La situation sécuritaire devient de plus en plus alarmante dans certaines localités du septentrion malien. A Ansongo, plusieurs centaines de personnes ont fui leurs localités, en raison de la montée de l’insécurité, pour trouver refuge dans le chef-lieu de cercle.
Le samedi 8 février 2020, aux environs de 19 h, un septuagénaire, Seydou Yehya, est assassiné devant sa famille par des hommes armés. Il a d’abord été enlevé, torturé, les ongles arrachés avant d’être ramené et exécuté de deux balles en plein village. Beaucoup de personnes pensent que son exécution est liée à une interview à visage découvert qu’il a accordée à la chaîne de télévision France 24. Dans l’interview, il parle de la présence des groupes « djihadistes » dans son village et les rackets imposés aux populations.
Suite à plusieurs attaques meurtrières, l’armée malienne a décidé, le 9 novembre 2019, de se retirer de certaines positions, comme celles d’Anderaboukane (Ménaka) et de Labbezanga, dans le cercle d’Ansongo (Gao). Selon l’armée, il ne s’agissait pas d’abandonner des populations mais plutôt d’une stratégie permettant de regrouper les troupes pour mieux « résister ».
Les populations craignent d’être attaquées par les individus armés. Depuis le retrait de l’armée, elles se sentent abandonnées et sans défense. Quelques semaines après le retrait de l’armée, des hommes armés ont fait irruption dans le village de Labbezanga et assassiné l’imam Youssouf Aliou.
Braquages récurrents
« C’est à cause du retrait de la position de Labbezanga que la route qui mène au Niger est devenue la nouvelle cible des bandits armés. », estime Alassane Maïga, commerçant fréquent sur l’axe Gao-Niamey.
En effet, cet axe important pour l’économie de toute la région est devenu moins sûr et les braquages y sont fréquents. Des hommes armés font régulièrement des descentes dans les villages environnants et s’en prennent aux populations civiles. Début février, quatre villages-Ouatagouna, Tananza, Seyna et Lellehoye- ont subi des attaques ayant occasionné des pertes en vies humaines. Les villages de Ouatagouna (84 km d’Ansongo) et de Lellehoye (5 km) ont été la cible de deux attaques en une semaine.
Plusieurs centaines personnes ont déjà abandonné la zone, craignant des représailles de la part des groupes extrémistes violents. Des familles ont déjà rejoint Ansongo, abandonnant maisons et troupeaux. Selon des sources locales citées par la radio Studio Tamani, à la date du samedi 15 février 2020, plus de 625 familles, soit environ 3000 personnes, ont fui les localités de Lellehoye, Bentia, Fafa, Bourra, Tin-Hamma, Labbézanga et Seyna pour trouver refuge dans la ville d’Ansongo. Une situation qui, selon les autorités locales, fait craindre une crise humanitaire.
A Gao et Ansongo, des familles déplacées et des ressortissants de Labbezanga s’organisent en association pour venir en aide aux nouveaux déplacés. « Nous nous sommes retrouvés avec les déplacés pour trouver des solutions à la situation sécuritaire et humanitaire occasionnée par le retrait des forces armées maliennes de la position de Labbezanga. Nous nous retrouvons régulièrement et informons les autorités de l’évolution de la situation. », explique Youssouf Diallo, président de l’Association des ressortissants de Labbezanga, à Gao.
Départ des autorités locales
Presque toutes les autorités locales ont déjà abandonné la zone pour éviter d’être la prochaine cible des groupes extrémistes violents. Tous affirment avoir, d’une façon ou d’une autre, collaboré avec les forces armées et ont peur des représailles des nouveaux maîtres que sont les groupes extrémistes violents.
La situation sécuritaire va de mal en pis. En janvier dernier, le Premier ministre, M. Boubou Cissé, était en déplacement à Gao. Il avait promis le redéploiement de l’armée à la frontière avec le Niger dans de brefs délais. En attendant ce redéploiement, la situation sécuritaire dans le cercle d’Ansongo s’est totalement dégradée, faisant des victimes au sein des populations qui se sentent abandonnées.