Le cercle de Kadiolo compte environ une dizaine de sites d’orpaillage. Depuis 2003, ces sites ou encore placers sont occupés par des milliers d’individus des deux sexes et de multiples nationalités à la recherche de pépites d’or. Il est facile de comprendre combien ces sites d’orpaillage occasionnent de problèmes sur la santé, l’éducation, l’agriculture, la sécurité et l’environnement.
Dans le domaine de la santé, la couverture sanitaire s’avère très difficile compte tenu de la situation démographique. Les mouvements des orpailleurs et de leurs familles entre les sites empêchent les agents de santé de réunir des indicateurs fiables sur les pathologies rencontrées et donc de planifier correctement les services de santé.
Sur le terrain, dans tous les sites, les orpailleurs, hommes, femmes et enfants, vivent dans de mauvaises conditions d’insalubrité et de promiscuité, sans se soucier de leur santé. Des familles entières habitent dans des huttes en paille à proximité des trous profonds creusés à la recherche du métal précieux. Les habitations étant dépourvues de latrines, les défécations s’effectuent à l’air libre. Les repas sont préparés et consommés dans de mauvaises conditions hygiéniques. « Les comportements à risques que nous avons constatés sur les sites sont à la base de la détérioration de la santé des orpailleurs », souligne le Dr Emilien Diarra, médecin chargé de la santé de la reproduction au Centre de santé de référence de Kadiolo. Le toubib précise que les populations vivant sur les sites d’orpaillage sont régulièrement confrontées au paludisme, aux maladies diarrhéiques, aux infections respiratoires aigues et infections sexuellement transmissibles notamment le VIH/SIDA.
Facteur aggravant les risques de maladies sur les sites d’orpaillage, les populations sont pour la plupart rétives aux campagnes de vaccination des enfants. Cette attitude est déplorée par les agents de santé qui rappellent que la vaccination est faite dans le cadre de la politique de santé publique afin d’éradiquer certaines pathologies.
Autre constat qui irrite les médecins : les femmes ne suivent pas les consultations prénatales, les orpailleurs malades font recours très tardivement aux soins de santé. La malnutrition est la source principale des décès maternel et infantile sur les sites.
Petite lueur d’espoir : de plus en plus, les séances d’information et de sensibilisation sur le VIH/SIDA viennent à bout des réticences de certains orpailleurs vis-à-vis du dépistage du VIH/SIDA. Mais beaucoup de malades abandonnent le traitement dès qu’ils se sentent en forme.
Dans le domaine de l’éducation, la déperdition scolaire est très marquée sur les sites miniers. Les enfants sont les premières victimes de la fièvre de l’or. Ils abandonnent l’école parce qu’ils sont souvent contraints de suivre leurs parents qui déménagent de site en site. Dans d’autres cas, les enfants décident eux-mêmes de quitter les bancs pour tenter leur chance dans les mines afin d’acquérir un vélo, un téléphone portable ou un appareil de musique.
Dans le domaine de la sécurité, le banditisme est un phénomène courant sur les sites d’orpaillage de Massiogo, Fenkolodadjan, Bia, Badalabougou, Sinty. Tout comme la prostitution, l’usage des stupéfiants, la délinquance, l’escroquerie, les vols avec effraction, etc.
Le cercle de Kadiolo, par le passé, se distinguait dans la production de coton graine. A cause de l’orpaillage, la production agricole a énormément baissé aujourd’hui. Les bras valides ont fui les zones agricoles au profit des sites miniers où, estiment-ils, on peut, du jour au lendemain, accéder à une vie de nabab par la magie de la chance.
Au plan environnemental, les sites d’orpaillage amènent en général des déboisements, la destruction du couvert végétal, la pollution des cours d’eau comme le Bagoé qui matérialise la frontière entre le Mali et la Côte d’Ivoire. Les berges de ce cours d’eau sont totalement détruites par les orpailleurs.
Même s’il a un impact positif indéniable sur les revenus des populations, l’orpaillage est devenue aujourd’hui une plaie, par bien des côtés.
C. BATHILY
AMAP-Kadiolo