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Gao : Une ville dans la tourmente de l’obscurité, de l’insécurité et de la précarité sociale

Symbole de la résistance à toutes les velléités de partition de la République du Mali, grâce notamment au courage de sa population dévouée à la patrie, Gao est de nos jours confrontée à un sort peu enviable. Les populations ont l’impression d’être aujourd’hui les laissées pour compte de l’Etat. A cause essentiellement de l’insécurité, la ville est permanemment sous embargo condamnant ses habitants à la précarité. Avec des prix hors de portée de leur bourse, privés d’eau et d’électricité, les Gaois se demandent aujourd’hui pourquoi la République se détournent d’eux ?

Ville connue pour sa résistance à toutes les velléités séparatistes, Gao manque presque de tout aujourd’hui. Les populations souffrent le martyr ces derniers mois à cause notamment de l’insécurité qui prive aujourd’hui la ville et la région de Gao de ses principales sources d’approvisionnement. Le blocus est ainsi devenu presque permanent sur l’axe Sévaré-Gao. Les camions d’approvisionnement sont bloqués dans les deux sens. Idem aussi sur l’axe Gao-Ansongo-Niamey où on ne peut plus circuler sans escorte. Cet axe est pourtant crucial pour l’approvisionnement de la cité des Askia en denrées de première nécessité et en carburants. Le trafic est aussi presque bloqué avec l’Algérie où provenait une grande partie du lait, de l’huile, des pâtes alimentaires, des dattes… consommées à Gao. L’incendie du marché dit des légumes, le 7 février 2024, n’est pas non plus de nature à arranger la situation dans une ville où les prix ne cessent de s’envoler.

Le mois dernier (février 2024), le carton du lait Pura était vendu 50 000 F Cfa et le paquet à 2 500 F Cfa. Le kilo du sucre était cédé à 750 F Cfa, le litre d’huile à 1 100 F Cfa, le kilo du mil à 500 F Cfa et celui du riz à 700 (le riz local à 600 F Cfa), le carton du spaghetti vendu à 7 000 F Cfa. L’an dernier à la même période (février 2023), le carton du lait Pura était vendu 45 000 F Cfa et le paquet à 2 250 F Cfa. Le kilo du sucre était cédé à 750 F Cfa, le litre d’huile à 1 000 F Cfa, le kilo du mil à 400 F Cfa et celui du riz à 450 (le riz local à 600 F Cfa), le carton du spaghetti vendu à 6 500 F Cfa. «Les prix ont progressivement augmenté ces dernières années rendant les denrées de première nécessité inaccessibles pour la grande majorité des ménages», témoigne un jeune résident. La hausse des prix est très significative dans la mesure où les revenus ne cessent de chuter à cause de la conjoncture et surtout du chômage lié en partie au départ des forces internationales.

«Certes, la consommation des stupéfiants commence à prendre une dimension dramatique avec l’apparition de nouvelles drogues. Cependant, le problème à Gao c’est plutôt la fermeture des routes d’approvisionnement en denrées essentielles. Il y a un grand problème d’insécurité qui a appauvri les populations déjà affectées par le retrait de Barkhane et de la Minusma. Le chômage qui en résulte explique en partie l’explosion de la consommation des stupéfiants», nous explique un cadre natif de Gao. Il ne cesse d’alerter les associations communautaires du cercle et de la région pour des actions communes de plaidoyer afin de pousser les autorités du pays à agir par des solutions concrètes et pérennes.

«Je suis au chômage depuis le départ de Barkhane qui m’employait. Quand je travaillais, j’assumais l’essentiel des charges de la famille. Aujourd’hui, cela devient compliqué parce qu’il n’y pas de boulot. Ils sont nombreux les jeunes comme moi qui ont perdu leurs emplois à cause du retrait des forces internationales condamnant leurs familles à vivre dans la précarité», nous confie un jeune. «Il a été question des mesures d’accompagnement du gouvernement. Pour le moment, nous ne savons pas à quoi cela rime. C’est vrai qu’il y a des opérations humanitaires pour soulager les démunis, mais elles visent essentiellement les camps de déplacés. Et puis, ce n’est pas de la charité dont nous avons besoin, mais des emplois, de la sécurisation des routes d’approvisionnement de la ville et de la région», ajoute-il. «Nous n’avons pas besoin qu’on nous offre du poisson. Mais, qu’on nous donne les moyens de pécher pour prendre notre destin en main», renchérit l’un de ses compagnons d’infortune.

A noter que, dans un récent rapport, le Réseau de système d’alerte contre la famine a annoncé une «dégradation de l’insécurité alimentaire à partir de mai, à Gao et Mopti». Il est donc urgent d’agir en amont pour réduire l’impact de cette menace sur les populations. Des mesures d’urgence s’imposent donc pour soulager les braves populations de la Cité des Askia qui sont à bout de résilience ! En tout cas, clame un activiste ayant requis l’anonymat, «après avoir alerté les autorités maliennes plusieurs fois, les Forces vives de Gao peuvent entrer en action à tout moment pour que la République accorde à la ville et à la région la considération qu’elles méritent» !

M Bolly et M. Cissé

Le Matin

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