La décentralisation, malgré les louanges qu’on égrène au quotidien à son sujet, peine toujours à trouver sa voie dans notre pays. En effet, malgré l’adoption de la loi qui la crée en1993 et sa mise en oeuvre en 1999, le Mali demeure toujours un Etat centralisé, avec un exécutif aux pouvoirs exorbitants dans les mains du président de la République. Pour de nombreux Maliens, d’ailleurs, c’est ce type de gouvernance qu’il nous faut. Cela au vu des réalités du pays: un État faible, dans tous les sens du terme, avec une population dont le niveau de vie ne cesse de se dégrader alors que s’allonge la liste des fonctionnaires-civils et militaires – multimillionnaires. La corruption a ainsi atteint un tel degré qu’on se demande si un transfert des compétences en matière de ressources aux élus locaux ne va pas entraîner une déperdition dramatique desdites ressources. Car, comme on le sait, les élus locaux que nous avons ne cherchent le plus souvent qu’à s’enrichir sur le dos du peuple.
C’est dire que les quelque 600 participants aux états généraux sur la décentralisation, qui s’ouvrent aujourd’hui sous la présidence du chef de l’Etat IBK, feront face à un véritable dilemme. Car, tous les participants auront à l’esprit les revendications autonomistes-indépendantistes des groupes armés qui sévissent au nord du Mali. C’est à se demander, du reste, s’ils seront présents auxdites assises dont ils avaient, dans un récent communiqué, rejeté les dates auxquelles ils se tiennent. Voire le principe de la tenue.
Comme on le voit, IBK fait face à un défi dont dépendra le reste de son mandat. Ayant été présenté comme « le candidat qui peut résoudre la crise au nord du pays », il joue à cet effet et des maintenant son va-tout. S’il opte pour l’intransigeance, il sera accusé par les rebelles « de ne pas appliquer l’accord de Ouagadougou »; alors que ses électeurs et une frange écrasante de l’opinion publique nationale veut, au contraire, qu’il montre ses muscles en rejetant toute idée d’autonomie et ne parlons même pas de « large autonomie » pour les régions du nord.
Avec un État faible, aller dans le sens voulu par les rebelles serait suicidaire tant pour le pouvoir qui agirait dans cette voie, que pour les populations autochtones qui verront leurs territoires transformés (encore) en sanctuaires pour les jihadistes-terroristes et les narco-trafiquants. C’est dire que les débats seront très houleux à ces états généraux sur la décentralisation. Surtout que les terroristes viennent de se faire entendre (encore une fois) par des prises d’otages…dans la région de Gao.
Source: L’Indépendant