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La sécurité des JO de Sotchi sur la sellette après l’attentat de Volgograd

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A moins d’un mois des Jeux Olympiques d’hiver de Sotchi, la Russie a annoncé cette semaine la mise en place de nouvelles mesures de sécurité sur les sites olympiques. Une série d’attentats ont été perpétrés. Notamment le 30 décembre où au moins 14 personnes ont été tuées et 41 blessées dans l’explosion d’un trolleybus à Volgograd, cette ville située non loin du Caucase russe, au sud-ouest du pays. Déjà, la veille, un attentat-suicide avait visé la gare, faisant 18 morts. Depuis, une enquête pour «attentat terroriste» a été ouverte. Une question qui a retenu l’attention d’Appels sur l’actualité, l’émission de Juan Gomez.

Quels sont les éléments de l’enquête qui permettent d’identifier ces kamikazes ? Sont-ils comme il a été dit d’origine caucasienne ? Pour l’instant, aucun élément d’enquête connu du public ne permet de l’affirmer. Mais le mode opératoire, la proximité relative du Caucase et de Sotchi, ainsi que les menaces proférées par les islamistes caucasiens à l’encontre des Jeux Olympiques laissent à penser

que les deux attentats pourraient s’inscrire dans le cadre d’une opération d’intimidation organisée par les islamistes caucasiens à l’approche des JO de Sotchi. Mais aucun élément d’enquête pouvant étayer cette thèse n’a été rendu public jusqu’à présent. Juste après le premier attentat, celui de la gare de Volgograd, la police a parlé d’Oxana Aslanova, la veuve d’un combattant islamiste caucasien tué par les forces russes. Elle ferait partie des redoutables « Veuves noires » qui auraient déjà commis, par vengeance, plusieurs attentats-suicides en Russie.
Comme si on dansait sur leurs tombes

Selon cette version, Aslanova, voyant un policier s’approcher d’elle, aurait déclenché une charge explosive à l’entrée, au point de contrôle de sécurité. Une version rapidement abandonnée : les services spéciaux semblent maintenant convaincus que l’auteur de l’attentat était plutôt un homme de type européen. Un nom a même été cité dans les médias, celui de Pavel Pietchonkine, un Russe converti à l’Islam et originaire du Daguestan. La police aurait procédé à un test ADN de son père afin de vérifier s’il correspondait à celui prélevé sur le corps du terroriste présumé. Quant à l’auteur de la deuxième attaque contre un trolleybus, le parquet a juste informé qu’il était « de sexe masculin ». On n’en sait pas plus pour l’instant.

Aucune revendication n’a été publiée pour le moment. Officiellement, on ne sait ni qui sont les auteurs des attentats, ni ce qu’ils veulent, ni si les deux attaques étaient préparées et exécutées par une seule et même organisation. Néanmoins, l’hypothèse avancée le plus souvent par les spécialistes et par les médias est celle d’une organisation qui vise à créer un « Emirat du Caucase » – un Etat islamique indépendant dans le Caucase du Nord. A sa tête, Dokkou Oumarov, devenu ces dernières années l’ennemi numéro un des Russes dans la région.

Sotchi fait partie des territoires sacrés

Voici quelques mois, Oumarov a appelé tous les musulmans à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour empêcher la tenue des JO de Sotchi. Pour les islamistes caucasiens, Sotchi fait partie des territoires sacrés, où beaucoup de musulmans sont morts en combattant les infidèles et organiser des JO à cet endroit constitue une offense à leur mémoire : comme si on dansait sur leurs tombes. Oumarov se dit prêt à tout pour empêcher ce sacrilège. En termes plus prosaïques, il s’agit pour lui certainement avant tout de profiter de l’occasion pour faire parler des problèmes du Caucase dans tous les médias du monde. Et de consolider sa position au sein de mouvements islamistes. Recherché par tous les services spéciaux russes, il demeure jusqu’ici introuvable. Et il ne faut pas s’attendre de sa part à une revendication rapide des attentats. D’abord, il les revendique rarement, et s’il le fait, c’est très tardivement. Pour ne pas être repéré, il n’utilise aucun moyen moderne de communication ou de transport. Il lui faut donc beaucoup de temps pour pouvoir transmettre son message à quelqu’un susceptible de le publier sur Internet.

Volgograd, un énorme nœud ferroviaire et routier

Si la ville de Volgograd a été choisie comme cible, c’est d’abord pour des raisons logistiques et pratiques : c’est un énorme nœud ferroviaire et routier. Ceux qui se dirigent du sud de la Russie, notamment du Caucase, vers le centre du pays passent par Volgograd et y changent souvent de train. Il y est donc relativement facile, pour un Caucasien, de se perdre dans la foule sans attirer trop l’attention. Il est également assez facile de rester anonyme dans une ville d’un million d’habitants. L’autre raison du choix de Volgograd est symbolique puisque c’est l’ancienne Stalingrad, la ville de la fameuse victoire soviétique sur l’armée nazie… Et donc le symbole de la puissance militaire russe en général.

Réussir deux attentats sanglants dans une telle ville en deux jours, c’est porter une grave atteinte à la fierté nationale russe et au prestige des forces spéciales et de l’Etat russe. Enfin, il s’agissait sans doute également de montrer sa capacité de frapper fort, non seulement dans une période proche des Jeux de Sotchi, mais aussi à un endroit relativement peu éloigné de ces derniers : 700 kms, ce n’est pas vraiment à côté, mais à l’échelle russe, ce n’est pas non plus très loin. Et en tout cas, montrer sa capacité de détourner l’attention du monde entier des Jeux pour la concentrer sur les problèmes de sécurité, voilà ce qui a bien été démontré.

L’impact direct, et le plus visible, de ces attentats sur l’organisation des JO de Sotchi en février 2014, c’est maintenant l’obligation pour les autorités russes de sécuriser le site olympique au point de le militariser ou presque. Et ce n’est pas tout. Il faudra aussi sécuriser et étroitement surveiller pratiquement toute la ville et ses environs, afin d’éviter que des terroristes arrivent à y pénétrer. Et tout ça sans la moindre garantie de succès. En effet, Dokkou Oumarov a montré plus d’une fois qu’il savait être prévoyant. Déjà, en 2012, des caches d’armes et d’explosifs ont été découvertes en Abkhazie voisine. On ne sait pas s’il y en a d’autres. Et si des émissaires d’Oumarov sont déjà sur place – et depuis combien de temps. Toutes ces questions sans réponses vont obliger les autorités russes à transformer le site olympique et la ville de Sotchi en camp retranché, où on sera peut-être en sécurité, mais qui ne sera pas forcément agréable à vivre. Et puis, les tests menés par les terroristes à Volgograd montrent clairement qu’il ne sera sans doute pas nécessaire de frapper à Sotchi même pour gâcher la fête à tout le monde.

Un régiment de Cosaques patrouille les rues

Quelles mesures le gouvernement russe compte-t-il prendre pour empêcher de prochains attentats ?A défaut de pouvoir vraiment les empêcher, les autorités russes montrent les muscles et espèrent au moins rassurer ainsi la population effrayée par ce qui se passe. La peur est palpable et visible à Volgograd. Pendant quelques heures après les attentats, le téléphone rouge de soutien psychologique a répondu à plus de mille appels. Dans cette ville d’un million d’habitants, les transports en commun circulent souvent quasiment vides.

En revanche, c’est une aubaine pour les taxis, pris d’assaut par les habitants terrifiés à l’idée de se rendre à une gare ou de prendre un bus. Sur les trottoirs, on aperçoit d’imposantes colonnes de gens qui se déplacent tout simplement à pied. De ce point de vue, les terroristes ont déjà atteint l’un de leurs objectifs : la vie dans l’une des grandes villes russes est partiellement désorganisée.

D’où les fréquentes démonstrations de force des autorités. Des colonnes de camions militaires de transport de troupes entrent en pleine ville. Un régiment de Cosaques a été envoyé patrouiller les rues. Toute personne ne pouvant pas produire de papiers en règle est immédiatement arrêtée. Des milliers de policiers et de militaires ont été envoyés à Sotchi pour sécuriser le site olympique. Cependant, ce ne sont pas les mesures de ce genre qui vont prévenir les attentats. Pour les empêcher, il faudrait sans doute infiltrer le réseau islamiste caucasien et pouvoir s’informer à la source. Or, c’est extrêmement difficile. Il s’agit d’un milieu hermétiquement fermé et obéissant à de règles très strictes et presque paranoïaques quand il s’agit de contacts avec l’extérieur. Les mesures prises par le pouvoir russe sont, certes, spectaculaires, mais elles risquent de s’avérer plus efficaces pour rassurer la population que pour attraper les terroristes avant qu’ils ne commettent leurs actes.

rfi

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