Le cinéma malien vient de perdre un de ses grands réalisateurs en la personne d’Assane Kouyaté. Il s’est éteint mardi dernier en sa demeure à Bamako des suites d’une longue maladie. Celui que les intimes appellent Alko a fait son entrée dans le cercle très fermé des réalisateurs de long-métrage. Il a successivement occupé le poste de conseiller technique chargé du cinéma et de la photographie auprès du ministère de la Culture. à partir de 2010, il était encadreur consultant au Conservatoire des arts et métiers multimédia Balla Fasséké Kouyaté de Bamako.
Depuis bientôt cinq ans, il était sur la production d’un grand long-métrage intitulé «Cheytan», fiction long métrage, sur la crise sécuritaire que vit notre pays depuis 2012. Le tournage est terminé, l’équipe du film et le Centre national de la cinématographie du Mali (CNCM) qui en est le producteur s’attèlent depuis trois ans au montage. Modibo Souaré, le directeur du CNCM estime que la mort de Assane Kouyaté est une grande perte pour notre cinéma et particulièrement pour cette production dans laquelle l’état s’est beaucoup investi.
C’est en 2003 que l’on pourrait situer l’apogée ou le firmament de sa carrière. Son long-métrage de fiction «Kabala» sur la problématique du développement durable dans le Mandé a remporté un grand succès à travers le monde. Le film remporte le prix du jury dans le palmarès officiel du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO) en 2003.
Lors de la même édition, il remporte quatre autres prix spéciaux que sont le Prix du Meilleur scénario, Prix de Meilleure image, Prix du PNUD, Prix TV5/Fespaco 2003. «Kabala» est ensuite sélectionné pour la Semaine internationale de la critique au Festival de Cannes (2003). Une consécration qu’aucun autre film malien n’a pu obtenir depuis.
Il participe également à des festivals à travers le monde comme ceux d’Angers, de Paris, de Mills Valley (San Francisco), de New-York, de Montréal, de Yaoundé, et de Carthage, etc.
En 2005 Alko produit trois documentaires de 52 minutes chacun sur les savoir-faire en danger. Il s’agit : «Les Orfèvres de l’argile», «Coton et Tissage traditionnel» et «Maçonnerie de terre, quel Avenir ?»
Assane Kouyaté est un réalisateur prolixe qui a travaillé sur de nombreuses productions et réalisé lui-même plus d’une dizaine d’autres films. Il s’agit, entre autres, de «L’Institut Marchoux» sur la réinsertion des lépreux dans la vie socio-économique en 1980 ; «Le Parfum et la Calebasse» une fiction, en 1981 ; «Thérèse et Patrick», une fiction en 1989 qui a obtenu le Prix du court métrage des films de diplôme de l’Institut national de la cinématographie (VGIK) au Festival de Tachkent (Ouzbékistan).
En 1990, il réalise «Témoignages Démocratiques» un film de 52 minutes sur l’évolution démocratique du Mali de 1991 à 1992. Et en 1992, en collaboration avec le CESPA, il réalise «Une place pour Lala à l’école», sur la scolarisation de la jeune fille à l’école.
Assane naquit à Bamako, le 25 décembre 1954, il était marié et père de trois enfants. Après ses études fondamentales à l’école de Niaréla, il a passé le bac en 1974 dans la série PLA au lycée Askia Mohamed. En 1978, il est titulaire du diplôme d’études supérieures de Lettres modernes à l’école normale supérieure (ENSUP) de Bamako. En 1991, il décroche après quatre années d’études en ex-URSS (Union des Républiques socialistes soviétiques) le diplôme d’études approfondies (DEA) de l’Institut d’état de Cinéma de Moscou (Fédération de Russie), Option réalisation fiction. Ensuite, il effectua des stages au Maroc, en Suisse et au Danemark.
Cet enseignant de formation fera ses premières armes entre 1979-1980 comme professeur d’enseignement secondaire de littérature, au lycée Sankoréde Bamako.
Youssouf DOUMBIA
Source : L’ESSOR