’exploitation par la France, de l’uranium du Niger.
Ce sont ces Touaregs qui se sont finalement organisés en un Mouvement de libération du Nord Mali, dénommé « Mouvement National de Libération de l’AZAWAD » (MNLA), et qui, en alliance avec des groupes armés islamistes, ont attaqué des garnisons de l’armée malienne, et qui ont, pour faire bonne mesure, proclamé, depuis Paris, « l’indépendance de l’AZAWAD » !
C’est ainsi qu’une crise sécuritaire s’est déclenchée au Mali avec, il faut bien en convenir, la complicité de ATT. En effet, c’est bien ce dernier qui a permis l’entrée à Kidal de Touaregs lourdement armés, même si ce fut sous la férule pleine et entière de la France, dans sa stratégie de défense de ses intérêts économiques au Niger et géostratégiques au Sahel.
Malheureusement pour Sarkozy, le partage du nouveau pouvoir à Kidal conduisit à un affrontement entre les groupes islamistes et le MNLA, le dernier nommé finissant du reste par être contraint à s’exiler au Burkina après avoir subi de lourdes pertes en hommes et en matériels.
Malheureusement, face au massacre de ses soldats, à la débâcle de ses troupes au nord de son pays et aux exactions perpétrées contre de paisibles citoyens, en lieu et place de mobiliser le peuple et toutes les ressources de l’Etat pour libérer le Nord Mali, ATT a préféré se consacrer aux préparatifs de l’élection présidentielle pour s’assurer une succession tranquille, encouragé en cela par la France, l’UE et les Etats Unis. Contre tout bon sens, ATT semblait obnubilé par la conservation du titre de « Président démocrate » que les puissances occidentales lui avaient conféré…
C’est dans ces circonstances que de jeunes officiers, devant ce qu’ils ont qualifié de « haute trahison » de la part du Président ATT, ont décidé de le renverser pour mettre le pays en état de faire face aux groupes armés qui décimaient le Nord du pays.
Ce qui a été interprété par Sarkozy comme une menace contre les projets de la France au Nord Mali, par de jeunes officiers ouvertement nationalistes, et l’a amené à exiger leur départ sans délai, sous couvert du « rétablissement de la légalité républicaine ».
C’est d’ailleurs fort de cet argument qu’il est parvenu à faire bloquer, par la BCEAO, les avoirs de l’Etat du Mali et à faire mettre ce même pays sous embargo, par la CEDEAO.
Dans ce contexte, les militaires furent contraints de négocier, avec la CEDEAO, les conditions de passation du pouvoir aux civils, sous l’égide du Président du Faso, Blaise Compaoré, désigné comme « médiateur », en dépit du fait qu’il ait accueilli chez lui, les rescapés indépendantistes du MNLA à l’origine du déclenchement de la crise sécuritaire au Nord Mali entrainant la crise politique dans ce pays.
Un Président de l’Assemblée nationale fut désigné pour assurer l’intérim de la Présidence de la République et un Premier Ministre nommé, avec l’accord des militaires, leur permettant ainsi de garder un certain contrôle sur le Pouvoir Exécutif.
Il faut dire que le rôle principal que les militaires attendaient de ce pouvoir intérimaire était de réunir les conditions nécessaires à la libération du Nord, alors que, pour la France, il s’agissait de reprendre les préparatifs, interrompus, de la tenue de l’élection présidentielle.
Une France qui est parvenue à faire endosser sa position à l’UEMOA avec à sa tête les Présidents OUATTARA, COMPAORE et WADE, puis à la CEDEAO, à l’UA, à l’UE, et à l’ONU, aux dépens de la lutte pour la libération du Nord Mali.
Le Gouvernement intérimaire fut ainsi pris en tenaille entre ces deux orientations paralysant l’action gouvernementale et donnant le temps aux mouvements armés islamistes parvenus par ce biais à consolider leur pouvoir à Kidal de l’étendre à Gao et Tombouctou.
Ce n’est qu’avec la chute de Sarkozy et l’arrivée de François Hollande au pouvoir, que le sacro-saint principe de « tenue de l’élection présidentielle avant la libération du Nord Mali » fut abandonné par la France, compte tenu des velléités des groupes djihadistes de descendre sur Bamako.
La guerre contre les djihadistes, pour la libération du Nord Mali, devient dès lors la priorité de la France, passant devant l’élection présidentielle, d’où « l’Opération SERVAL », saluée par les militaires et le peuple malien qui, il faut bien le dire, a accueilli le Président Hollande en « libérateur ».
Ce qui fut davantage remarquable, c’est l’adhésion quasi instantanée à ce revirement stratégique de la France par tous les Chefs d’Etat d’Afrique, de l’Europe et de l’ONU, alors qu’ils s’y étaient opposés farouchement lorsque les militaires maliens prônaient une telle démarche.
Il semble ainsi établi que tous ces protagonistes sont davantage favorables à la politique française au Mali qu’aux intérêts du peuple malien à proprement parler.
Une attitude qui confère à la France la place éminente qu’elle occupe dans la gestion de la crise du Mali.
Rôle de la France dans l’aggravation de la crise sécuritaire du Mali
La France a profité de « l’Opération SERVAL » pour ramener, avec « armes et bagages », les indépendantistes du MNLA qui s’étaient réfugiés au Burkina, pour qu’ils participent à la libération de Kidal. Dans le même temps, la France a écarté l’armée malienne pourtant victime au même titre que les populations, des djihadistes du champ d’intervention, au prétexte de vouloir éviter des opérations de vengeance sur ces mêmes populations.
Ce faisant, la France a transformé Kidal en « sanctuaire » entre les mains du MNLA pour en faire un « bouclier », c’est-à-dire un instrument de protection de ses intérêts dans l’exploitation de l’uranium du Niger.
Pour continuer à justifier la présence militaire de la France, le Président Hollande a transmué « l’Opération SERVAL » en « Opération Barkhane », au prétexte de la nécessité de poursuivre la lutte contre les djihadistes dans le Sahel.
C’est dans ces conditions de libération du Nord Mali, sans rétablissement de l’autorité de l’Etat dans cette région, que s’est tenue l’élection présidentielle de 2013, remportée par Ibrahima Boubacar Keïta (IBK). Un IBK fortement soutenu, contre Soumaïla Cissé soupçonné d’être une sorte de cheval de Troie de la France, par les militaires, les partis politiques, la société civile et religieuse attendant tous de lui la restauration de l’autorité de l’Etat à Kidal.
Mais, sous la pression de la France, au lieu d’exiger le désarmement du MNLA et la restauration de l’autorité de l’Etat à Kidal, IBK a accepté l’ouverture de négociations de paix à Alger avec ce mouvement, sous le parrainage conjoint de la France et de l’Algérie, en lieu et place de la CEDEAO ou de l’UA.
En perspective de ces négociations, le MNLA s’allia de nouveau avec des groupes armés issus des djihadistes et créa la « Coordination des Mouvements de l’AZAWAD » (CMA)!
Les accords auxquels ces négociations ont abouti ont été signés après leur validation par la base de la CMA, sans que le gouvernement Malien ne les ait soumis, au préalable, à l’Assemblée nationale du pays.
Ainsi, ceux qui ont porté IBK au pouvoir n’ont eu que leurs yeux pour pleurer en prenant connaissance, par la suite, du contenu des « Accords d’Alger ». Des accords qui, de fait, jettent les bases de la partition du Mali en concédant une « autonomie » aux régions du Nord sous le contrôle de la CMA, et leur balise la voie à l’auto-détermination, avec l’obligation de leur verser 40 % des ressources budgétaires de l’Etat, l’obligation de les consulter pour tout projet d’exploitation minière dans ces régions et cerise sur le gâteau, la recomposition des forces de défense et de sécurité au Nord Mali, dans lesquelles l’Etat Malien ne disposerait que du tiers des effectifs.
Il a fallu à IBK, pour conserver son pouvoir, tout en se livrant à de telles négociations et accepter ces « Accords d’Alger », procéder à l’arrestation, sous pression de la France, des officiers qui ont largement contribué à son élection, en les accusant de « crimes » lors de leur prise du pouvoir des mains d’ATT.
Le même IBK, à cause d’une puissante résistance à la fois populaire et au sein de l’Armée malienne, ne fut jamais en mesure d’organiser un référendum pour changer la Constitution et rendre applicables les « Accords d’Alger », pas plus qu’il n’a pu juger les officiers arrêtés.
Ainsi, face à cette résistance qui exerce une forte pression sur Kidal où l’Etat malien est interdit de revenir par la CMA soutenue par la France, les « Accords de paix d’Alger » se révèlent de plus en plus inapplicables aux yeux des autres partenaires du pays.
Le Président Emmanuel Macron, qui a succédé au Président Hollande, créa alors le « G5 SAHEL » pour impliquer dans sa lutte contre les djihadistes, le Burkina, le Niger, la Mauritanie et le Tchad, aux côtés du Mali, jetant ainsi les bases de l’extension de la crise sécuritaire du nord Mali, au centre du pays et à ses frontières.
Le retour de l’autorité de l’Etat à Kidal cessait ainsi d’être la préoccupation de la Communauté internationale, mais continuait, pour les forces vives du Mali, d’être l’épicentre de la crise sécuritaire de leur pays et le principal vecteur de sa partition.
Responsabilité d’IBK dans la crise actuelle du Mali
La gouvernance d’IBK a, avec la signature des inacceptables « Accords d’Alger », non seulement aggravé la crise sécuritaire au nord Mali où elle a débuté, mais cette gouvernance l’a aussi répandue au centre du pays, donnant ainsi l’occasion à divers groupes armés, dont des terroristes islamistes, d’installer la terreur et l’insécurité au Mali.
Autrement dit et objectivement, l’incapacité du Président IBK de restaurer la souveraineté de l’Etat malien sur l’étendue du territoire national, notamment au Nord et au Centre, a rendu le pays ingouvernable.
C’est sur cette toile de fond de crise que l’élection présidentielle de 2018 a permis à IBK d’obtenir un second mandat. Un mandat que dans un premier temps l’opposition a contesté vainement devant la Cour Constitutionnelle qui l’a validé puis, dans un deuxième temps, a vigoureusement combattu dans la rue, ajoutant ainsi à la crise sécuritaire et politique, une crise sociopolitique.
L’ampleur de cette crise politique peut être mesurée à l’aune des nombreuses tentatives de son règlement pacifique qui ont abouti à la tenue d’un « Dialogue National Inclusif » (DNI) qui a adopté un « Programme de sortie de crise ». Celui-ci recommande, entre autres, une « relecture des Accords d’Alger » pour revoir les dispositions que l’opposition et la société civile considèrent contraires à la Constitution du Mali et « l’ouverture de négociations avec les groupes armés, conformément aux recommandations faites antérieurement par la « Conférence Nationale de Réconciliation et de Paix ». Autant de pistes de solution contrariant la stratégie de lutte de la France contre les groupes armés qu’elle considère comme des « djihadistes ».
IBK a été incapable de mettre en œuvre ces recommandations. Entre autres, en raison de l’hostilité de la France à toute « remise en cause des Accords d’Alger » et à « toute négociation avec les groupes armés ».
Cette attitude de la France est perçue par les forces vives du Mali, comme le principal obstacle à la « réconciliation nationale, à la paix » et au « recouvrement, par l’Etat malien, de l’intégralité de son territoire, pour permettre à son peuple d’y exercer légitimement sa « souveraineté pleine et entière ».
C’est cette perception de l’attitude de la France qui a provoqué un vaste mouvement populaire qui réclame l’aide militaire de la Russie, à l’image de l’appui de celle-ci à la République Centrafricaine, et exige le départ des troupes françaises du Mali, dont les Généraux occupent des fonctions stratégiques dans l’Etat- Major de l’armée malienne et dans le Commandement de la force onusienne (MINUSMA).
Le peuple Malien a la conviction que la « France fait partie du problème et non de sa solution », d’autant qu’en dépit de ses positions stratégiques dans la gouvernance de la MINUSMA, Kidal reste un « sanctuaire » interdit aux autorités de l’Etat, et que la CMA, au lieu d’être désarmée, est plutôt parvenue à se doter d’un puissant arsenal de guerre.
De même, malgré les fortes positions françaises dans l’Etat-major de l’armée malienne et en dépit de « l’Opération Barkhane », les soldats maliens, mal équipés, sous encadrés et démoralisés, continuent d’être massacrés du Nord au Centre du Mali où, dans le même temps, l’insécurité règne jusqu’à atteindre des pays limitrophes.
C’est dans ce contexte que se sont tenues les élections législatives au Mali. L’opposition et la société civile, malgré toutes leurs réserves quant au système électoral et à l’impartialité de la Cour constitutionnelle, espéraient l’emporter pour imposer à IBK la mise en œuvre des « Recommandations du DNI » et à l’image du Parlement Irakien avec les Américains, « voter une motion pour le départ des Forces Armées françaises du Mali ».
IBK, pour ne donner aucune chance de prospérer à cette éventualité, a instrumentalisé la Cour constitutionnelle. Une cour qui a été prise en flagrant délit de falsification des résultats de certaines communes dont l’objectif était de donner au Président malien la majorité parlementaire.
Cette entreprise a définitivement discrédité la Cour constitutionnelle faisant de sa dissolution, fortement demandée par l’opposition, une exigence populaire pour sauver la démocratie et l’indépendance du Pouvoir judiciaire qui en est la garantie.
En définitive, c’est bien ce « coup de force électoral » qui apparait comme l’étincelle mettant le feu dans la poudrière qu’est devenu le Mali.
Conclusion
Au vu de tout ce qui précède, il semble peu contestable qu’IBK ait atteint ses limites sociales et que son maintien en tant que Président de la République et Chef de l’Exécutif risque de précipiter le Mali dans un gouffre insondable. L’entêtement dont il fait montre ne fera qu’enfoncer davantage le Mali dans la crise sécuritaire et sociopolitique, avec tous les risques de déstabilisation des pays du Sahel que cela comporte.
A la vérité, le cumul des fonctions de Président de la République et de Chef de l’Exécutif, confère à IBK un pouvoir quasi autocratique, lui permettant de gouverner selon sa volonté durant tout son mandat de 5 ans, renouvelable une fois, sans devoir rendre compte de sa politique ou de ses décisions au Parlement. Celui-ci n’a aucun contrôle sur lui et peut être dissout s’il entrave sa volonté. Or, c’est bien cette concentration excessive de pouvoirs entre les mains d’un seul homme qui mène à toutes les errances.
Voilà pourquoi IBK avait osé signer les « Accords d’Alger » sans, auparavant, les soumettre au parlement.
Le peuple Malien, en revendiquant le départ du Président IBK pour réunir les conditions politiques de sortie de la grave crise que le pays endure, lui reconnait, en même temps, un rôle à jouer dans une période transitoire. A condition, qu’il renonce aux fonctions de Chef de l’Exécutif que va exercer un « Premier Ministre de transition » issu des rangs du « Mouvement du 5 juin » (M5), et accepte, par la même occasion, de dissoudre l’Assemblée nationale et la Cour constitutionnelle.
Il s’agit d’une brèche ouverte dans le régime présidentiel, qui balise la voie vers un régime parlementaire, permettant de mettre fin au « pouvoir autocratique » de tous les dangers en Afrique.
Un tel changement institutionnel n’est-il pas redouté par certains Présidents d’Afrique au pouvoir ? Ceci n’explique-t-il pas la position de la CEDEAO dans la crise au Mali, ainsi que celle des partenaires au développement qui y voient une menace conduisant à la perte de leur contrôle sur les Pouvoirs Exécutifs africains ?
Il est à noter que depuis l’installation du MNLA à Kidal jusqu’à nos jours, il n’y a plus de manifestations de la société civile du Niger contre les contrats léonins dont bénéficie la France dans l’exploitation de l’uranium, ni prises d’otages de travailleurs français ou européens dans cette exploitation.
Il faut aussi constater qu’avec l’acquisition de la base aérienne stratégique de TESSALIT dans la région de Kidal lors des « Accords de Défense » signés avec IBK, et « l’Opération Barkhane », la France occupe une position géostratégique d’importance capitale pour le contrôle militaire du Sahel.
Enfin, avec « l’Opération TAKUBA » en cours de mise en place, la France est parvenue à impliquer des pays d’Europe, dont l’Allemagne, dans sa stratégie de renforcement de ses positions géostratégiques au Sahel, comme elle l’a réussi avec les pays du G5 SAHEL.
Autant d’éléments permettant de conclure que les forces vives du Mali font face à une politique de déstabilisation et de démembrement de leur pays par la France pour ses intérêts économiques au Niger, et géostratégiques dans le Sahel, avec le soutien de l’UE, la complicité active des pays du G5 SAHEL, la complicité passive des autres membres de la CEDEAO et de l’UA. Ce qui ouvre la voie à des groupes armés, notamment djihadistes, qui sèment l’insécurité jusque dans les Etats frontaliers du Mali aux fins de couvrir leurs réseaux de trafics en tous genres.
Face à cette énorme machine à broyer le peuple malien, les républicains et démocrates d’Europe, notamment de France et d’Allemagne, et les panafricanistes, notamment des autres pays de la CEDEAO et de l’UA, sont interpelés chacun dans son pays, et tous ensemble pour:
Exiger le départ des troupes françaises et l’arrêt de « l ‘Opération TAKUBA » pour céder la place à la MINUSMA dont le mandat devrait être transformé en « soutien et encadrement de l’armée malienne », avec l’appui de l’UA, pour rétablir l’autorité de l’Etat malien sur toute l’étendue de son territoire et arrêter le génocide en cours du peuple malien.
Soutenir la lutte du M5 contre le régime décadent du Président IBK, pour mettre en œuvre son « programme de libération nationale », de « consolidation de la démocratie » par la transformation du régime présidentiel en régime parlementaire dans un Etat Républicain, Laïc, de Droit et de Justice sociale, qui jette les bases de la « Démocratie Citoyenne ».
Car dans le fond, c’est cette transition que veut initier le M5. Une transition du régime présidentiel vers un régime parlementaire en gestation dans tous les pays d’Afrique et qui quelque part explique l’âpreté de la lutte politique contre les pouvoirs excessifs, quasi incontrôlables des Présidents de la République, Chefs de l’Exécutif.
Mais cette lutte butte sur la forte attraction que cette concentration de pouvoirs entre les mains d’un seul homme exerce, comme un aimant, sur les couches moyennes qui, appuyées par les grandes puissances qui se disputent les richesses de l’Afrique, ne se font aucune concession pour y accéder, ou pour la conserver le plus longtemps possible, même au risque d’une plus grande déstabilisation de leur pays.
La crise sécuritaire et sociopolitique en cours au Mali illustre parfaitement cet état de fait qui prévaut dans le continent et auquel le M5 veut mettre un terme.
En ce qui le concerne, le PIT/SENEGAL ne ménagera aucun effort pour contribuer à rassembler les panafricanistes du pays, de la CEDEAO, et de l’UA, afin qu’ils jouent leur partition dans l’élan de solidarité à construire, avec la lutte du M5, pour la paix, la sécurité et la prospérité du peuple frère malien.
Dakar, le 10 août 2020
Le Secrétariat du Comité Central
Source: L’Enquêteur