Légumes locaux et importés se côtoient toujours sur les étals des commerçants, au grand plaisir des ménagères
Certains medias de la place annonçaient la semaine dernière, l’interdiction d’importation de certains produits notamment l’oignon et la pomme de terre, deux légumes très prisés des ménagères. C’était une fausse alerte.
Une certitude cependant : ces produits sont constamment l’objet d’une spéculation dont l’amplitude varie selon les périodes de l’année. En cette période de saison sèche, le marché est abondamment pourvu. Les légumes locaux frais, oignons, pommes de terre, gombos et tomates, inondent les étals à la grande satisfaction des commerçants et des ménagères. Le kilogramme d’oignon, tous genres, est vendu entre 175 et 200 Fcfa.
Cette abondance saisonnière ne ralentit pourtant pas les importations. Les oignons made in Sénégal ou Maroc ont quotidiennement beaucoup de succès auprès des ménagères. Des dizaines de camions chargés de pommes de terre, d’oignons et, depuis peu, de carottes, choux, tomates et autres légumes déchargent chaque jour leurs cargaisons le long de la grille d’enceinte du stade omnisport.
Ce commerce, aussi, est saisonnier. L’importateur Souleymane Sylla confirme. « D’habitude, je suis acheteur, c’est à dire que nous sillonnons l’intérieur du pays à la recherche de produits frais pour ravitailler la ville de Bamako et les régions de Koulikoro et Kayes. La région de Sikasso était notre première destination. Cependant, depuis quelques années, à cause certainement des facteurs climatiques et de la non promotion de la culture de légumes et fruits dans notre pays, ces produits se font rares sur le marché intérieur, pendant certaines périodes. Notamment pendant la saison des pluies. Depuis bientôt cinq ans, on part chercher ces produits dans les marchés sous-régionaux, notamment au Sénégal et au Burkina Faso. Malheureusement, ces pays font également face à la même contrainte climatique. C’est ainsi nous nous sommes dirigés vers le Maroc qui a une grande production et offre des facilités d’importation ».
Nos commerçants importent également des fruits et des légumes d’Espagne. Dramane Diallo s’est fortement investi dans le made in Espagne. Selon lui tout se négocie sur le marché espagnol. «Là-bas, comme au Maroc, les négociants nous abordent. Ils nous proposent leurs produits qui semblent être de meilleure qualité. Les prix sont aussi abordables et les conditions proposées meilleures. C’est la loi du marché, le commerçant est toujours attiré par les facilités. Nous importons donc des oignons et de la pomme de terre espagnols », indique le commerçant qui précise qu’il s’agit d’un commerce purement périodique.
AUCUNE RESTRICTION. Cette importation massive de légumes du Maroc et d’Espagne a une incidence réelle sur les prix. Sur le marché bamakois, légumes locaux et importés se côtoient aujourd’hui au grand plaisir des ménagères. Le constat est sans équivoque : les produits importés ont la cote.
Les producteurs locaux qui ont conscience de la menace, ont décidé de monter au créneau en demandant une interdiction d’importation de la pomme de terre et de l’oignon pour permettre l’écoulement de leurs productions. Mais du coté des importateurs, on conteste cet argument en assurant que la seule production locale ne peut satisfaire les besoins de consommation du pays. Il faut préciser que les importateurs dont on parle sont en réalité des commerçants.
Le département du Commerce se veut, lui, pragmatique. « Pour le moment, il y a pas d’interdiction d’importation. C’est vrai, la production locale d’oignons et de pommes de terre a commencé, mais suffit-elle à satisfaire les besoins de consommation ? Mieux, cette production ne dure pas plus de deux mois. Interdire les importations ne contribuera-t-il pas à disloquer la structure actuelle du marché ? Ici, nous sommes dans la logique d’assurer la stabilité du marché et d’éviter les spéculations et les pénuries. Nous avons créé un cadre de concertation entre les importateurs et les producteurs locaux pour qu’ils discutent de leurs préoccupations respectives », indique notre source qui insiste sur le fait qu’il n’y a ni interdiction d’importer, ni une quelconque autre restriction.
Sékou Diaby, cet autre importateur, tempère. « Les importateurs d’oignons et de pommes de terre sont d’abord des acheteurs locaux. Nous sillonnons toutes les grandes zones de production à la recherche de produits. C’est lorsque la production locale n’est pas suffisante que nous importons. Sur le marché actuellement, les importations d’oignons sont lentes, contrairement aux importations de pommes de terre. La production locale de pomme de terre ne peut pas tenir le marché pendant deux semaines. C’est nous qui alimentons Bamako, on connaît les réalités », lance t-il.
Dès l’annonce de la fausse information sur l’interdiction d’importer, les spéculateurs se sont précipités sur les produits cités pour tenter d’engranger un maximum de profits. En une semaine, la pomme de terre locale est passée de 200 à 350 Fcfa/kg, selon les marchés.
Un tour dans les différents points d’approvisionnement de ces produits, nous a permis de constater que le niveau d’approvisionnement est cependant satisfaisant. De la place de Niono pour les produits locaux, au marché Médine pour les produits importés, des cargaisons de pommes de terre affluent à un rythme soutenu. Dès leur arrivée, des véhicules transportant ces produits sont pris d’assaut par les commerçants de l’intérieur. Alors place aux éternels marchandages entre grossistes et détaillants.
D. DJIRE
source : L Essor
